Le Mogho Naaba Baongo a reçu, le mardi 29 juin 2021, une délégation de forgerons du village de Saabin dans le cadre de la célébration de la 6e édition de l’accomplissement d’un rite traditionnel ancestral. Ce rite consiste à fournir du bois mort du nom de « Noèka » pour entretenir le foyer de feu allumé qui ne s’éteint jamais.
Par Tatiana Kaboré
La famille des forgerons du village de Saabin effectue la célébration de la 6e édition du rite du bois mort. Un rite qui se célèbre une fois tous les trois ans chez le Mogho Naaba, empereur des mossé.
Ce mardi 29 juin 2021, ils se sont une fois de plus consacrés à ce rite en marchant de leur village au palais du Mogho Naaba avec des fagots de bois pour maintenir la flamme qui dans leur histoire a anéanti un animal qui s’attaquait aux « sujets du roi ».
C’est donc pour effectuer ce rite qu’une délégation de jeunes composée de femmes, d’hommes de la famille des forgerons se sont rassemblé pour effectuer une marche d’une quinzaine de kilomètres. La direction de cette délégation était le palais royal du Mogho Naaba sis à Ouagadougou.
Ce rite a consisté à apporter des fagots de bois mort à sa majesté le Mogho Naaba afin qu’il les utilise pour des rituels traditionnels. Le Naaba Anbga, chef des forgerons de Saabin a expliqué que le bois mort encore appelé « Noèka » en langue mooré sera utilisé pour entretenir le foyer de feu allumé dans la cour du Mogho Naaba et qui ne s’éteint jamais.
Selon lui, seuls les forgerons de Saabin sont commis à cette obligation traditionnelle. « Il s’agit d’un rite traditionnel que nous avons hérité des ancêtres.
Et nous n’avons pas voulu déroger à la règle. A travers cette célébration, nous voulons aussi inculquer à nos enfants les valeurs traditionnelles, pour la pérennisation de notre identité culturelle », a soutenu Naaba Anbga, chef de Saabin.
Les forgerons de Saabin, portant des fagots de bois mort et d’autres objets que fabriquent les forgerons ont d’abord rendu visite au Baloum Naaba Tanga Il, un des ministres du Mogho Naaba. Celui-ci est chargé à son tour de les conduire chez le roi des mossé, le Mogho Naaba Baongo.
Pour sa part, le Baloum Naaba Tanga II a salué la délégation avant de leur promulguer des bénédictions pour le respect des valeurs traditionnelles. C’est après cette visite chez le Baloum Naaba que la délégation a repris le chemin pour la cour royale.
Arrivé de la délégation chez le Mogho Naaba Baongo
Une fois dans la cour royale, la famille de forgerons s’installe sur la terrasse pour attendre la sortie du Mogho Naaba, comme le souhaite la tradition. Quelques minutes plus tard, celui-ci fait son apparition de manière solennelle, l’eau de bienvenue est servie aux hôtes. Après les salutations d’usage et une la remise d’une certaine somme, la délégation dévoile au chefs des mossé l’objet de sa visite.
Suite à ces échanges, le Mogho Naaba a exprimé sa joie à ses hôtes pour la grande mobilisation. Spécialement le chef des mossé a félicité la jeunesse pour sa forte mobilisation à l’occasion de ce rite.
Sa majesté a poursuivi son allocution en demandant aux jeunes de toujours cultiver en eux les valeurs morales et sociales tels que le pardon, la tolérance, l’amour du prochain et surtout le respect qui sont, selon lui, indispensables pour un bon vivre en communauté. Après les échanges, le Mogho Naaba a offert de la boisson à la délégation pour exprimer sa joie.
Selon Philippe Sawadogo, président du comité d’organisation du rite traditionnel le rite du bois mort a un sens profond qui remonte à une époque très ancienne, celle de Naaba Niandfo.
« Tout est parti d’un phénomène selon lequel un monstre venait à chaque fois dévorer les sujets de sa majesté le Mogho Naaba. Ainsi, « sous » conseils de ses sages, il a demandé les services des forgerons pour l’aider à neutraliser le monstre, qui ont pu le faire avec succès.
La symbolique est que c’est à travers un feu de bois que les forgerons ont réussi à anéantir le monstre. C’est pourquoi il est de coutume que les forgerons apportent du bois mort au Mogho Naaba, pour entretenir le foyer afin d’éviter qu’un phénomène pareil ne se reproduise », a-t-il expliqué.
C’est pourquoi il est de coutume que les forgerons viennent avec du bois mort pour donner à sa Majesté afin qu’il entretienne le foyer qui avait été allumé par les forgerons afin qu’il puisse se protéger au cas où une telle situation se répétait.
M. Sawadogo poursuit en disant que des investigations sont entrain d’être mené auprès des sages pour comprendre davantage pourquoi le rite n’est pas annuel et se fait tous les trois ans.
Il faut noter cependant que les remerciements au terme de ce rituel vont à la 1ère épouse du Mogho Naaba, reine du palais, conformément à la tradition. La reine reçoit sa part de fagot de bois.
Pour rappel, c’est un rite qui avait été interrompu pour des raisons diverses sous le règne du « Mogho Naaba Saaga » et celui du chef des forgerons le « Naaba Koudnoaga » vers 1965. Il a été repris avec le chef actuel des forgerons « Naaba Anbga » en 2006.