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Burkina Faso : Comment augmenter le taux d’absorption du fonds minier pour les communes

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Le Fonds minier de développement local est faiblement absorbé par ses bénéficiaires que sont les communes et les régions du Burkina. De 2019 à 2021, ce fonds a enregistré un taux d’absorption de 17,20% sur plus de 96 milliards FCFA mis à la disposition des collectivités territoriales.

Par Daouda Kiekieta

Huit ans après sa création, le Fonds minier de développement local (FMDL) peine à atteindre son objectif de maximiser la contribution du secteur minier à la croissance économique et au développement durable des collectivités au Burkina Faso.

Pourtant, des fonds ont été mis à la disposition des collectivités locales pour cela. Sur un montant de 96 398 054 323 FCFA mis à la disposition des communes et des régions de 2019 à 2021, seulement 16 584 426 330 FCFA ont été consommés, soit un taux d’absorption de 17, 20%, selon le ministre des Mines Simon Pierre Boussim.

Cette problématique de faible absorption du FMDL est due à plusieurs facteurs, dont l’application du décret d’utilisation du fonds minier.

Ce décret dispose que les ressources du fonds doivent être utilisées dans les secteurs sociaux. Ce fonds devrait également contribuer à la mise en place d’infrastructures structurantes, analyse Hermann Doanio, spécialiste en finance publique.

Le secrétaire exécutif du Centre d’études et de recherche appliquée en finances publiques (CERA-FP), M. Doanio révèle que « des collectivités n’arrivent pas à savoir ce qu’est une infrastructure structurante ».

Burkina fonds minier
Hermann Doanio, économiste, spécialiste en finance publique et directeur exécutif du CERA-FP

Selon l’économiste Doanio, l’autre entrave du FMDL est le fait que celui-ci ne prend pas en compte le capital humain notamment le recrutement et la formation des ressources humaines au sein des collectivités.

Alors que la part du FMDL dans les budgets des collectivités oscille entre 10 % à 80 %. Ainsi, les communes et les régions qui abritent une ou plusieurs sites miniers se retrouvent avec une part budgétaire qui peut atteindre 80 %.

Quant à celles qui n’abritent pas de site minier, elles se retrouvent avec une part qui varie entre 10% à 20% indique Hermann Doanio.

Si le champ d’application du fonds minier constitue un obstacle, les procédures de décaissement et le manque de ressources humaines qualifiées posent également problème.

C’est ce que pense Dissan Boureima Gnoumou, ancien député-maire de Houndé, une commune située à environ 250 km de la capitale, qui abrite deux mines d’or industrielles. Cette commune a bénéficié de plus de 4 milliards FCFA du FMDL en trois ans, selon son ancien maire Dissan Boureima Gnoumou que nous avons rencontré à Ouagadougou.

Burkina fonds minier
Dissan Boureima Gnoumou, ancien député-maire de la commune de Houndé.

Dans la pratique, les conseils municipaux élaborent les projets devant être financés par le fonds minier. Le comité communal de suivi du fonds minier valide ces projets au cours d’une session dirigée par le haut-commissaire de la province, président du comité.

Les projets validés sont intégrés dans le budget de la commune et transmis à la commission technique régionale (CTR), explique Boureima Gnoumou. « Les procédures de la commande publique dont découle FMDL sont trop longues de façon générale. Il y a des blocages. Nous avons eu des difficultés par moment pour trouver même un contrôleur financier » déplore-t-il.

Le Fonds minier de développement local (FMDL) a été institué en 2015 sous la Transition. Son objectif est de  permettre aux communautés locales  des 13 régions et 351 communes que compte le Burkina Faso, de bénéficier directement des retombées de l’exploitation minière.

Selon l’article 26 de l’actuel code minier, le FMDL est alimenté par l’État à 20% des redevances collectées et à 1% des chiffres d’affaires annuels des propriétaires de licences d’exploitation minière industrielle au Burkina.

