Le Comité international mémorial Thomas Sankara (CIM-TS) après Pô le 13 octobre 2020, a effectué un second pèlerinage au camp BIA de Koudougou avec Boukary Kaboré dit le ‘’lion’’. La visite a eu lieu mardi 27 octobre 2020. Ces deux sorties font partie des activités commémoratives du 33è anniversaire de l’assassinat du Président Thomas Sankara. Le thème général est : « Octobre : mois de mémoire et de gloire pour le Burkina et Cuba. » Luc Damiba, sécrétaire Général du CIM-TS a déclaré à l’issue de la visite, que le comité du mémorial va constituer un collectif d’avocats pour accompagner les familles des victimes du coup d’Etat d’octobre 1987.
Par Tatiana Kabore (stagiaire), de retour de Koudougou
Les évènements ont eu lieu il y a 33 ans, mais lorsque Boukary Kabore dit « le Lion », en parle, ses interlocuteurs du jour ne voient plus devant eux le sexagénaire grisonnant. Ils voient par ailleurs, le jeune capitaine, commandant à l’époque révolutionnaire du Bataillon d’Infanterie Aéroporté (BIA), une troupe d’élite d’alors, qui a tenté de résister à Blaise Compaoré, après le massacre de Thomas Sankara et de ses compagnons.
Visite du camp BIA (ancienne résidence du président Maurice Yaméogo) avec Boukary Kabore dit « le Lion »
Douze jours après l’assassinat du président Thomas Sankara, le Bataillon d’infanterie aéroporté commandé par Boukary Kabore dit « Le lion » a été attaqué par des militaires venus de Ouagadougou. Mais Boukary Kabore désavoue ces propos et affirme qu’il n’y a jamais eu de combat à Koudougou le 27 octobre 1987. Selon lui c’est quelques jours après que ses compagnons ont été assassinés un par un.
« Je voudrais qu’on corrige l’erreur des assassinats, ce n’est pas le 27, c’est longtemps après parce que moi-même j’ai fait quatre jours à Koudougou. La seule personne tuée le 27 était un civil qui revenait de songpelsé, le Monsieur est allé prendre le tchapalo et il y a un obus qui a pété, il a succombé ». Souligne-t-il.
Parmi les onze compagnons de Boukary Kaboré, il y avait six officiers notamment, le lieutenant Daniel Kéré son adjoint « très compétent, le meilleur des officiers », le lieutenant Elysée Sanogo, le sous-lieutenant Bertois Ky, sous-lieutenant Jonas Sanou, l’élève officier Abdramane Sakandé, délégué de corps, l’élève officier Timothée Oubda le meneur rouge des militaires. Pour lui, ces personnes ont été tués méchamment et celui qui les a exécutées était Gaspard Somé.
L’ancien Commandant du BIA affirme qu’il devait être assassiné avant Thomas Sankara, le père de la révolution Burkinabè selon le communiqué qui lui avait été parvenu « Blaise est encore vivant » dira-t-il avant de poursuivre « le plan A de Blaise était de tuer le lion, puis aller à kamboinsin cibler Vincent et après cela passer au plan B, qui était de tuer Thomas. Et c’est donc le plan B qui a été opéré ». Il a de ce fait insisté sur le fait que c’est plusieurs jours après l’assassinat de Thomas Sankara que ses compagnons koama Michel, Siguiré et les autres ont été assassinés un par un.
Après la mort de ces compagnons, sachant qu’il allait être également liquidé, le lion avoue avoir mis un plan en place. Ce plan était de mourir en héros « le 28 matin, je me pointe à la place de la révolution et s’il y avait à être exécuté, cela allait être là-bas mais fort heureusement dans la soirée, ils sont restés là à tourner et j’ai dit à mes agents ne tirez sur personne » explique- t-il.
Et c’est suite au repliement des militaires venus de Ouagadougou qu’il s’est enfui pour le Ghana avec le soutien du Colonel Major Salfo Kaboré, lui aussi rescapé. Pour Boukary Kaboré dit « le Lion », son seul souhait en ces moments, c’est le dédommagement des ayants droits. Car ses éléments ont été tués froidement, gratuitement, méchamment en temps de paix et non lors d’une guerre. Pour lui, cela a été des assassinats inutiles dans le but de détruire l’armée.
A la suite de la visite du camp de Bataillon d’Infanterie Aéroporté(BIA), un dépôt de gerbe a été effectuée sur la tombe des commandos du BIA assassinés. En rappel qu’au lieu de 11 corps, c’est seulement 6 corps qui ont été enterré. Les autres corps sont restés introuvables.
Conférence de presse des membres du mémorial
Après la visite du camp, une conférence de presse a été animée par Luc Damiba, secrétaire général du mémorial Thomas Sankara. M. Damiba a, à cet effet, annoncé officiellement la décision du comité d’accompagner les familles des victimes à porter plainte pour que justice soit rendue « à partir d’aujourd’hui nous avons décidé d’accompagner les familles des victimes (11 à Koudougou et 9 à Bobo à aller en justice, nous avons donc contacté des avocats qui vont les accompagner. » dira-t-il. Selon lui, cette décision a été prise parce qu’il y avait une sorte d’omerta, d’oubli complet sur cette affaire.
A la question de savoir contre qui cette justice sera faite il répond « contre x on ne peut pas designer parce qu’on a pas de preuve formelle. C’est à la justice de chercher et de designer ceux qui se sentiront morveux vont réagir ». Selon Luc Damiba, ce pèlerinage a été effectué dans le but d’apprendre également et de n’oublier personne dans le relai de l’histoire général de ce pays.
Quant à Madi Pingdwendé étudiant en sociologie, ce pèlerinage lui a apporté beaucoup de choses : « ce pèlerinage m’a apporté beaucoup de chose. Il nous a permis de connaitre le camp BIA. Qui était le centre où les révolutionnaires étaient à l’époque notamment papa Boukary le lion avec ces 500 hommes. Il l’a bien dit cela nous a permis en même temps de savoir que c’était la résidence de Maurice Yaméogo qui était le premier président du Burkina Faso ». Pour lui, cela a été une découverte magnifique en tant que jeune.
Ce pèlerinage s’inscrit dans le cadre de la commémoration des 33 ans de l’assassinat du Président Thomas Sankara et 12 de ses compagnons. À cet effet, une série d’activité est organisée du 02 au 31 octobre par le Comité International Mémorial Thomas Sankara (CIMTS).