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Ouagadougou : Dans l’univers des hommes pousseurs de barriques d’eau 

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Ils ne sont pas  nombreux, ces hommes qui poussent des barriques d’eau pour desservir des habitations contre de l’argent.  Le 30 mai 2023,  Libreinfo.net a fait une immersion dans l’univers de ces hommes qui font de la vente de l’eau un métier.

Par Mahomed Nitiema (Stagiaire)

Autrefois, ce sont des femmes qui poussaient les barriques d’eau pour les revendre aux habitations des quartiers  de Ouagadougou qui n’ont pas d’eau courante. 

Mais, on constate de plus en plus  que des hommes aussi s’adonnent à cette activité. Certains en ont fait un métier pendant que  d’autres, une occupation temporaire en attendant de  meilleurs lendemains.

Ce 30 mai 2023, le jeune étudiant en Lettres modernes à l’université Joseph Ki Zerbo, Hyacinthe Compaoré, pousse de l’eau à l’aide d’une barrique. C’est  au quartier Silmissin, son lieu de résidence. 

hommes barriques eau
Le jeune étudiant en Lettres modernes à l’université Joseph Ki Zerbo, Hyacinthe Compaoré

D’après ses explications, il a commencé cette activité pendant les vacances quand il était enfant. «Je louais les barriques d’un vieux  avec des gens à la fontaine» poursuit-il.

«Je me rappelle que j’avais 14 ans. Comme  on jouait à longueur de journée sans rien faire pendant les vacances, le vieux nous demandait de pousser de l’eau pour vendre avec ses barriques quand la demande était forte. Sur une barrique d’eau vendue je gagnais 75 F CFA alors que la barrique d’eau coûtait en ce moment 200 F CFA» dit-il.

Il explique qu’il utilisait les 75 F CFA qu’il gagnait pour payer ses petits effets. « J’ai cotisé pour payer un vélo. Après l’obtention du BAC en 2017, j’ai chômé et j’ai décidé de pousser les barriques pour vendre de l’eau en attendant le jour de gloire» a-t-il expliqué.

Hyacinthe dit se lever très tôt le matin à  6 heures pour aller travailler. « Dès 6 heures je suis déjà à la fontaine puisque beaucoup de mes clients sont des vendeurs de kiosques. Ils ont besoin de l’eau tôt le matin pour vendre le nescafé et préparer de la nourriture pour leurs clients. Le soir, je rentre à 18 heures pour voir ma petite famille», souligne-t-il .

À en croire Hyacinthe, il s’en sort bien en poussant de l’eau. « Je peux vendre 20 à 25 barriques par jour s’il y a le marché» affirme-t-il, avant d’ajouter qu’« une barrique d’eau coûte 500 FCFA, ça fait un peu d’argent quand même» dit-il avec un sourire au coin des lèvres.

hommes barriques eau
Des barriques d’eau déposées à la fontaine publique

Il dit qu’il ne rencontre pas trop de difficultés dans ce métier  sauf qu’en  cas de coupure d’eau,  le comportement de certains clients est déplorable.

« Quand il y a  coupure d’eau, je ne peux pas satisfaire tous mes clients. Il y a des clients qui ne veulent pas attendre, ils veulent être servis tout de  suite quand ils demandent de l’eau».

Lassané Kiendrebeogo, contrairement à Hyacinthe a choisi d’en faire un métier pour nourrir sa femme et ses 3 enfants. Il est âgé un peu plus de 50 ans et pousse de l’eau pour vendre  dans le quartier patte d’oie. 

Lassané dit n’avoir pas fixé un prix pour la barrique d’eau. « Je fixe le prix avec mes clients en fonction de la distance» dit-il.

À la question de savoir s’il ne perd pas de clients en fixant le prix en fonction de la distance, Lassané répond:  « Non, chacun a sa manière de travailler avec ses clients. D’autres clients ont mon contact et m’appellent à chaque fois qu’ils ont besoin d’eau ».

Lassané précise qu’il n’y a pas d’heure de descente. « Je commence à partir de 7 heures puis je suspends  le travail au moment où je n’ai plus de clients à servir » fait-il savoir. 

Il ajoute : « d’autres apprécient le fait que je ne rentre pas vite à la maison, mes collègues jeunes arrêtent de travailler aux environs de 18 heures».

À côté de Lassané se trouvait Ilboudo Kassoum qui a quitté sa localité d’origine, la province du Bazèga pour venir chercher du travail à Ouagadougou. Il dit vendre du café le matin avant de venir à la fontaine.

«Quand je suis arrivé à Ouagadougou, je vendais du café seulement à la gare routière. Mais avec le peu que je gagnais, je ne pouvais pas m’occuper  convenablement de ma petite famille ici ( Ndlr: Ouagadougou) ainsi que de mon  père et de ma mère au village. Ainsi, j’ai décidé de pousser de l’eau pour ajouter» a-t-il expliqué.

Kassoum précise qu’il pousse l’eau pour vendre au quartier Toyibin mais la coupure d’eau en permanence dans le quartier fait qu’il parcourt une distance avant d’avoir de l’eau. Pour lui, cette situation fait qu’il a augmenté le prix de la barrique d’eau. 

« L’eau coupe en permanence à Toyibin pour une, deux ou trois jours, donc je suis obligé de venir ici, à la Patte d’Oie pour gagner de l’eau et aller servir mes clients. Présentement où je vous parle il y a  coupure d’eau à Toyibin » ajoute-t-il.

Un gérant d'une fontaine publique remplissant une barrique d'eau
Un gérant d’une fontaine publique remplissant une barrique d’eau

« J’ai dû revoir le prix de la barrique d’eau à la hausse avec cette situation . Le prix de la barrique d’eau est de 300 F.CFA quand j’ai de l’eau à Toyibin mais si je parcours une distance je vends la barrique à 500 F.CFA » a-t-il précisé.

Réaction de certains clients

C’est le cas de Alima Bambara, gérante de kiosque au marché du 15. Elle dit utiliser une barrique d’eau par jour. 

«Chaque jour je prends une barrique d’eau avec mon fournisseur à 300 F.CFA, je n’ai jamais eu d’incompréhension avec lui. Il fait tout possible pour me donner de l’eau». 

Ibrahim Congo lave des engins à la Patte d’oie. Il dit avoir des incompréhensions récurrentes avec les pousseurs d’eau, c’est pourquoi, il n’a pas un fournisseur fidèle. « Je prends de l’eau avec qui est capable de m’en fournir  rapidement  pour que je puisse bien faire mon travail» a-t-il fait remarquer.

Adama Zoungrana, une mère au foyer à Toyibin explique qu’il existe souvent des incompréhensions avec les fournisseurs mais elle ne les en veut  pas. «Pousser de l’eau pour vendre toute la journée n’est pas chose facile, ils sont fatigués à un certain moment,c’est ce qui ralentit leur travail». 

www.libreinfo.net 

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