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COVID-19 :« Nous allons mettre une plateforme à Ouagadougou et Bobo- Dioulasso, (…) pour tester les vaccins »Pr Halidou Tinto

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Des vaccins contre la Covid-19 ont été développés à travers le monde et plusieurs gouvernements s’attellent à faire vacciner leurs populations. Le Burkina Faso a créé un comité national d’organisation de l’introduction du vaccin contre la Covid-19 en décembre 2020. Où en est-on aujourd’hui avec l’introduction du vaccin au Burkina Faso ?  Notre pays a-t-il les moyens de faire vacciner toute sa population ? Dans cette interview accordée à www.libreinfo.net, le Pr Halidou Tinto, directeur régional de l’IRSS à Nanoro, donne son avis sur les conditions d’introduction d’un vaccin contre la Covid-19 au Burkina Faso. Pharmacien de formation, le Pr Tinto est le chef de l’unité de recherche clinique de Nanoro.

 

Libreinfo.net (L.I) : Où en est-on avec l’introduction du vaccin contre la Covid-19 au Burkina Faso ?

(Pr Halidou Tinto) : Un comité national d’organisation de l’introduction du vaccin contre la Covid-19 a bien été mis en place mais je n’ai aucune idée sur le calendrier qui a été établi justement pour l’introduction des vaccins. Au stade actuel, seul le ministère de la Santé peut nous dire à quelle période précise le vaccin sera introduit au Burkina Faso et comment il sera introduit.

(L.I) :Objectivement est ce que le Burkina Faso a les moyens de faire vacciner toute sa population ?

(Pr H.T) : Je pense que ce sera utopique pour le Burkina de prétendre pouvoir vacciner toute sa population. Lorsqu’on regarde un peu l’évolution de la vaccination en occident, on remarque que des pays développés qui ont beaucoup de ressources ou qui produisent même les vaccins ont des difficultés pour couvrir l’ensemble de population. Cette année par exemple, il est prévu la distribution de deux milliards de doses de vaccins alors que la population mondiale dépasse huit milliards. Et ce n’est pas évident qu’on fasse mieux en 2021.Donc le Burkina dans ce contexte ne peut pas espérer couvrir l’ensemble de la population. Il faut dire que le Burkina, à travers l’initiative Covax, attend 1,6 millions de doses de vaccin. Il faut rappeler que Covax est une initiative de l’OMS qui préconise la répartition des vaccins proportionnellement à la taille de la population des pays.

Avec ces 1,6 millions, vous conviendrez avec moi que ce n’est pas possible pour le Burkina de vacciner même 10% de sa population. Si notre pays veut vacciner toute sa population, il lui faudra trouver les moyens d’acheter des vaccins pour compléter les 1,6 millions de doses prévue dans le cadre de l’initiative Covax. Un pays comme le Rwanda s’est déjà engagé dans cette dynamique.

Je préconise à l’endroit du ministère de la Santé d’initier une réflexion pour adopter la stratégie qui est mieux adapté à notre contexte. Aujourd’hui, les pays occidentaux visent l’atteinte de l’immunité collective. Et pour l’atteindre, il faut vacciner au moins 60% de sa population. Vous conviendrez qu’il sera difficile à l’heure actuelle pour le Burkina de vacciner 60% de sa population, c’est-à-dire 12 millions de personnes.

(L.I) : Quel est le vaccin qui serait le mieux approprié au Burkina quand on sait que les coûts et les conditions de conservation peuvent poser problème à des pays comme le nôtre ?

(Pr H.T) : Aujourd’hui il y a plus de 47 vaccins qui ont été développés dans le cadre de la lutte contre la Covid-19. Parmi les 47 vaccins, 5 ont pu franchir la phase 3.Il s’agit des vaccins de Pfizer et BioNTech, de Moderna, d’AstraZeneca, du vaccin russe Spoutniks-V et le vaccin chinois. Il y a un 6è qui est le vaccin de Johnson and Johnson. Ce dernier vaccin semble être le seul qui va être administré en une seule dose. Les 5 autres sont administrés en deux doses avec un intervalle de 3 semaines à 4 semaines entre la première et la deuxième dose pour espérer avoir une efficacité. Pour un pays comme le Burkina, il faut tenir compte des contraintes logistiques. Par exemple, le vaccin de Pfizer et de Moderna se conservent à moins 70 degrés. Ce qui exige que le Burkina puisse disposer sur l’ensemble du territoire de congélateurs de moins70 degrés qui coûtent entre 10 et 15 millions. Vous conviendrez avec moi qu’un tel type de vaccin n’est pas adapté pour notre pays.

Quand on prend le vaccin de Astra Zeneca qui lui se conserve à 4 degrés, les simples frigos utilisés couramment dans nos pays sont indiqués. Ce vaccin est efficace à 70% alors que ceux de Pfizer, de Moderna et le vaccin russe le sont à plus de 90%. En termes de coût, le vaccin d’Astra Zeneca est le moins cher parce qu’il fait 1,78 Euro (environ 1165 francs CFA) la dose alors que le vaccin de Pfizer fait 12 euros (environ 7 860 francs CFA) la dose et le vaccin de Moderna 14 euros (environ 9170 francs CFA) la dose. Il faut donc prendre en compte tous ces éléments, c’est à dire le coût et la logistique dans le choix du vaccin.

(L.I) : Est-ce que le Burkina Faso a le choix du vaccin dans le cadre de l’initiative COVAX si c’est le même type de vaccin qui doit être envoyé à tous les pays en voie de développement sans exception ?

