Sous l’effet des changements climatiques et de la rapide croissance de la population, le Burkina Faso perd chaque année, des grandes surfaces de terres arables. Engagé dans le défi de l’atteinte de la sécurité alimentaire à travers un plaidoyer collaboratif, le programme Voix pour le Changement (V4CP) s’intéresse aux innovations pouvant permettre aux exploitants familiaux d’accroître leurs rendements dans un contexte de changement climatique.Les OSC qui mènent ce plaidoyer avec le concours de la SNV, l’Organisation Néerlandaise de Développement, ont de ce fait initié une visite terrain dans la région du Nord (Arbollé, Ouahigouya et Filly), les 04 et 05 novembre 2019 au profit des chefs de Service Régionaux d’Aménagement hydrauliques et de production Agricoles des 13 régions du Burkina.
Cette visite terrain a débuté dans le village de Toéyédé (commune de Arbollé) dans le Passoré, région du Nord. Le champ de Moumouni Salou présente une fière allure. Comme l’illustre un champ témoin sis tout à côté, il aurait été pratiquement impossible de récolter sur le terrain mais grâce à la récupération par la technique du zai rectangulaire, le producteur de sorgho peut désormais s’attendre à récolter environ deux (02) tonnes de sorgho sur une terre dégradée (zipélé en mooré).
Le zai rectangulaire consiste au creusage d’un trou de 45 centimètres de long ainsi que d’une largeur et d’une profondeur de 20 centimètres chacune. Ensuite, il faut y ajouter environ 500 grammes de fumure organique ainsi qu’une capsule d’engrais avant l’ensemencement de six plants requis par l’expérience. Expérimenté dans trois communes, le zai rectangulaire donne des « résultats satisfaisants en termes de rendements agricoles » selon Félicité Somé, Directrice de la Coopérative de Prestations de Services Agricoles Coobsa (COPSAC).
C’est pourquoi le programme Voix pour le changement (V4CP) estime que d’autres producteurs gagneraient à adopter la technique, d’autant que le processus de la dégradation et la raréfaction des terres s’observe sur toute l’étendue du territoire. « Notre programme de plaidoyer est basé sur des preuves » explique Félicité Somé. La technique dite de zai rectangulaire est une forme améliorée du zai traditionnel pour récupérer plus efficacement les terres dégradées. Elle a été découverte en 2016 par des agriculteurs soutenus par la SNV.
Ces résultats doivent leur explication au fait que le zai rectangulaire retient plus d’eau. Les paysans qui étaient sceptiques au début quant à une telle pratique apprécient le bénéfice qu’ils ont acquis grâce au Zai rectangulaire. « Grâce à cette technique, nous avons des surfaces supplémentaires pour cultiver. Ce qui nous permet d’accroître notre production » Moumouni Salou, exploitant. Il dit d’ailleurs envisager de continuer sur cette lancée. Des agents des services régionaux des aménagements hydrauliques et des productions agricoles (SRAHPA) des treize (13) régions, visiteurs du jour ont été impressionnés par ce qu’ils voyaient : Le zaï rectangulaire donne plus de résultats que le zaï traditionnel et tout ceci, démontré en salle lors des échanges.
La deuxième étape de la visite a permis à la délégation d’effectuer une sortie dans la ferme de l’Association Wémanégré dans le village de Filly, à quelques encablures de Ouahigouya. Là-bas, elle a pu s’imprégner de la technique du bocage sahélien. Une technique de récupération et valorisation de terres dégradées qui consiste à garder l’eau en saison sèche, et à limiter les dégâts causés par l’érosion hydrique lors de la saison pluvieuse. Grâce à la confection de diguettes en terre autour des champs, renforcés par des haies-vives, aucune goutte d’eau de pluie n’est perdue. Cela permet aux cultures de bénéficier d’un maximum d’eau ; ce qui n’est pas absorbé par les plantes s’infiltre dans le sous-sol et facilite la régénération du sol et du couvert végétal. Le bocage sahélien est ainsi une technique mixte alliant plusieurs pratiques d’agricultures climato-intelligentes (zaï, jachères, rotations culturales, agroforesterie, bassins de collecte des eaux de ruissellement, etc.) que les visiteurs ont pu découvrir.
« Il faut maintenant promouvoir ces pratiques, et c’est tout l’intérêt de cette visite terrain au profit des 13 SRAHPA afin, qu’ils les vulgarisent au bénéfice des exploitants familiaux » dira Didier Coulidiaty, le représentant de la SNV. Visiblement conquis, les agents ont promis de se faire les porte-voix de ces pratiques qui montrent des résultats palpables.
Outre la promotion de la pratique de l’agriculture climato-intelligente, le programme dans sa thématique sécurité alimentaire et nutrition mène le plaidoyer pour un accroissement du soutien public en semences améliorées, équipements, et conseil agricole. L’accès des exploitants au crédit à coût réduit et l’amélioration de la coordination multisectorielle de la nutrition constituent d’autres axes sur lesquelles les OSC sont engagées.
En somme, le programme Voix pour le Changement(V4CP) dans sa thématique sécurité alimentaire est un regroupement de plusieurs organisations de la société civile (OSC) engagées dans le plaidoyer pour la transformation et modernisation des exploitations familiales pour une sécurité alimentaire et nutritionnelle durable. Il s’agit de la Coopérative de Prestation de Services Agricoles Coobsa (COPSA-C), l’Union Nationale des Producteurs de Riz du Burkina (UNPRB), la Fédération des Professionnels Agricoles du Burkina (FEPAB), la Fédération Nationale des Groupements Naam (FNGN) et 07 autres organisations alliées.
Soumana Loura,Stagiaire de retour de Toyédé et Filly (région du Nord)