L’ancien président ivoirien M. Laurent Gbagbo a appelé, le 29 janvier 2023, la CEDEAO à créer une force antiterroriste qui comprendra « tous les militaires de tous les pays » de l’espace communautaire.
Par Nicolas Bazié
« Pourquoi le colonel Assimi Goïta a pris le pouvoir au Mali et il est soutenu par la population ? Il faut étudier çà ; pourquoi Ibrahim Traoré (au Burkina Faso) a pris le pouvoir et puis il est soutenu par la population ? Il faut étudier cela. » a lancé le 29 janvier 2023, l’ex-président ivoirien M. Laurent Gbagbo.
Pour l’ancien chef de l’Etat ivoirien, « c’est parce qu’ils ont promis de lutter contre les djihadistes et qu’ils luttent contre les djihadistes» qu’ils ont le soutien de leurs peuples. En effet, lorsque les présidents Goïta du Mali et Traoré du Burkina ont pris le pouvoir, respectivement en 2020 et en 2022, ils ont tous deux mis en avant la lutte contre le terrorisme.
Cela a même provoqué plusieurs manifestations spontanées de soutien du côté du Mali et du Burkina Faso.
L’ex-président Gbagbo, qui était en visite à Bayota, chef-lieu de la commune de Gagnoa, dans le centre de la Côte d’Ivoire, a affirmé que le président de la Transition au Burkina Faso, le capitaine Ibrahim Traoré « n’est même plus à son bureau, il est sur le terrain.»
L’ex-président ivoirien trouve que les élections ne peuvent pas régler le problème du terrorisme dans ces pays et la CEDEAO, selon lui, devrait comprendre cela.
Voici ses propos : « Au lieu que la CEDEAO prenne des communiqués pour leur (Ibrahim Traoré et Assimi Goïta) donner des ordres méchants et les obliger à faire des élections comme si les élections pouvaient régler le problème du djihadisme, non, je propose à la CEDEAO de créer une brigade anti-djihadiste. »
Cela peut contribuer à résoudre deux soucis, fait-il savoir, : « En créant la brigade anti-djihadiste, on résout deux problèmes, premièrement, on lutte contre le djihadisme, (notamment contre le banditisme terroriste) et, deuxièmement, on évite d’appeler au secours des troupes européennes. »
La brigade, poursuit-il, doit comprendre « tous les militaires de tous les pays de la CEDEAO et ceux-ci doivent se mettre en mouvement et en patrouille pour lutter contre le djihadisme. »
Pour l’ancien président Laurent Gbagbo « si on ne fait pas cela, c’est qu’on n’a rien fait. »
La CEDEAO, visiblement, ne supporte plus les coups d’Etat et elle entend y remédier avec une stratégie. Celle-ci repose sur la création d’une une force militaire qui « pourrait contribuer à mettre fin aux crises politiques et institutionnelles qui secouent la région depuis quelques années».
En juillet 2022, M. Umaro Sissoco Embalo, Président de la Guinée-Bissau et Président en exercice de l’organisation ouest-africaine avait déclaré qu’il fallait créer cette force.
Il avait notamment dit : « On ne peut pas penser que pour arriver au sommet de l’Etat, c’est un « fast-track » […] Il y a des procédures pour devenir chef d’Etat. Il faut que nous soyons tous républicains. C’est le peuple qui a le droit de sanctionner les dirigeants, même si les peuples sont parfois aussi complices. ».
Six mois après cette déclaration, soit le 4 décembre 2022, les chefs d’Etat de la CEDEAO s’étaient engagés, à Abuja, au Nigéria, à créer cette force régionale pour faire face au terrorisme et aux coups d’État afin de ramener la sécurité et la stabilité dans la région.
Cependant, le 19 décembre 2022, en Guinée Bissau, les chefs d’états-majors de la CEDAO avaient tenu une réunion extraordinaire qui avait débouché sur des constats qui projettent un avenir sombre pour l’opérationnalisation de la force anti-putsch et anti-terroriste en Afrique de l’Ouest. Ce comité estimait la mise en œuvre de cette force « complexe » et « difficile.»
Depuis 2020, la sous-région a connu deux coups d’Etat au Mali, deux autres au Burkina et un en Guinée. Des tentatives de coups d’Etat ont été signalées en Guinée-Bissau et en Gambie le 20 décembre 2022.
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