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[Entretien] « depuis 2015, tous les jours, je travaille environ 16h » dit Alexandre Tarpaga, Burkinabè vivant aux Etats-Unis

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M. Alexandre Tarpaga est un Burkinabè marié depuis 14 ans, père de trois enfants qui réside à New-York, aux Etats-Unis depuis 8 ans maintenant. Il est revenu au pays pour affaires, à la faveur de la 16ème édition du Salon International de l’Artisanat de Ouagadougou (SIAO) tenu du 27 janvier au 5 février 2023. M. Tarpaga a échangé avec les reporters de Libreinfo.net sur son parcours scolaire et professionnel au Burkina ainsi que son aventure américaine. Suivez son entretien dans lequel il parle de son travail et de ses conseils aux jeunes qui veulent tenter l’aventure de l’émigration.

Propos recueillis par Elza Nongana et Mahomed Nitiema (Stagiaire)

Libreinfo.net : Quelles sont les activités que vous exerciez au Burkina avant de vous rendre aux Etats-Unis ?

M. Alexandre Tarpaga : J’ai effectué ma formation en électricité générale au Centre de formation polytechnique de Fada. J’ai travaillé en tant qu’électricien à la SONABEL (Société nationale burkinabè d’électricité) comme contractuel.

A la SONABEL je faisais les branchements de compteurs et la maintenance des lignes hautes tensions. Après deux ans de service, je connaissais beaucoup de choses sur l’électricité générale.

J’ai démissionné par la suite pour aller dans une société privée qui réalisait de grands réseaux de transport d’électricité.

Là-bas au bout de quelques séances de travail avec mon chef de chantier, il avait constaté que j’avais un niveau plus élevé que le sien.

Et trois mois après, il m’avait trouvé un chantier. Ce premier chantier était la construction du siège de l’UEMOA (Union économique et monétaire ouest africaine) à Ouaga 2000.

Le deuxième était la réhabilitation du siège de l’UEMOA au centre-ville et j’y ai même été chef d’équipe de même que sur le chantier du siège de la Banque Of Africa.

Libreinfo.net : Quelles sont les activités que vous exercez à New-York ?

M. Tarpaga : Lorsque je suis arrivé en 2015, je me suis lancé dans la restauration ; je travaillais dans une chaine de restauration dénommé « Del Fuiscos », situé au cœur même de Manathan.

J’y ai travaillé pendant près de six ans. Ce restaurant employait plus de 200 agents. Et depuis 2016, chaque année j’avais été désigné comme le meilleur cuisinier ; mais j’ai arrêté d’y travailler après la pandémie de Covid-19.

Je suis actuellement dans un autre restaurant où de travaille depuis 2021. Lorsque je suis arrivé aux Etats Unis je voulais continuer dans le domaine de l’électricité mais j’avais des contraintes de diplôme et de langue. Donc, il me fallait d’abord apprendre l’anglais et aussi obtenir des papiers nécessaires.

Tout cela m’avait poussé à travailler d’abord dans la restauration. Et petit à petit, avec l’épidémie de la Covid-19, j’ai trouvé que c’était une occasion pour moi de repartir à l’école parce qu’en ce moment j’avais du temps libre et je disposais de papiers en tant que résident.

Et après un an de cursus, j’avais pu décrocher un diplôme de technicien en électricité audiovisuelle. L’université où j’ai fréquenté m’avait trouvé un emploi qui me permettait de continuer à travailler parallèlement dans un restaurant.

Pour moi qui suis un aventurier aux Etats-Unis, je ne pouvais pas vivre comme si j’étais chez moi (dans mon pays). Je suis parti aux Etats Unis pour un but et il fallait que je l’atteigne.

Vous n’allez peut-être pas me croire mais depuis 2015, je n’ai jamais fait un seul boulot ; tous les jours, je travaille durant environ 16h.

Libreinfo.net : Pourquoi avez-vous tout abandonné pour les Etats-Unis alors que vous aviez un emploi stable au Burkina Faso ?

M. Tarpaga : Je suis d’un naturel curieux, j’aime découvrir ; j’ai voulu avoir un CV (Curriculum Vitae) bien chargé mais je n’ai jamais rêvé d’aller aux Etats-Unis.

L’initiative est venue de mon petit-frère qui m’a fait la proposition. Lui, il avait vécu pendant dix ans aux Etats-Unis et c’est en 2017 qu’il est revenu s’installer au Burkina Faso.

C’est donc avec ses conseils que j’ai entrepris les démarches auprès de l’ambassade des Etats-Unis pour l’obtention de mes papiers.

A cet effet, je n’ai pas rencontré de difficultés et je peux dire que c’est Dieu qui a tracé mon chemin. Arrivé aux USA on m’a accordé la résidence pour onze mois. J’ai même obtenu la « green card » (carte verte) au bout de trois mois. Actuellement, j’ai un bon statut aux Etats-Unis.

