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Réveillon à Djibo (Soum) : « 31, je bois mon thé à la maison et je mange mes poulets devant ma télé; même si on veut fêter, où aller ? »

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Depuis 2018, la province du Soum est sous couvre-feu et l’état d’urgence, au regard de la recrudescence des attaques armées dans cette localité. Les dernières qui ont secoué la province, ont été principalement celles du 24 décembre 2019 contre le détachement d’Aribinda et du 31 décembre contre la brigade de gendarmerie de Djibo, attaque au cours de laquelle, le Commandant de brigade de ladite ville y a malheureusement laissé la vie. En cette veille de fin d’année, pendant que le reste du pays s’apprête à fêter le réveillon du 31 décembre, à Djibo, l’heure n’est pas à la sérénité. La plupart des habitants surtout les jeunes, déclarent qu’ils fêteront dans leurs domiciles,pour  être à l’abri des surprises désagréables des terroristes,comme ce fut le cas en 2019.

Par TAM’S, correspondant Soum

31 décembre 2019 à Djibo.  Le couvre-feu est pour bientôt à 20H, et cela est en vigueur depuis octobre 2018. Au cours de la journée, chaque famille avait fait ses achats pour le réveillon en famille.

19H00. Les marmites sont sur le feu et dans toutes les familles, on entendait les enfants qui s’agitaient et se pourchassaient, attendant d’être servis quelques morceaux de poulets et des gâteaux, sans parler des jus autour d’une table familiale.

19H15. Pendant que le monde s’impatientait et avait l’eau à la bouche, un grand bruit assourdissant venait de retentir en plein milieu de la ville suivi de tirs d’armes légères. Au début, tout le monde avait cru à des tirs de sommation ou des exercices des FDS.  Mais de la minute suivante, tous avaient compris que c’était une attaque et les familles se sont précipitées dans les maisons et tout le monde à plat ventre, comme il était de coutume depuis quelques années maintenant.

Une nuit de 31 décembre de terreur à Djibo

En moins de trois minutes, toute la ville était plongée dans le noir, chacun ayant pris le soin par réflexe d’éteindre toutes les lampes. Dans le ciel, on voyait déchirer dans la nuit noire, les feux des balles tirées de part et d’autres. Partout ça tirait.

A la brigade de la gendarmerie, les agents défendaient leurs positions et leurs bâtiments. Au commissariat de police et au Groupement des forces armées anti terroristes, des armes crépitent. Tapis dans les maisons à même le sol et disséminés dans toutes les chambres, on entendait le bruit des véhicules et des blindés du GFAT faire leurs avancées et quadrillés la ville pour repousser l’attaque.

Dans tous les quartiers ça tirait. Car les FDS (Forces de défense et de sécurité), depuis un certain temps, portent sur eux leurs armes. Chacun de chez lui donc, tirait pour ‘’on ne sait quoi’’ peut-être pour impressionner l’ennemi.

Déjà, les parents et amis de l’extérieur de la ville à travers les SMS, les appels et les réseaux sociaux étaient inquiets. Tout le monde se demandait ce qui s’y passe. C’était interminable. On avait l’impression que cela durait toute une éternité.

Les tirs ont duré près de deux heures. Enfin ! vers 21H00, les tirs ont cessé. Mais parfois de loin, quelques salves, apparemment un repli des assaillants. Les FDS ont repris le contrôle de la ville avec des patrouilles dans tous les quartiers.

Chacun a compris que la situation est sous maîtrise des FDS. La première des choses était de rassurer les parents et amis que l’on se portait bien avec les siens. Dans la plupart des familles, la nourriture et la boisson du réveillon Saint Sylvestre, sont restées intactes jusqu’au lendemain matin. Personne n’a pu prendre une bouchée ou une gorgée après cet incident, surtout que la nouvelle de la mort du CB avait commencé à circuler. C’était la frayeur.

Le lendemain 1er janvier jour de l’an, les habitants de la ville se sont réveillés avec plusieurs interrogations et pleins de désespoir. Aux nouvelles que certains assaillants de la nuit étaient toujours retranchés en ville, peu de gens avaient mis le nez dehors. Chacun se disait à l’autre, l’année finit mal et la nouvelle également commence mal. C’est le triste souvenir que les habitants de Djibo retiennent du 31 décembre 2019.

Je demandais à Dieu ne pas me laisser mourir, surtout dans un bar

A quelques heures de la fin de l’année 2020, nous avons interrogé quelques jeunes de la ville sur leurs avis par rapport à certaines restrictions, notamment la fermeture de certains bars et boites de nuits, depuis la recrudescence des attaques ; mais également, comment préparent-ils les fêtes.

Issaka Dicko, jeune commerçant célibataire de 25 ans, se souvient encore de cette nuit indésirable à Djibo. « Moi, le 31 décembre 2019, j’étais au maquis TITUS quand tout a commencé. J’ai cru mourir ce jour-là. Je demandais à Dieu ne pas me laisser mourir, surtout dans un bar.  J’ai rampé pour traverser la ruelle et j’ai dormi dans une cuisine dans le voisinage jusqu’au matin. », raconte-t-il heureux d’être en vie.  Dans ces circonstances, personne ne songe à moyen de déplacement, l’essentiel étant de sauver sa tête. « Nos motos, ce n’est que le matin que nous sommes allés les prendre devant le bar. » Il ne souhaiterait plus prendre les risques cette année. « 31, je bois mon thé à la maison et je mange mes poulets devant ma télé », lance-t-il. De continuer « même si on veut fêter, où aller ? Car ces derniers temps, tout le monde est angoissé du souvenir de l’an dernier. Quel mauvais souvenir ? », s’interroge M. Dicko.

Pour Salam Konfé, jeune enseignant, il est hors de question de s’aventurer dehors. « Dans la journée, nous avons prévu de faire un tour au maquis jusqu’à 18H et chacun va se chercher. Il faut prendre ses précautions pour rester vivant, les fêtes ne finissent jamais ! », estime-t-il

Il ajoute :« de toute façon, il y a le 1er janvier et on va se retrouver dans une villa en ville et danser avec des amis.  Ce n’est pas plus que ça ! Et puis, vous savez tant que ces jours-là ne passeront pas, personne n’est tranquille ! C’est surtout lorsque les amis des autres villes envoient des selfies que ça fait mal. »  Mais « un jour, ça va aller. », espère M. Konfé.

Alou Tamboura, pense que ces fêtes de fin d’année sont pour les jeunes. « Moi, j’ai 70 ans. Je suis un retraité. Ces dernières années, pour le réveillon, avec ma pension et l’argent envoyé par mes enfants, j’achète des poulets. Les petits enfants qui ne peuvent sortir, viennent en déguster avec moi et nous suivons les festivités à la télé. Mais je reconnais que c’est dur pour les jeunes de rester cloîtrer à la maison », dit-il.

Bien que depuis quelques mois, il y ait une relative accalmie sur le plan sécuritaire, les inquiétudes demeurent toujours au sein des populations, tant le mauvais souvenir de 2019 continue de hanter les esprits des habitants de la ville.

Le dispositif sécuritaire dans la ville de Djibo reste en l’état, même s’il n’est plus visible comme de par le passé. En effet, depuis l’annonce du dépôt des armes par certains combattants, on constate une baisse des attaques, même si jusque-là, les habitants de la ville restent sceptiques sur les tenants et les aboutissants de la chose.

www.libreinfo.net

 

 

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