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Procès Thomas Sankara: «Blaise a utilisé les personnes qui ont eu des frustrations pour monter son coup»,  (témoin Daouda Traoré)

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Le procès de l’assassinat du père de la révolution Burkinabè, Thomas Sankara et ses douze compagnons s’est poursuivi le mardi 16 novembre 2021 à Ouagadougou. Le premier témoin qui devrait passer pour donner sa version des faits, était absent. Il s’agit de Abdoul Salam Kaboré. Le deuxième témoin à la barre, est  Daouda Traoré. Il était lieutenant au moment des faits. L’homme est colonel-major à la retraite.  

Par Rama Diallo, stagiaire

Les témoins de l’assassinat du président Thomas Sankara et de ses douze compagnons ont commencé leurs témoignages. Daouda Traoré est celui qui est passé dans la matinée du mardi 16 novembre 2021.

Avant que le témoin ne prenne la parole, le président du tribunal, Urbain Meda lui a demandé s’il connaissait les accusés. Il a répondu qu’il connait les officiers parce qu’ils ont fait le Prytanée militaire du Kadiogo (PMK) ensemble. Le juge poursuit en demandant s’il a un lien de parenté avec certains accusés. Daoda Traoré a répondu par la négative.

Le président continue : vous connaissez un membre de la partie civile ? Monsieur Traoré : pas vraiment, c’est seulement madame Sankara que je connais.  Urbain Meda : alors nous vous écoutons.

Daoda Traoré explique ce qui s’est passé. « J’étais membre du bureau de la commission contrôle du conseil national de la révolution (CNR). Il y avait des bisbilles entre les membres de la révolution. Avant le 15 octobre, nous les membres de la commission, avons cherché à rencontrer Blaise Compaoré mais il s’est offusqué.

Il nous avait demandé pourquoi c’est vers lui que nous avons choisi d’aller. Nous lui avons expliqué le but de notre démarche et il s’est adouci. Il nous a fait comprendre qu’il n’avait rien contre Thomas Sankara. Et qu’il n’osera pas prendre une brindille contre le Président. Nous lui avons demandé de prendre la parole publiquement pour dire qu’il n’avait rien contre Thomas Sankara.

Et il était d’accord. Avant mon affection à Fada, j’avais demandé au Président Thomas Sankara de m’envoyer à Cuba pour un stage. Il a refusé, mais Blaise était d’accord. Il a même introduit la demande. Je voulais que le Président Thomas Sankara me confie sa garde, là encore, il a refusé.

Les affections sortent, je suis affecté à Fada. Un soir j’étais chez moi quand Salif Diallo arrive et il me dit, tu vois le Président ne t’aime pas. Blaise était favorable pour ton stage à Cuba mais le Président a refusé. Et voilà qu’il t’affecte à Fada.

Blaise n’est pas content. Il veut te rencontrer. Un jour, on s’est rencontré et il m’a exprimé son mécontentement. La veille du 14 octobre, je voulais me rendre à Fada pour la prise de service malheureusement, j’ai cogné un mur et  mon véhicule était endommagé. J’ai appelé Christophe Saba, je lui ai expliqué et il m’a dit de passer au conseil le 15 octobre à 16h pour qu’il me remette de l’essence pour mon voyage.

Le 15 octobre à 15 h, j’avais un rendez-vous avec le directeur d’une entreprise qui gérait les maisons car je voulais mettre ma maison en location pour ne pas qu’elle reste inhabitée. Mais le directeur m’a retardé jusqu’à 16 h. Quand je suis sortie de son bureau, j’ai entendu les coups de feu. J’ai pris mon arme et j’ai foncé.

J’ai traversé la cour de l’école Bogodogo et la cour de l’hôpital Yalgado. Arrivé devant le Conseil, mon garde de corps est descendu. Et il a dit c’est Daouda Traoré qui arrive. Les hommes devant le Conseil l’ont mis sur le ventre et ils ont tirés dans ma direction.

Comme je n’ai pas pu accéder au conseil, je suis parti à mon service. Dès que je suis arrivé, j’ai commencé à mettre les quelques éléments qui était là en place. Je plaçais un élément vers le mur quand j’ai entendu des tirs.

Un homme a essayé de tirer sur moi, la balle a traversé le mur et une partie du mur a rejailli sur mon visage. Je suis resté au bureau jusqu’à 20h. J’ai vu dans le journal Omer qui lisait une déclaration. J’ai appelé automatique au Conseil on m’a passé Omer. Je lui ai demandé où est le Président ? Il m’a passé Diendéré et j’ai demandé la même chose.

