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Burkina/Procès de terroristes : Un orpailleur relaxé au bénéfice du doute

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D.O, orpailleur de profession, a comparu le 27 août 2024 devant le Pôle judiciaire spécialisé dans la répression des actes de terrorisme. Libre info.net a suivi son procès qui a abouti à sa réflexe au bénéfice du doute.

Par Nicolas Bazié

Le prévenu a été mis en examen en 2021 par le procureur du Faso près le Tribunal de grande instance de Gaoua pour association de malfaiteurs terroristes. 

Il est précisément reproché à D.O de faire partie d’une organisation terroriste qui sévit à Djigouè et fait des incursions dans bien d’autres villages de la région du Sud- Ouest du Burkina. 

À la barre, le prévenu plaide non coupable. « J’ai quitté Bobo-Dioulasso pour Kampti où je suis allé travailler sur un site d’orpaillage. C’est là-bas que j’ai été arrêté», informe-t-il. 

Il explique aux membres du Tribunal que l’agent de sécurité qui l’a interpellé sur le site d’orpaillage a d’abord demandé sa pièce d’identité et sa carte de vaccination. « Je lui ai remis les documents qu’il a demandés. Il m’a sommé de payer la somme de 1 000 francs CFA. Ce que j’ai fait. Il m’a demandé si j’étais Peulh. J’ai cru que c’était un Yadèga. Il m’a dit de m’asseoir. Ce que j’ai encore fait. Il est revenu me menotter et il m’a conduit au poste où il a dit à ses collègues de m’enfermer», déclare-t-il.

Et de poursuivre : « Il est revenu dire qu’un homme s’est plaint parce que j’aurais volé sa vache. Je lui ai fait savoir que s’il m’accuse d’avoir détourné de l’or, je n’en ferai pas un problème même si c’est faux mais me dire que j’ai volé une vache, je ne peux pas l’accepter. Lorsque je lui dit cela, l’agent de sécurité est parti. Il revient me libérer et me donne à manger. Je lui ai dit que je ne pouvais pas manger parce qu’il a fait deux choses qui ne m’ont pas plu. Il m’a enfermé sans raison et il m’a présenté la pièce d’identité de mon grand frère. Je pensais que c’est parce qu’il avait perdu la vie quelque part. Il m’a encore enfermé. Une semaine après, il est revenu me libérer et il m’a dit qu’on ira à Gaoua pour me présenter à un procureur…». 

Le Tribunal coupe court au récit et demande au prévenu de donner sa version des faits concernant ses rapports avec des personnes suspectes. 

Quelqu’un vous a proposé de rejoindre un groupe armé terroriste ? C’est l’un des juges qui pose la question. « Depuis que je tiens mon téléphone, personne ne m’a appelé pour m’inviter à rejoindre un groupe terroriste. Je n’ai pas aussi un ami qui m’a fait la proposition», fait-il savoir. 

Le Tribunal lui demande s’il connaissait A.D. « Oui, c’est mon voisin. Il était orpailleur, agriculteur et un boutiquier en même temps». 

Les membres du Tribunal posent une autre question : à quelle occasion vous et lui vendez du carburant aux gens ? Le prévenu répond : « C’est lui qui vend du carburant. Je vois souvent des bouteilles qui ne dépassent pas 10 devant sa porte. C’est lorsque j’ai été arrêté que j’ai appris qu’il vendait du carburant à des terroristes. Il ne m’a jamais demandé de rejoindre un groupe terroriste ». 

L’un des juges rafraîchit la mémoire de D.O en lui rappelant une partie de son interrogatoire en enquête préliminaire. Dans ce rappel, on note en substance que le prévenu aurait déclaré qu’il est en contact avec certains terroristes mais qu’ il n’était pas encore intégré dans leur groupe. Il aurait aussi dit qu’un groupe WhatsApp a même été créé pour rassembler les nouveaux adhérents.

Ce que D.O a balayé du revers de la main indiquant que toutes les questions qu’il a entendues à la barre ne lui ont jamais été posées en enquête préliminaire. Les réponses données également n’ont jamais été prononcées par lui, selon ses dires. « C’est certainement quelqu’un qui les a écrits. Sinon rien ne vient de moi», martèle-t-il. 

Le Tribunal l’invite à revenir à la raison. « Interrogez votre conscience et dites-nous ce que vous avez dit exactement», a dit celui qui assure la police des débats. 

Le prévenu persiste et signe : « Les déclarations lues et qui me sont attribuées sont fausses. Dire que j’ai un téléphone tactile et qu’on devrait m’intégrer dans un groupe WhatsApp terroriste n’est pas vrai. Je n’ai qu’un petit téléphone de trois SIM (puces, ndlr). Je n’ai pas de téléphone tactile, je ne suis pas sur WhatsApp ». 

Le juge cite deux noms que le prévenu dit reconnaître. Il s’agit de ses deux frères D.M et D.H. « Ils sont de même mère. Mais, quand je suis arrivé à la Prison de haute sécurité, j’ai vu D.M qui m’informe que lui et son petit frère ont été arrêtés avant moi. J’ai cru que c’était pour vol. J’ai donc dit à D.M que si c’est le cas, on pourra payer et ils vont sortir de prison. Depuis 2003,, on ne s’est plus revu. Le papa nous avait séparés», relate D.O qui, à l’en croire, ne savait pas que ses deux frères sont en prison pour association de malfaiteurs terroristes. 

Ce qu’il faut aussi noter, c’est que l’enquête a révélé que ses deux frères l’ont chargé en annonçant aux enquêteurs que D.O est un membre actif d’un groupe terroriste dans le Grand Ouest du Burkina. « Je n’ai jamais fait partie d’un groupe terroriste », rejette D.O. 

Le procureur fait observer que le prévenu avait été arrêté avec cinq autres personnes qui ont finalement été relâchées pour insuffisance de charges. Cependant, D.M et D.H ont reconnu qu’ils font partie d’une organisation terroriste dont leur frère D.O en est membre. 

Pour le parquet (procureur ou ministère public, ndlr), il y a des charges suffisantes contre le prévenu et il faut le maintenir dans les liens de la prévention et le déclarer coupable d’association de malfaiteurs terroristes. Il requiert donc une peine de 21 ans de prison ferme, assortie d’une sûreté de 15 ans et une amende ferme de 2 millions de FCFA.

Le Pôle judiciaire spécialisé l’a tout simplement relaxé au bénéfice du doute et ordonné sa libération s’il n’est poursuivi pour une autre infraction. 

www.libreinfo.net

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