Jusque-là, il n’y a pas un document de référence qui puisse guider les responsables des communes dans l’élaboration de leurs projets pour bénéficier du ce fonds.

Cela est une grosse insuffisance que Anselme Somda, ancien président de la commission de relecture du code minier au Conseil national de Transition en 2015, par ailleurs, chargé de programme du Centre pour la Gouvernance Démocratique (CGD) déplore.

Burkina fonds minier
Anselme Somda, ancien président de la commission de relecture du code minier au Conseil national de Transition en 2015

« Jusqu’à ce que le coup d’État du janvier 2022 intervienne, il y avait des maires de communes qui n’avaient toujours pas cerner l’esprit du fonds minier, car jugeant les procédures trop complexes », indique Anselme Somda.

Une révision du décret d’utilisation du fonds ?

Les textes qui encadrent l’utilisation du fonds minier sont jugés trop restrictifs et souvent ambiguës. C’est le cas par exemple du terme « projets structurants » qui portent à interprétation diverse, parfois difficile à cerner par certaines collectivités.

Hermann Doanio, spécialiste en finance publique, propose que ces textes soient révisés afin de prendre en compte un certain nombre de paramètres notamment la formation du personnel des collectivités et les populations locales sur des métiers d’autonomisation.

En lieu et place d’une relecture, le chargé de programme du Centre pour la Gouvernance Démocratique (CGD), Anselme Somda, lui suggère la mise en place d’un document de référence qui pourra guider les communes dans l’élaboration de leurs projets et programmes. Ce document devrait permettre de combler les limites des collectivités en matière d’élaboration de projets structurants pour bénéficier du fonds minier au Burkina Faso. 

Burkina fonds minier
Image illustrative d’un site minier au Burkina

En plus de cela, Anselme Somda recommande à l’Etat central de mettre à la disposition des collectivités, notamment celles qui reçoivent plus de fonds, des spécialistes en montage de projets et programmes d’investissement communautaire.

« Cela est une recommandation forte pour moi parce que sans ressources humaines, même les canevas les plus basiques seront difficiles à utiliser par les communes », ajoute Anselme Somda.

Les ressources allouées au fonds sont encadrées et  suivies par des mécanismes comme le Comité national de suivi de la collecte, de la répartition et de l’utilisation du Fonds minier de développement local (CNS/FMDL).

Pour Boureima Gnoumou, il y a nécessité d’alléger les procédures de commande publique en général et celles du fonds minier en particulier. « Il a doté toutes les communes urbaines des contrôleurs financiers, internes, parce qu’il y a beaucoup de blocages » suggère Boureima.

Par ailleurs, l’ancien député-maire propose qu’une partie du fonds minier au Burkina Fasosoit affectée au fonctionnement des communes, notamment pour l’entretien des infrastructures éducatives, sanitaires, le recrutement et la formation du personnel.

« Cela pose un problème parce qu’on ne fait que construire lorsqu’on ne peut pas entretenir. Pour moi, l’investissement dans les ressources humaines est un investissement structurant » plaide l’ancien maire de Houndé.

Cet avis n’est pas partagé par Hermann Doanio qui estime que cela vise à éviter que les présidents des collectivités et le personnel ne s’arrogent des rémunérations importantes au détriment du développement local pour lequel le fonds a été créé.

« La solution pour l’absorption du fonds n’est pas d’autoriser les communes à faire des dépenses de fonctionnement »  se convainc  pour sa part, Anselme Somda.

Lors d’une séance plénière à l’Assemblée législative de Transition le 25 juillet 2023, le ministre de l’Energie, des Mines et des Carrières Simon Pierre Boussim a été clair : « Là où nous sommes restés rigoureux, c’est que nous ne voulons pas que le Fonds minier puisse servir de  fonctionnement aux collectivités, parce que les collectivités bénéficient déjà d’un transfert de fonds pour leur fonctionnement », avait-il rappelé. 

Lire aussi : Burkina : L’Assemblée législative de Transition adopte la loi portant modification du code minier

www.libreinfo.net 

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