Libreinfo.net : Avez-vous pu faire des réalisations au Burkina Faso ?

M. Tarpaga : Oui. J’ai pu construire une maison et une ferme dans laquelle je fais de l’élevage. J’ai pu aussi acheter des terrains, soutenir la famille et contribuer au financement des études d’enfants de la famille. Je suis fier de ce que j’ai pu réaliser et je peux dire que c’est beaucoup.

Libreinfo.net : Parmi les réalisations que vous avez citées, la construction d’un restaurant n’y figure pas alors que vous êtes un passionné de la cuisine. Pourquoi ?

M. Tarpaga : Oui, effectivement, j’y ai pensé et j’avais même commencé les travaux. Cependant, mon petit-frère sur lequel je comptais pour assurer la gestion m’a fait savoir qu’il ne pourrait pas gérer ses activités et les miennes. J’ai donc abandonné cette idée de restauration.

Libreinfo.net : Quel regard avez-vous sur la situation sécuritaire du pays ?

M. Tarpaga : Moi, j’ai foi au gouvernement actuel et cela ne veut pas dire que je n’avais pas foi au gouvernement précédent.

Ce que j’ai pu remarquer chez les Burkinabè, c’est l’incompréhension qui représente un véritable souci de cohésion. Et pour la sécurité, si nous arrivions à nous comprendre, je pense qu’on aurait réglé une partie du problème.

Nous devons également soutenir le gouvernement à tous les niveaux même si ce n’est pas forcément avec de l’argent. Moi, j’ai foi que nous allons gagner cette guerre et c’est une obligation pour nous de la gagner.

L’insécurité est un peu partout ; et même aux Etats Unis, malgré la présence de la police à chaque angle de rue, nous ne pouvons pas faire un mois sans qu’il n’y ait un meurtre.

Je pense que l’instauration de la Police mobile et le recrutement des VDP (Volontaires pour la défense de la patrie) sont de bonnes actions.

Je pense aussi qu’il serait judicieux de songer à intégrer la diaspora dans la formation du gouvernement afin de lui permettre d’apporter son savoir et son expérience.

Libreinfo.net : Comment appréciez-vous la culture burkinabè avec les évènements comme le FESPACO et le SIAO ?

M. Tarpaga : Je participe toujours au SIAO pour proposer et partager mes connaissances culinaires aux participants. J’ai apporté mon expérience des Etats-Unis dans la gestion de mon stand à ce SIAO et j’ai fait un bon chiffre d’affaires. Pour moi, cette édition du SIAO a été une réussite.

Le SIAO a été la surprise de l’année, car programmé et reporté à plusieurs reprises, il s’est finalement tenu en janvier 2023.

Personne ne s’attendait encore à la tenue de ce dernier SIAO. Je n’aime pas le FESPACO, pour la simple raison qu’il se déroule sur plusieurs sites et la rue marchande aussi.

Libreinfo.net : Comptez-vous un jour revenir vous installer au Burkina ?

M. Tarpaga : Oui, même si ça ne sera pas de façon définitive car j’ai deux pays actuellement. Je passe plus de temps aux Etats-Unis que dans mon pays de naissance. Cela pourrait être l’inverse aussi.

Libreinfo.net : Souhaitez-vous revenir sur un aspect particulier de cet entretien ?

M. Tarpaga : L’aventure n’est pas simple et les gens vous envient sans se poser de questions. Il y a aussi des gens qui ont réussi ici au Burkina, et il faut les envier également. Je connais beaucoup de personnes qui ont échoué aux Etats-Unis et d’autres qui y ont perdu la vie.

Je demande aux jeunes de travailler dur et de croire en eux surtout. Par exemple, sur un chantier, aux Etats-Unis où je travaillais, j’avais un Espagnol comme superviseur. Après trois jours de travail, il a eu à dire au contremaître qu’il n’avait rien à m’apprendre et qu’au contraire il apprenait avec moi.

Et même, pour revenir au pays, c’était compliqué parce que mon patron trouve que je travaille bien et ne voulait donc pas me laisser partir. Ce que j’ai eu à faire aux Etats-Unis, c’était au nom de tous les Burkinabè et non en mon nom propre.

Partout où je vais, je reste Burkinabè. Voilà que je suis au pays depuis cinquante jours et mon patron m’appelle pour savoir quand je vais revenir aux Etats-Unis.

Je demande aux aventuriers de bien travailler pour laisser une bonne image là où ils vont. La preuve est que je trouve du boulot et/ou des contacts à mes compatriotes burkinabè d’ici et d’ailleurs dans la restauration.

Lire aussi: SIAO 2023 : plusieurs prix répartis dans 12 catégories décernés à des artisans méritants

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