Les médias en général et ceux du Burkina Faso en particulier font face à des difficultés économiques liées à l’insuffisance des ressources financières. Pour certains patrons de médias, cette situation résulte entre autres de la saturation du secteur, du manque de compétences des promoteurs, du boom des réseaux sociaux.
Par Daouda Kiekieta
Le secteur médiatique burkinabè croît chaque année avec la naissance de nouveaux organes de presse. Cette croissance en nombre ne rime pas malheureusement avec l’épanouissement de ces médias. En effet, nombreux sont les médias qui rencontrent des difficultés pour faire face à leurs charges quotidiennes.
Neuf des dix chaînes de télévisions privées commerciales du Burkina Faso ont vu leurs signaux suspendus du multiplexe de la Télévision Numérique Terrestre (TNT) le vendredi 10 décembre 2021. La raison évoquée était le recouvrement infructueux des créances de la redevance TNT.
Selon Issouf Saré, Directeur général de la télévision privée Bf1, cette situation de « précarité » à laquelle les médias font face, est due à l’étroitesse du marché publicitaire. « Le marché publicitaire est assez étroit alors que le modèle économique des chaînes de télévision et les médias de façon générale repose sur la vente d’espace publicitaire », a-t-il indiqué.
Cette situation d’étroitesse du marché publicitaire est aggravée par la saturation du secteur. En effet, le pays compte à ce jour plus de 390 médias, mais, « beaucoup meurent parce qu’ils n’ont pas les capacités ou les ressources », constate Cyriaque Paré, fondateur de lefaso.net
Certains trouvent également que l’environnement économique du pays est hostile à l’épanouissement des organes de presse. Selon toujours Cyriaque Paré, l’environnement économique burkinabè ne fournit pas les ressources nécessaires pour faire vivre les médias que le pays compte aujourd’hui du fait des restrictions du tissu économique.
Par ailleurs, la qualité des ressources humaines est aussi un facteur explicatif des difficultés que vivent les organes de presse surtout les médias en ligne. A en croire Cyriaque Paré, nombreux sont les promoteurs de médias en ligne qui ne disposent pas de compétences nécessaires pour faire fonctionner ces structures.
Conséquence, « on a créé le média sans projet éditorial, sans vision et on se retrouve très vite avec un bébé qu’on ne peut pas faire grandir ».
« Je pense qu’il y a nécessité de revoir tout cela pour que ceux qui créent les médias en ligne aient vraiment les compétences pour les faire fonctionner. Parce que ce à quoi on assiste, c’est la ruée vers le numérique où aujourd’hui on dénombre officiellement 145 médias en ligne mais plus de la moitié ne sont pas à jour », a laissé entendre M. Paré.
Avec le boom des réseaux sociaux, les médias classiques font face à une concurrence de plus en plus rude à laquelle il faut s’adapter.
Selon David Saaba, rédacteur en chef de la radio privée Horizon Fm, avec ce boom les choses se compliquent au niveau des médias traditionnels, mais, l’on essaie tant bien que mal de garder sa marque. Pour lui, il n’y a pas de conditions assez propices dans les médias burkinabè pour pouvoir travailler et rendre l’information.
« Les crises sécuritaire et sanitaire que vit le Burkina compliquent davantage les choses sur le terrain, mais nous nous essayons de nous adapter pour pouvoir donner l’information aux populations » a-t-il souligné avant de lancer : « C’est l’occasion pour moi de rendre hommage aux hommes et femmes de médias qui se mobilisent jours et nuits pour sensibiliser, informer et éduquer nos populations ».
Pour Nafisiatou Vebama, journaliste reporter, cette situation de précarité des médias affecte les conditions de vie et de travail du journaliste. « Si par exemple, le patron du média ne paye pas le journaliste à la hauteur des tâches qu’il accomplie, cela peut jouer sur son travail», a-t-elle laissé entendre.
Et d’ajouter : « Il y a des journalistes qui abattent un travail énorme. Mais s’ils vous disent ce qu’ils touchent par mois, c’est pitoyable».