L’épidémie de la dengue bat son plein depuis août 2023 dans la région des Hauts- Bassins et particulièrement à Bobo-Dioulasso. Même si les chiffres sont en baisse ces derniers jours, cette maladie crée la psychose au sein de la population qui prend d’assaut les centres de santé. Les autorités sanitaires sont débordées.
Par Kapidgou, correspondant dans le Houet
L’épidémie de la dengue continue de sévir dans la région des Hauts-Bassins. 20.351cas suspects, 7.105 cas probables, 1651 cas d’hospitalisés et 141 cas de décès liés à la dengue. Ce sont des chiffres communiqués par le directeur régional, Dr Rodrigue Diao qui explique par ailleurs que ces données ne sont que la partie visible du l’iceberg.
Car, « la situation est bien plus alarmante puisque ceux-ci ne sont que des résultats des centres de santé pourtant ces derniers ne sont pas les premiers recours de la population » a-t-il dit.
Cependant, dans les centres de santé, c’est le branle-bas. Prise de température, de poids et de tensions. Le vendredi 3 novembre 2023 n’est pas du tout de repos pour le personnel soignant au centre médical de Farakan (secteur 2 de Bobo-Dioulasso).
Le hall du dispensaire est rempli de monde, majoritairement de femmes. C’est Ibrahim Traoré, agent de santé à base communautaire (ASBC) qui reçoit les patients pour les premières formalités avant l’infirmier consultant.
Après plus de deux heures d’attente, Fadilatou Zonou avance avec son bébé de 10 mois. « Pour le cas de cet enfant, sa température est de 39,2 et donc le test de diagnostic rapide du paludisme est obligatoire » explique l’agent de santé à base communautaire. Un prélèvement de sang à travers son petit doigt et les cris du garçonnet se font entendre.
Le résultat du diagnostic ne révèle pas de paludisme. « Lorsqu’il s’agit d’un adulte, nous passons au test de la dengue quand celui du paludisme est négatif. Il y a beaucoup de cas de dengue que nous détectons » déclare Ibrahim Traoré.
Tahirou Koné, 30 ans, lui se plaint du temps passé avant d’être reçu par le personnel soignant. Je suis là, il y a deux heures. « Je souffre de fièvre et de céphalées. Je crains que ce ne soit la dengue. C’est pourquoi je suis là. J’espère pouvoir faire le test pour être situé » déclare le jeune patient.
Fatigue, douleur et fièvre, Issouf Sow, un autre patient présente aussi les symptômes de la dengue. Il dit souffrir de céphalées et de fièvre depuis la nuit dernière. «Hier j’étais au cimetière, j’ai vu enterrer de nombreuses personnes décédées de la dengue. Ça me fait vraiment peur. C’est pourquoi je me suis précipité à l’hôpital des que j’ai senti les douleurs ».
Comme Tahirou et Issouf, ils sont nombreux à Bobo-Dioulasso qui ont pris conscience de l’existence et ont pris d’assaut les hôpitaux.
Insuffisance du personnel soignant, manque de lits et état de salubrité de la ville
« Avec tous ces patients qui attendent, je ne sais pas à quelle heure je descendrai. Le personnel est ici est en nombre insuffisant au point que chaque agent assurent 5 à 6 gardes par mois. » explique Thomas Koura, infirmier au Centre médical de Farakan.
« De plus, nous ne disposons que de 4 lits d’hospitalisation. On est souvent obligé de garder des malades du dispensaire à la maternité. J’ai eu à placer plusieurs fois des perfusions sur des chaises d’attentes par manque de lits» se désole cet infirmier.
Le directeur régional de la santé de la région des Hauts-Bassins, Dr. Rodrigue Diao, a préféré s’attaquer à la cause de l’explosion des cas de dengue à Bobo-Dioulasso. Selon lui, l’état de salubrité de la ville de Sya est mis en cause.
« Les secteurs 22 et 23 sont les plus touchés par la maladie car ce sont des quartiers qui abritent des dépotoirs sauvages de déchets et des eaux usées provenant des usines. Cela est propice à la prolifération des moustiques aedes qui pondent en moyenne 200 à 400 oeufs par ponte et la femelle peut pondre 2 à 3 fois dans la semaine. » explique-t-il
« Mais nous sommes en train de collecter d’autres informations pour nous permettre de dire de façon exacte ce qui explique cette flambée et surtout mener des actions pour éviter d’autres épidémies » a déclaré Dr. Diao.
En attendant que faut-il faire ?
Le directeur régional en charge de la santé est en pleine guerre contre l’épidémie à travers 5 actions. Entre autres, la formation du personnel soignant sur la gestion des urgences et la prise en charge des cas la lutte anti larvaire et anti vectorielle.
« Pour cela, 3000 volontaires (agents de santé communautaire) ont été recrutés dans la ville de Bobo, ils ont aussi formé 60 volontaires de la croix rouge qui sensibilisent la population et procèdent à la pulvérisation spatiale et intradomiciliaire afin de réduire de façon drastique la population de moustiques dans la ville » selon le Dr Rodrigue Diao
Il rassure que ces actions coordonnées sont en train de produire l’effet escompté. Il en veut pour preuve le passage de la courbe épidémiologie de 3157cas à 2037cas en l’espace d’une semaine.