Le forum sur la réconciliation nationale est annoncé pour bientôt par le ministre de tutelle Yéro Boly, lors d’une conférence d’échanges avec des associations de victimes, le 5 juillet 2022. Pour cette réconciliation, les réparations financières sont estimées à plus de 65 milliards FCFA . Tout serait-il fin prêt pour réconcilier les Burkinabè ?
Par Nicolas Bazié
Le forum sur la réconciliation nationale va se tenir dans les semaines à venir. C’est du moins ce qu’a laissé entendre le ministre Yéro Boly qui révèle, à cet effet, que plus de 5000 dossiers collectifs et 30 000 dossiers individuels de 1960 à 2015, ont provisoirement été enregistrés par le défunt Haut conseil pour la réconciliation et l’unité nationale (HCRUN).
Le processus de la réconciliation nationale occupe une place de choix dans la recherche de solutions aux sérieux problèmes auxquels fait face le Burkina Faso. Conscientes donc que ceci est gage de paix et de développement durable, les autorités sont à pied d’œuvre pour la tenue effective du forum.
65 milliards de francs CFA pour les réparations financières
Voilà pourquoi aucun dossier ne doit être occulté. Ainsi, il y a « plus de 179 dossiers de pertes en vies humaines, 543 dossiers de blessés, 839 dossiers de destruction des biens individuels, 71 dossiers de destruction des biens des sociétés, plus de 28 000 dossiers du contentieux administratif, 282 dossiers du contentieux foncier urbain », indique le ministre Yero Boly.
Pour tout gérer sans difficultés, il faut sacrifier une grosse somme d’argent, selon le ministre de la Réconciliation nationale et de la Cohésion sociale.
« Le coût global de réparation financière des cas déjà traités et évalués par le HCRUN à la date du 26 octobre 2021 est estimé à 65 740 623 886 F CFA», a-t-il déclaré
Selon ses explications, « cette évaluation concerne principalement les dossiers de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014, les dossiers du Coup d’Etat de septembre 2015, les dossiers de conflits entre agriculteurs et éleveurs de la région du Sud-Ouest, les dossiers du contentieux administratif des 27 militaires condamnés pour motif de tentative de coup d’état en 1996 ».
Les crimes de sang, économiques et politiques seront pris en compte
Le Burkina Faso est frappé de plein fouet par le terrorisme qui occasionne beaucoup de morts depuis 2015. De nombreux analystes ont trouvé qu’il y a assez de déchirures entre les communautés, et que la réconciliation nationale est sans doute l’antidote pour y remédier.
L’ancien Président du Faso Roch Kaboré avait pris l’affaire au sérieux, lorsqu’au moment de son investiture, en fin décembre 2020, il annonçait : « Je lancerai, dans les mois à venir, de larges consultations afin de définir les voies d’une réconciliation nationale véritable». Il avait précisé vouloir prendre en compte les « crimes de sang, économiques et politiques qui, de 1960 à nos jours, continuent d’envenimer les rapports entre les Burkinabè».
Le 20 janvier 2022, soit quatre jours avant le coup d’État, il avait procédé, à l’installation du Conseil national d’orientation et de suivi de la réconciliation nationale et de la cohésion sociale. Composé de 119 membres dont 34 femmes, ce conseil, qui est un cadre consultatif et de concertation, était chargé de suivre la politique du gouvernement, en matière de réconciliation nationale.
« Beaucoup de raisons nous obligent donc à aller vers cette réconciliation nationale »
Les contentieux du Burkina Faso ont un âge beaucoup avancé, soutenait Zéphirin Diabré, ancien ministre de la Réconciliation nationale. « Notre pays traîne nombre de vieux contentieux. Certains se sont sentis lésés par l’ancien régime et d’autres par l’insurrection», déclare-t-il. Et de poursuivre : « Beaucoup de raisons nous obligent donc à aller vers cette réconciliation.
Cette démarche doit être largement inclusive et associer toutes les forces vives. Il faut que l’on s’asseye entre Burkinabè, y compris avec les anciens chefs d’État en exil, Blaise Compaoré et Yacouba Isaac Zida, sinon cela n’aura pas de sens. Un pays ne peut pas vivre dans la sérénité quand deux de ses anciens présidents sont exilés ».
Parlant d’une « démarche largement inclusive », il faut rappeler qu’en novembre 2021, l’ex opposition politique a été invitée à prendre part dans les discussions devant aboutir à une réconciliation réussie.
Cependant, à l’époque, elle avait claqué la porte, suite à la recrudescence des attaques terroristes, en lançant un ultimatum d’un mois au gouvernement, pour apporter des solutions.
C’est plus tard, vu la situation sécuritaire qui ne s’améliorait guère, que l’opposition a décidé de mettre fin à cette suspension, pour donner une chance au processus de réconciliation nationale, suite à la médiation de personnalités religieuses et coutumières.
Pour le forum de la réconciliation qui s’annonce bientôt, l’ancien Président Yacouba Isaac Zida sera-t-il présent ? Qu’en est-il du Président Blaise Compaoré qui a été condamné à perpétuité par le Tribunal militaire , dans le procès Thomas Sankara ?
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