(Pr H.T) : Il faut dire que c’est une initiative de l’OMS financée par la banque mondiale à travers un panier commun impliquant plusieurs bailleurs de fonds. Les pays en voie de développement ne pouvaient pas rester en marge de la stratégie de vaccination parce qu’ils n’ont pas de ressources. Sinon ces pays vont constituer un réservoir du virus. Donc on a intérêt pour une efficacité, d’aller dans une forme d’harmonie de sorte à ce que tous les pays puissent déployer le vaccin au même moment pour pouvoir éradiquer la maladie. C’est pourquoi l’initiative COVAX a été mise en place. Bien entendu, le Burkina Faso est un Etat responsable et souverain qui ne va pas accepter des vaccins dont il sait consciemment qu’il n’a pas les moyens logistiques de les gérer et de les déployer. Je crois que le choix des vaccins va se faire en fonction des capacités des pays à pouvoir les déployer au plus profond du pays. Quand on prend un pays comme l’Afrique du Sud, il a plus de moyens que nous pour gérer des vaccins qui se conservent à moins 70°. Donc je crois que le Burkina va aller pour un vaccin qui se conserve à 4 où 8°.

(L.I) : On remarque l’apparition de nouveaux variants du corona virus à travers le monde. Est-ce que le Burkina est à l’abri de telles mutations et si les vaccins actuels seront efficaces contre les nouveaux variants ?

(Pr H.T) : Effectivement ce que vous dites est très pertinent. Malheureusement, les dernières informations que nous recevons sont assez inquiétantes. L’Afrique du Sud avait déjà commencé le déploiement du vaccin de AstraZénéca qui est efficace autour de 70%.Le pays s’est rendu compte que ce vaccin n’est efficace qu’à 50 à 56% sur le variant sud-africain. Ce qui veut dire que ces vaccins semblent ne pas être très efficaces pour certains variants, en tout cas pour ce qui est de l’Afrique du Sud. Il y a d’autres variants comme le variant anglais qui est très répandu en Europe, le variant brésilien etc. Mais il faut savoir que la technique qui a été utilisée pour le développement des vaccins ARN messager par exemple est une technique très facile et très rapide. Donc sur le plan scientifique, il serait possible de développer des vaccins très rapidement qui seront orientés vers ces types de variants.

(L.I) : Les tests disponibles permettent-t-ils de détecter le nouveau variant de la COVID-19 au Burkina ?

(Pr H.T) : Les tests dont nous disposons actuellement ne permettent pas de dire qu’il s’agit de tel ou tel variant, mais des techniques existent. Et ces techniques sont des techniques de séquençage. C’est-à-dire qu’on décrypte la carte d’identité du virus. Notre équipe de recherche basé à Bobo- Dioulasso, à travers l’initiative COVADIS qui est financé par l’Union Européenne, envisage séquencer justement les souches que nous avons collecté ces dernières semaines avec le rebond de l’épidémie au Burkina Faso. Nous avons une centaine de souches qu’on a congelées et qu’on va bientôt séquencer pour voir si ces différents variants, Sud-Africain, Anglais, et Brésilien, ne circulent pas au Burkina Faso. Nous sommes en discussion avec nos partenaires de la Gambie, où ils ont un séquenceur de dernière génération. Nous allons y envoyer des échantillons et un technicien pour apprendre la technique. D’autre part, notre équipe est en pleine discussion avec une institution américaine qu’on appelle PAF, qui va nous accompagner dans la préparation du Burkina Faso à pouvoir tester des vaccins Covid-19 en phase 3. Tous les résultats qui sont connus sur l’efficacité de ces vaccins sont issus majoritairement d’études menées hors d’Afrique. Très peu d’études ont été faites sur le continent Africain. Alors que vous savez que l’Homme africain sur le plan immunologique est complètement différent de l’européen. Il est important que nous testions ces vaccins dans notre contexte pour voir comment ils se comportent dans nos pays. Nous avons des ressources humaines de qualité, et nous pouvons mettre en place des plateformes pour tester ces vaccins sur place.

Il y a trop de polémique actuellement autour des vaccins et si les tests se font dans notre pays, nous pouvons rassurer facilement nos populations. Nous allons mettre en place une plateforme à Ouagadougou et à Bobo- Dioulasso, pour cela.

S’il y a un nouveau vaccin qui doit être testé, le Burkina Faso disposera de toutes les compétences, que ce soit sur le plan technique, ou sur le plan des ressources humaines et sur le plan légal et éthique, pour tester ces vaccins dans notre contexte. Il ne faut pas que nous soyons des consommateurs seulement. Il faut également que nous participons à la production, et c’est dans cette perspective que nous sommes en train de nous positionner.

Au lieu d’être là à recevoir tout ce qui vient de l’étranger il faut quand même des solutions endogènes. Et je pense que c’est en cela que le leadership burkinabè peut s’affirmer en Afrique parce qu’il y aura deux sites bien préparés pour tester des vaccins contre la Covid-19 dans le contexte africain plus précisément dans celui burkinabè. Au-delà de cela, si le Burkina Faso décide aujourd’hui d’introduire le vaccin, il faut bien qu’on puisse accompagner le ministère de la Santé pour voir si ces vaccins ne posent pas de problèmes dans la durée. C’est pourquoi il faut mettre en place un système de pharmacovigilance efficace. Si tout va bien, nous allons lancer les travaux le 1er mars, et au bout de 3 mois, ces deux plateformes devraient être prêtes.

www.libreinfo.net

 

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