Il m’a passé Lingani j’ai demandé la même chose. Lingani m’a passé Blaise Compaoré j’ai demandé à Blaise où est le président ? Il m’a répondu qu’il est mort. J’ai demandé qu’est-ce qu’il venait de faire ? Il m’a répondu qu’il a perdu des hommes sont également.

Le même jour, des hommes armés sont allés chez moi. Le 17 octobre, j’ai appelé au Conseil et on m’a passé Lingani. Je lui ai demandé pourquoi vous voulez me tuer ? Il m’a répondu personne ne veut ta mort. J’ai appelé Blaise pour lui dire que j’allais rejoindre mon poste à Fada. Il m’a dit de ne surtout pas bouger de Ouagadougou.

Le même 17 octobre, Diendéré a envoyé des hommes pour assurer ma sécurité. Autour du 24 octobre, des gendarmes sont venus me chercher pour m’envoyer au Conseil. J’ai fait six mois de prison. J’étais avec Moussa Diallo et Pierre Ouédraogo. Un soir, les gendarmes qui nous surveillaient nous ont dit demain, vous allez quitter ici.

Nous nous sommes dit qu’on allait être éliminés. Le lendemain dans la nuit, Jean Pierre Palm est venu pour me lire un bout de papier. Il dit que je suis accusé de participation passive au complot de 20h. Après cela, j’ai été libéré. J’ai échappé trois fois à la mort.

Le président continue : « Pensez-vous qu’il y avait un problème entre Blaise et Thomas Sankara ?»

Le témoin : « Je pense que Blaise avait un problème avec la révolution et avec Thomas Sankara. Le président était très rigoureux et beaucoup n’aimaient pas cela. Un jour, j’étais avec Lingani et son chauffeur est venu lui dire que le mécanicien demande trente-cinq mille pour la réparation. Il a fouillé ses poches mais il n’avait pas les trente cinq mille.

Je suis allé dire à Thomas que les gens ont des soucis. Certains membres du CNR partaient prendre du crédit au grand marché avec les commerçants. Et il faut qu’il mette en place une caisse pour permettre aux gens de prendre les crédits et rembourser après. Il m’a répondu on crée une caisse pour les membres du CNR de Ouagadougou et les militants de Falagountou on a quoi pour eux ?

Le témoin a estimé que Blaise a utilisé les gens qui avaient des frustrations pour monter son complot contre le Président. Aussi, le point faible de Thomas Sankara était Blaise Compaoré. Thomas Sankara était rigoureux avec les autres sauf avec Blaise et il avait trop confiance en Blaise. Le témoin a ajouté que Diendéré est devenu proche de Blaise après la sanction que Thomas Sankara a infligée à sa fiancée à l’époque Fatou Diallo ».

Confrontation entre Jean Pierre Palm et Daouda Traoré

Après les interrogations, il y a eu confrontation entre Jean Pierre Palm et l’accusé. Jean Pierre Palm ne reconnait pas avoir été au Conseil pour libérer le témoin.  « J’entretiens de bonnes relations avec mon jeune frère. Je ne dirais pas qu’il ment mais sa mémoire lui fait défaut. Je n’ai pas mis pied au Conseil. Je ne me souviens pas. Le Conseil n’était pas mon lieu de balade ».

Daouda Traoré répond qu’il jouit de toutes ses facultés mentales.  « Si je dis que Blaise Compaoré avait dit qu’il ne prendrait même pas une brindille contre Sankara, cela veut dire que j’ai une mémoire  fidèle. C’était lui et l’adjudant Kiemda de la base aérienne, et il a dit, vous saviez ce qui vous a emmené ici, si vous recommencez, vous aller y retourner ».

Lors de l’audition, Jean Pierre Palm avait dit, qu’il avait été appelé au conseil de l’entente au lendemain du coup d’Etat avec tous les autres officiers. Le témoin, Lieutenant au moment des faits, dit ne pas avoir été appelé bien qu’étant officier. « C’est ici, que j’apprends cela ».

Gilbert Diendéré quant à lui, a reconnu les faits en donnant des raisons. « Oui, j’ai envoyé des éléments pour sécuriser Daouda Traoré parce qu’il y avait des familles qui se sentaient menacées.

Le président lui demande alors comment se fait t-il que le témoin a été en détention ? Le général répond : quand les gendarmes partaient chercher Daouda Traoré, je n’étais pas au courant. C’est lorsqu’ils sont arrivés au conseil, que j’ai su. A ce moment, je ne pouvais plus rien faire mes supérieurs étaient là.

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