À l’issue de l’audience du 9 novembre 2023, au Tribunal de grande instance Ouaga I, Me Moumouny Kopioh, l’un des avocats de Essakane SA est revenu sur le choix de l’expert du parquet qui a fait une expertise contredisant celle des experts judiciaires.
Par Nicolas Bazié
Face aux médias, Me Moumouny Kopioh semble être sûr de ce qu’il avance. Il déclare en effet que rien n’étonne encore les avocats de la défense dans ce procès dit charbon fin, faisant ainsi référence au choix de l’expert du parquet qui a affirmé à la barre que le rapport d’expertise des experts judiciaires n’est pas «sincère».
Comment l’expert du parquet est arrivé dans ce procès? Me Kopioh fait l’historique: « Au début, il y a eu dénonciation. La Brigade nationale anti fraude est allée constater. Elle a fait un pésé et elle a conclu qu’il n’y avait pas de fraude (de l’or, ndlr). La douane également avait conclu qu’il n’y a pas de fraude. Les pièces sont versées au dossier.
Le procureur général a été saisi du dossier et il a estimé qu’il fallait ouvrir une instruction au parquet. Cette instruction a été ouverte sans éléments. C’est ainsi qu’ils ont nommé l’expert du parquet et le douanier Nana.»
L’avocat de la société minière Essakane SA poursuit son historique : « À l’époque, cet expert n’était même pas inscrit sur la liste des experts au Burkina, vous pouvez vérifier. Ils ont fait leur rapport pour dire qu’il y a fraude massive. Ils ont même affirmé qu’il ne s’agit de pas de charbon fin et que c’est de l’or qui a été camoufflé. Nous, nous ne pouvons pas croire à cela à partir du moment où ils ne sont pas des experts inscrits.»
« On ne sait pas où le parquet est allé les débaucher. Pourtant, les experts judiciaires ont été librement choisis par le tribunal sans que Essakane n’ait eu la prétention et le droit de proposer quelqu’un. L’expert du parquet et le douanier Nana ont fait leur lettre de mission, ils ont choisi leur laboratoire pour aller faire les analyses. C’est à la dernière minute qu’on a su que c’était au Ghana. Le parquet y était avec le juge superviseur. De retour, ils n’ont pas fait une expertise des corps solides parce qu’ils soupçonnaient qu’ils n’y avait rien », a fait observer Me Kopioh.
Dès le début des débats sur la présence de l’expert du parquet, le procureur a coupé court en indiquant que l’expert en question est présent pour donner des « informations techniques et scientifiques» à même d’éclairer la lanterne du tribunal ou de concourir à la manifestation de la vérité.
Le fait que c’est un problème de droit qui a été soulévé, le tribunal a donné la parole et le temps à toutes les parties pour qu’elles se prononcent sur le sujet.
A l’issue de l’intervention de chacune des parties, on se rend compte que l’article 261-117 du code de procédure pénale permet à l’expert du parquet d’intervenir dans le procès.
Le 9 novembre, le juge a tranché en jugeant recevable la présentation du rapport d’expertise de l’expert du parquet. Il a fondé sa décision sur l’article 321-49 du code de procédure pénale.