Ancien ministre de la défense sous Blaise Compaoré, l’actuel ministre de la Cohésion sociale et de la Réconciliation nationale, Yéro Boly, s’est toujours montré favorable à des possibles “négociations” avec des groupes armés terroristes. A l’occasion de ses interventions dans des médias et lors des instances régionales ou internationales, il a toujours plaidé pour une approche diplomatique de la question de la lutte contre le terrorisme. Depuis la mise en place du gouvernement de la Transition, il est devenu l’interface entre l’exécutif et les comités locaux de dialogue, chargé de discuter avec les groupes armés terroristes.
Par Daouda Kiekieta
Ancien diplomate, le septuagénaire Yéro Boly n’a jamais fait de la question de la négociation avec les groupes terroristes un tabou. Convaincu que la réponse militaire a montré ses limites, il s’est voulu le porte-voix de ceux qui prônent un règlement pacifique de la crise sécuritaire au Sahel.
A l’occasion de ses interventions lors des instances régionales et internationales sur la sécurité, et lors de ses passages sur des plateaux de télévision, il a toujours défendu cette position. Le Qatar est l’un des pays qui prônent le règlement de la question du terrorisme par les moyens non militaires.
Lors de la 18e édition du Forum de Doha au Qatar le 06 décembre 2018, la question sur la sécurité a fait l’objet d’un panel. Yero Boly, en tant qu’ancien ministre de la défense, était parmi les intervenants qui se sont accordés sur l’idée que seule la réponse militaire ne pourrait suffire à contrer le terrorisme. « Il faut chercher avec qui parler, se rapprocher de ces groupes-là pour savoir ce qu’ils nous reprochent », avait soutenu Yéro Boly lors de son intervention.
Après avoir été ambassadeur du Burkina en Côte d’Ivoire, au Maroc et en Libye, il semble être convaincu de l’efficacité de la thérapie diplomatique dans cette lutte. Récemment en mars 2022, il était le représentant du Président Paul-Henri Damiba à l’Expo 2020 Dubaï (Emirats Arabes Unies).
Le 17 mai 2020, dans l’émission « Sur la brèche » de la Radiodiffusion télévision du Burkina (RTB), en se prononçant sur le terrorisme au Burkina, Yero Boly, laissait entendre que : « Nulle part la solution militaire n’a été la solution finale ».
Pour lui, la lutte contre le terrorisme doit intégrer plusieurs paramètres notamment le dialogue et la prise en compte des besoins des communautés locales dans les politiques publiques. « La gestion de la sécurité ne doit pas exclure les valeurs endogènes », a-t-il signifié.
Lors d’une interview le 29 août 2021, sur la chaîne de télévision privée Omega TV, le diplomate, a trouvé que la création du ministère de la Réconciliation nationale par l’ex-président Roch Kaboré était « une excellente idée ». « Il est important que nous avancions soudés parce qu’il y a trop de fractures au niveau communautaire », a-t-il poursuivi.
Selon ses propos, dans le contexte actuel de l’insécurité, « il faut trouver un bon maillon pour affronter le terrorisme ». Ce bon maillon n’est pas seulement l’action militaire, car selon lui, « il est certain que l’option militaire a trouvé ses limites ». C’est pourquoi, l’ancien diplomate propose « d’associer la solution diplomatique à la solution militaire », pour peu que l’on veuille vaincre le terrorisme.
Une vision aussi partagée par le régime de Roch Kaboré. En effet, lors de la présentation de la nouvelle stratégie de lutte contre le terrorisme basée sur « une vision holistique » en juillet 2021, Maxime Koné, ancien ministre de la sécurité annonçait l’activation de la méthode diplomatique. « La réponse militaire est importante et nécessaire. Mais elle n’est pas suffisante. Nous allons activer la méthode diplomatique. Nous allons traquer ceux qui soutiennent les terroristes », avait déclaré Maxime Koné.
Ce n’est donc pas surprenant que Yéro Boly, ministre d’État chargé de la cohésion sociale et de la réconciliation nationale, pilote la mise place des comités locaux de dialogue pour la restauration de la paix. Le 19 avril 2022, lors d’une conférence de presse, il a expliqué les tenants et les aboutissants de cette initiative.
C’est une initiative qui vise, d’après lui, à discuter avec les jeunes burkinabè qui se sont engagés dans le terrorisme, en vue de les ramener sur le « bon chemin ». Ces concertations sont menées entre les combattants terroristes et les chefs coutumiers et religieux des différentes localités concernées en proie au terrorisme, sous la supervision d’un Coordonnateur national des comités.
Jusque-là, les pays d’Afrique de l’Ouest, confrontés au problème du terrorisme se réservent d’initiés de négociations avec les groupes armées. Excepté le président nigérien Mohamed Bazoum qui dit prendre langue avec des combattants terroristes, la négociation reste un sujet tabou.