Depuis le passage au Musée national du Président du Faso, le Capitaine Ibrahim Traoré, le 15 mai 2024, à l’occasion de la Journée des traditions, ce lieu est devenu une curiosité. Des Burkinabè, de plus en plus nombreux, y vont pour découvrir leur histoire et leur vraie identité à travers les 14 000 objets exposés.
Dans le quartier Dassasgho, coté Est de la ville de Ouagadougou, à la fin du Boulevard Thomas Sankara, non loin de l’hôpital pédiatrique Charles De Gaulle, se trouve le Musée national du Burkina. Il est bâti sur une superficie de plus de 29 hectares.
À l’entée, un vestibule en forme de calebasse accueille les visiteurs. Cela n’est pas fortuit. En Afrique en général et au Burkina en particulier, la calebasse est un symbole d’accueil dans certaines communautés.
« Elle sert à servir de l’eau à toute personne qui visite une famille», explique Oumar Ouattara, adjoint en gestion du patrimoine culturel du Musée national.
Juste après et sur une vaste étendue, trois sites s’observent. Il s’agit, d’une part, des «Habitats du Faso» avec une architecture pittoresque qui renseigne sur la façon de construire des ancêtres.
Et d’autre part, de deux salles d’expositions avec des objets qui évoquent des thématiques différentes, toutes en lien avec l’histoire du Burkina.
Selon le guide Ouattara, chaque objet exposé revêt une signification en fonction de sa région d’origine et symbolise le pouvoir selon les coutumes.
Ainsi, il explique par exemple que le masque « Porte » du groupe culturel san alerte en cas d’intrusion dans le village. Mais au Musée national du Burkina, la modernité s’est mise au service du passé pour écrire l’histoire.
C’est en tout cas l’illustration de l’exposition de deux artistes, les Frères Ouattara, Assane et Ousséni, qui se sont inspirés des masques traditionnels pour leur donner un souffle nouveau avec les matériaux du moment, comme pour maintenir le dialogue avec les ancêtres.
A la découverte des sites
Firdaous Kéré et son petit frère arrivent au Musée national avec pour objectif de découvrir les reliques du passé en se ressourçant.
Aussitôt la guide stagiaire d’origine tchadienne, Laré Djetenbé Chancela, se met à leur disposition. Le premier site visité est l’espace en plein air dénommé « Habitats du Faso ».Il ressemble à un village qui regroupe les différents types de maisons qui existaient au Burkina.
Sans relâche, Chancela explique à ses visiteurs chaque type d’habitat. Des habitats gourounsi en passant par ceux mossé, bissa, gourmantché, peulh, lobi, tout est passé au peigne fin.
Firdaous Kéré, commerçante , se dit satisfaite de découvrir toute l’histoire de ces constructions. « J’ai décidé de découvrir l’intérieur du Musée national afin de connaitre l’histoire de mon pays », affirme-t-elle.
Et cette visite du site lui a permise de voir « une représentation en miniature des ethnies mais ce qui m’a le plus impressionnée, c’est la représentation de l’habitat bissa. C’est joli. On a vraiment de l’esthétique.»
Elle ajoute : « Pour ceux qui n’ont pas encore mis le pied ici, je leur dirai d’y faire un tour, car c’est une destination à ne pas manquer surtout qu’aujourd’hui on parle de retour à nos valeurs. Pour faire ce retour, il faut connaitre sa propre culture et c’est ce que propose le Musée national.»
Nourdine Ouédraogo, visiteur, dit être féru de l’histoire de l’Egypte et de la Grèce antiques et il lui fallait venir en ce lieu pour « savoir l’histoire de mon pays ».
« Au niveau des habitats, j’ai beaucoup apprécié l’architecture et la décoration de certaines ethnies comme les Gourounsi. Il y a celle des Lobi et Bwaba aussi », affirme Nourdine Ouédraogo.
En outre, notre interlocuteur parlant des masques, met l’accent sur le message qu’ils véhiculent. Il cite le guide qui lui a expliqué que le caméléon s’adapte à son environnement et que le masque buffle symbolise la puissance.
Il tire la conclusion selon laquelle «quand on est un jeune, il faut s’adapter aux situations comme le caméléon s’adapte à l’environnement et quand on est garçon, il faut être puissant et dominer comme le Capitaine Ibrahim Traoré.»
Abdoulaye Nabalma est un Burkinabè vivant en Guinée Équatoriale. En séjour au Burkina, nous l’avons rencontré au Musée. Il dit avoir découvert des choses qu’on n’apprend même pas à l’école.
« Les habitats m’ont beaucoup marqué surtout la technicité architecturale utilisée dans la construction. Une technique que nos grands-parents avaient avant même la colonisation», déclare-t-il.
De plus en plus, des visiteurs nationaux
Pour le directeur général du Musée national, Sabari Christian Dao, depuis que le Président du Faso, le Capitaine Ibrahim Traoré, a visité le Musée le 15 mai 2024, Journée des traditions, tout a changé. « Les Burkinabè s’intéressent de plus en plus au Musée national », affirme-t-il.
Les statistiques le prouvent à suffisance, à en croire le directeur général Sabari Christian Dao qui indique qu’en moyenne, sur les 27 000 visiteurs de janvier à août 2024, il y a eu moins de 1 000 visiteurs internationaux et tous les autres sont des nationaux.
Le 15 mai 2024, lors de sa visite au Musée national, le chef de l’Etat expliquait que sa venue au Musée revêt un double symbole pour notre peuple en quête de sa véritable identité, de paix et d’une souveraineté.
Une opportunité saisie par le Capitaine Traoré pour réaffirmer que les valeurs de solidarité et de cohésion sociale se trouvent dans notre culture. « Il faut donc mettre les moyens ici pour vous permettre d’encadrer les plus jeunes pour qu’ils puissent comprendre les fondements mêmes de notre culture », avait-il déclaré.
Il avait aussi ajouté que « nous sommes en temps de guerre (…) Rien que la construction des habitats, certaines communautés ont pensé à ça. Si aujourd’hui nous l’appliquions face à ces hordes (terroristes, ndlr), nous gagnons le combat ».
Il faut donc, selon le chef de l’Etat, repartir puiser ces valeurs à nos sources pour que le Burkina demeure et prospère pour les générations à venir.
Pour le ministre en charge de la culture, Jean Emmanuel Ouédraogo, c’est la toute première fois qu’un chef d’Etat visite le Musée national. « C’est également une visite riche en symboles parce que nous sommes dans le Mois du patrimoine burkinabè », a-t-il dit.
A ce propos, l’adjoint en gestion du patrimoine culturel du Musée national, Oumar Ouattara dont la mission est d’expliquer les expositions aux visiteurs, apporte des précisions.
« Si je prends l’exemple du samedi 24 août 2024, nous avons enregistré rien que des familles qui viennent librement. Il y a eu 131 personnes. Et cela sans les visites qui étaient programmées en groupes», fait-il savoir.
Ainsi, selon lui, « dans une seule journée de samedi, le Musée reçoit entre 100 à 300 visiteurs.» Le temps de la visite dépend du visiteur, selon Oumar Ouattara qui parle de 45 minutes à 2 heures.
«Quand on est en face des visiteurs qui sont curieux, la visite prend du temps et permet au guide de bien expliquer», renchérit la stagiaire Laré Djetenbé Chancela.