Dans une interview en ligne accordée à Libreinfo.net, Hugues Fabrice Zango, le nouveau recordman du monde en triple saut en salle avec 18,07 m, est revenu sur son nouveau record lors du meeting d’Ostrava, sa préparation pour les J.O Tokyo 2021. Il a aussi évoqué de sa déception lors de son voyage manqué en 2017 à Londres pour les championnats du monde. Il parle également de ses relations avec Marthe Koala et de ses études.
Interview réalisée par Soumaila Sana
Libreinfo.net (Li) : Qui est Hugues Fabrice Zango ?
Hugues Fabrice Zango (H.F.Z.) : Je suis un burkinabè, un homme intègre. Je suis un étudiant en doctorat du génie électrique et aussi un athlète de très haut niveau dans la discipline du triple saut. Je détiens tous les records d’Afrique et un record du monde dans ma discipline.
Li : Comment arrivez-vous à concilier sport et études ?
H.F.Z. : C’est vrai qu’il n’y a que 24 heures dans une journée. Mais, mon secret c’est d’optimiser ma productivité dans chacune de mes activités. J’ai deux tâches prioritaires dans la journée, mes activités de recherches et mon sport.
Les autres tâches sont secondaires et je n’hésite pas à les sacrifier. Je me donne entièrement au sport et ma thèse et au reste quand je peux. À partir de 20 heures j’appartiens à ma famille, à mes amis au téléphone ou en présentiel.
C’est important pour garder mon équilibre. J’ai un agenda toujours bien rempli et j’essaie de m’y tenir. Il faut beaucoup de discipline et une parfaite connaissance de sa personne.
Je ne m’impose jamais des choses difficiles. Je fais plein de petites tâches très faciles qui ne me prennent jamais plus d’une heure. Lorsqu’on maintient une telle discipline pendant 5 ans ou 10 ans, on réalise des choses énormes.
Li : Comment se passe la préparation pour les Jeux olympiques 2021 à Tokyo ?
H.F.Z. : Je suis arrivé dans l’athlétisme il y a 10 ans et le reste, c’est l’histoire que j’écris. La préparation a donc commencé depuis 10 ans au stade du 4-Août de Ouagadougou.
Mais pour ces deux derniers mois, nous avons déjà fait notre plus grosse préparation dans les Iles Canari au mois d’avril 2021. Ce n’était pas une discipline militaire mais ça n’en était pas loin. Il y a eu un gros travail physique qui a été abattu.
Actuellement nous sommes en phase de compétition. C’est une mise au vert. On affronte nos adversaires dans des meetings pour aguerrir et renforcer notre mental de gagneur. Il faut dire qu’il y a moins de place pour le hasard et la chance dans une compétition comme les Jeux olympiques.
On se battra pour ramener des médailles en or et ce sera notre cadeau pour l’anniversaire de l’indépendance du Burkina le 5 août prochain. Jusqu’à présent la préparation se passe bien et nous n’avons aucun problème.
Li : L’Etat burkinabè a-t-il pris des dispositions pour votre préparation et jusqu’au voyage sur Tokyo ?
H.F.Z. : Oui assurément ! Le Comité national olympique des sports burkinabè y travaille.
Li : Vous n’avez pas pu participer aux championnats du monde 2017 à Londres parce que vous n’avez pas obtenu le visa à temps ? Quel souvenir gardez de cet épisode ?
H.F.Z. : C’est un mauvais souvenir avec beaucoup d’enseignements à la fois pour moi et pour ceux qui organisent nos voyages. Depuis, on ne se laisse plus surprendre par les évènements sportifs.
Li : Comment a été le duel face à l’Américain Christian Taylor lors du meeting d’Ostrava le 19 mai 2021 ?
H.F.Z. : Ce duel était un signal pour le monde du triple saut. Taylor est un dinosaure du triple saut. Il a dominé toute la décennie passée mais cette année il fallait changer les choses.
Je me suis bien entrainé et je voulais m’imposer en tant que nouveau patron de la discipline. Pour cela, il fallait battre Taylor et le rebattre… A Ostrava j’ai gagné. C’était un bon signal mais Taylor s’est malheureusement blessé et ne pourra pas participer aux JO. Le chapeau du chef flotte dans l’air et je compte le récupérer.
Li : S’agira-t-il de la confirmation le 1er juin prochain au meeting de Montreuil face votre challenger Christian Taylor ?
H.F.Z. : Etant blessé pour au moins 8 mois, il ne pourra plus poursuivre la saison 2021
Li : Que pensez-vous de votre challenger Christian Taylor ?
H.F.Z. : C’est un grand adversaire. Il est le triple sauteur le plus titré et le deuxième performeur de l’histoire de la discipline. Mais, c’est aussi une personne que je connais en dehors des terrains et il est très humain.
Il voulait bien visiter le Burkina Faso, un de ces jours. On avait prévu de s’entrainer ensemble pour peaufiner notre technique le dernier mois avant les J.O mais avec sa blessure ça ne sera plus possible.
Taylor est malheureusement blessé et c’est dur pour moi. J’aurai aimé gagner contre le plus grand triple sauteur de l’histoire pour construire ma légende mais les blessures font bien partie du jeu et cela m’interpelle sur la gestion des deux prochains mois.
Li : Quelle surprise va faire Hugues Fabrice Zango au peuple Burkinabè aux J.O 2021 à Tokyo ?
H.F.Z. : Il n’y aura aucune surprise aux Jeux olympiques. J’y vais pour une mission pour laquelle je me suis préparée. Je vais aux JO 2021 de Tokyo pour gagner. Et justement nous devrions prier pour ne pas avoir de surprises parce qu’actuellement je suis assurément le plus fort des triples sauteurs du circuit cette année.
Li : Que pensez-vous de votre compatriote Marthe Yasmine Koala ?
H.F.Z. : De mon avis, Marthe est une athlète burkinabè très talentueuse mais dont le talent n’est malheureusement pas exploité au maximum. Je pense qu’elle le sait. En tout cas je le lui dis souvent. Nous sommes de bons collègues de l’équipe nationale.
