Les résidents de la cité SOCOGIB de Ouagadougou, située au quartier Wayalghin, mènent depuis quelques années des initiatives pour améliorer leur cadre de vie. De l’éclairage public au pavage des rues en passant par la construction d’infrastructures publiques, ils donnent un exemple du concept de développement communautaire prôné de plus en plus par les autorités politiques du pays. Le samedi 18 novembre 2023, l’Amicale a officiellement lancé les travaux de pavage des rues internes de la cité d’une superficie d’environ 3000 m2.
Par Daouda Kiekieta
Il est 8h 30 mn lorsque nous entrons dans la cité SOCOGIB de Wayalghin au secteur 21 de l’arrondissement 5 de Ouagadougou, la capitale burkinabè.
A cette sortie sud de la cité, nous croisons un bulldozer en train de niveler les artères dans la zone en vue de leur pavage. Ceci est l’œuvre des résidents à travers l’Amicale des femmes de la cité SOCOGIB de Wayalghin (AFC-W). Cette activité entre en droite ligne de l’Initiative présidentielle pour le développement communautaire.
Le lancement de ces travaux le 18 novembre 2023 est considéré d’ailleurs comme le point de départ officiel de cette Initiative présidentielle adoptée en Conseil des ministres en août 2023.
« L’idée est née lors d’une réunion de l’amicale. On s’est interrogé sur ce qui peut être fait, en plus des autres réalisations existantes, notamment en matière d’éclairage public » nous a expliqué Ténin Héma, Présidente de l’Amicale que nous avons rencontrée le mardi 21 novembre 2023.
Entourée des autres membres de son bureau, Mme Héma a indiqué que dans le plan de réalisation de la cité, les voies internes devaient être goudronnées.
N’ayant pas obtenu cela, les résidents ont décidé de prendre leurs responsabilités en réalisant eux-mêmes des rues pavées. « Nous avons décidé d’aller étape par étape, en fonction de nos moyens » nous a dit Mme Héma, la présidente de l’amicale.
14 millions F.CFA mobilisés à travers des cotisations
Pour mener à bien son projet de pavage, l’Amicale est passée par la sensibilisation pour obtenir l’adhésion des résidents.
Si certains ont été réticents au début, la persévérance des femmes de l’Amicale a finalement permis de convaincre la majorité, nous a affirmé Ousmane Nebié, Professeur titulaire de géographie rurale à l’Université Joseph Ki-Zerbo et résident de la cité.
Ainsi 14 millions F.CFA ont été collectés, à raison de 100 000 F.CFA par ménage, a expliqué la présidente Ténin Héma. Le coût total du projet s’élève à 446 000 000 de F.CFA.
« Les ménages ont vraiment adhéré au projet. Certains ont été rassurés par ce qu’on a déjà réalisé dans le passé. » a-t-elle dit.
« Il y a eu, au départ, des débats, des rencontres et un travail de plaidoyer auprès des services et auprès des autorités municipales pour d’abord nous rendre visibles et ensuite évoquer s’il y a une possibilité de nous donner un coup de main pour nous encourager » a expliqué Pr Nébié, par ailleurs conseiller de l’Amicale.
En plus de l’argent collecté, des résidents ayant des compétences notamment en matière de fabrication et de pose de pavés, ont été mobilisés.
Ainsi, les pavés sont fabriqués par les résidents et seront également posés par eux. Ces derniers ont été formés par des résidents spécialistes du domaine.
Ce n’est pas la première fois que l’Amicale des femmes conduit ce genre de réalisations. Depuis 2003, date de sa création, l’Amicale qui regroupe aussi bien des femmes que des hommes, fait de l’amélioration du cadre de vie des résidents son cheval de bataille.
Ainsi, plusieurs autres projets ont été déjà réalisés par la même amicale depuis 2012. Il s’agit de l’aménagement d’un espace vert et de l’implantation de l’éclairage public d’un coût de plus de 25 millions F.CFA, financé à plus de 10% par l’Amicale.
Des initiatives qui profitent aussi aux non résidents de la cité
Dans cet espace vert clôturé, toute personne désirant prendre de l’air est la bienvenue nous ont assuré Mme Héma et ses membres du bureau de l’Amicale.
Dans un hangar aménagé, des étudiants non résidents de la cité viennent régulièrement étudier, apprendre ou réviser leurs cours. C’est le cas de Mlle Marthe Bonego, étudiante en 7e année de médecine que nous avons abordée.
« Cela fait trois ans que je fréquente ce lieu. Même la nuit, on peut bosser parce que l’endroit est éclairé. C’est une belle initiative. Si tous les quartiers pouvaient faire pareil, on allait avoir une ville plus propre » témoigne l’étudiante Marthe Bonego.
« L’endroit est très propre et calme. Il y a également de l’ombre en abondance. Permettre aux gens de venir bosser gratuitement, c’est cela même qui est intéressant » indique de son côté, Jean Kampogba, étudiant en Master et résident du quartier Wayalghin.
Selon le retraité Pr Ousmane Nebié, résident de la cité, cette initiative endogène entre en droite ligne avec sa vision en tant qu’enseignant-chercheur.
Il souligne que le développement communautaire est une approche essentielle dans la mesure où les populations doivent aussi se donner les moyens de réaliser des actions qui répondent à leurs préoccupations.
« Ce que j’ai enseigné pendant des dizaines d’années, je le retrouve dans cette initiative. C’est aussi une reconnaissance de ces braves dames qui ont porté au plus haut sommet cette cité (…) ; vous savez que la vie communautaire n’est pas toujours facile ; il y aura toujours des réticences. Mais à force d’être patient, d’expliquer de porte en porte, ces femmes ont réussi le tour de force que d’autres associations n’auraient pas réussi » soutient Pr Nébié, considéré comme « l’ange gardien de l’Amicale » selon les femmes de l’association.
A l’endroit des autres Burkinabè, Pr Nébié les invite à emboîter le pas de l’Amicale des femmes de la cité SOCOGIB de Wayalghin. « Nous exhortons les Burkinabè à s’organiser et à se mobiliser pour une prise de conscience. Le développement de notre cadre de vie commence par nous. Le gouvernement ne peut pas tout faire. Chacun peut apporter sa pierre à la construction du pays » affirme avec conviction Ténin Hema, présidente de l’Amicale.
Ces actions des résidents de la cité sont considérées par les plus hautes autorités comme l’exemple concret de ce que prône l’Initiative présidentielle pour le développement communautaire adopté en Conseil des ministres.
Cette initiative, qui tient à cœur au chef de l’Etat, le capitaine Ibrahim Traoré, est fondée sur les principes de la participation volontaire, de l’appropriation, de la responsabilisation, de la transparence et de la redevabilité.
Concrètement, les activités de l’Initiative consistent en la construction ou la réhabilitation d’infrastructures, en l’amélioration du cadre de vie, à la préservation de l’environnement et au renforcement des capacités des communautés à la base.
L’Initiative sera conduite par la Présidence du Faso à travers le Bureau national des grands projets.