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Mogtédo/Orpaillage : Des “élèves” d’un genre nouveau dans la cour d’une école

Des femmes déplacées internes en train de chercher de l'or dans le domaine de l'école Mogtédo A
Des femmes déplacées internes en train de chercher de l'or dans le domaine de l'école Mogtédo A
Temps de lecture : 3 minutes

L’école de Mogtédo “A” dans la province du Ganzourgou (région du Plateau Central) est prise d’assaut par des «élèves» d’un genre nouveau. Il s’agit d’orpailleuses, des femmes déplacées internes majoritairement, qui ont investi le domaine scolaire à la recherche de l’or. Elles y sont malgré la promiscuité et l’interdiction de leur activité. Libre info.net a fait le constat en début décembre 2024.Par Natabzanga Jules Nikièma (correspondant)

Il est 12h dans la cour de l’école Mogtédo “A” ce 3 décembre 2024. A quelques mètres des salles de classes, des femmes munies de pioches creusent dans des trous. A côté, dans une flaque d’eau, d’autres, courbées, lavent et tamisent les débris de terre dans de vieux récipients pour extraire de l’or. Elles sont en majorité des personnes déplacées internes (PDI). Venues de divers quartiers de la commune de Mogtédo (province du Ganzourgou), elles se sont retrouvées ici pour mener cette activité interdite par les autorités locales. Certaines portent leurs bébés au dos, et d’autres sont accompagnées de leurs enfants en bas âge. D’autres encore portent des grossesses.

K.Y, un nom d’emprunt, est une PDI en provenance de la Kompienga (région de l’Est) après avoir fui au Togo d’où elle dit avoir été chassée sans avoir pu récolter son champ. « Je suis venue à Mogtédo sans soutien. Même pas une tine de mil. Et la vie est chère ici. Je suis devenue une agricultrice qui doit désormais payer à manger. Ce n’est pas facile », explique-t-elle. « Ici, j’ai tenté le petit commerce mais j’ai échoué. J’ai tout essayé mais je ne sais quoi faire », ajoute-t-elle. « L’or aussi, je ne savais même pas sa couleur. C’est ici que j’ai découvert cela », souligne-t-elle. « Dieu merci, je gagne un peu. Si on me laisse sur ce site, c’est vraiment un soulagement pour moi. Autrement, c’est la catastrophe. Je suis venue sur ce site malgré moi », plaide-t-elle. « On nous empêche. On nous interdit. On nous chasse, mais on n’a nulle part où aller travailler », se désole-t-elle.

Des débris de terre prêts à être tamisés à la recherche de l'or
Des débris de terre prêts à être tamisés à la recherche de l’or

Patigba Sawadogo héberge beaucoup de ses enfants déplacés internes venus de Boulsa dans la région du Centre-Nord. Elle dit être démunie et n’a pas de lopin de terre pour cultiver. « Voilà pourquoi je suis venue sur le site d’or tenter ma chance », explique la vieille femme.

Une activité menée la peur au ventre

« Souvent, je gagne un gramme par jour et, parfois, tous les trois jours que je vends à 2 000 FCFA», poursuit la quinquagénaire. « On m’a chassée d’ici mais je ne sais pas quoi faire à la maison. C’est cela qui fait que nous jouons aux sourds », justifie l’orpailleuse artisanale. « Nous menons l’activité, la peur au ventre car on nous a interdit et nous forçons », indique dame. Sawadogo. « Si nous trouvons une autre activité, nous abandonnerons le site », assure-t-elle.

Awa Sawadogo est venue de Boala, une commune du Namentenga (région du Centre-Nord). « On n’a pas une autre activité », insiste la jeune dame. « Si on avait autre chose à faire, on ne serait pas venu ici malgré l’interdiction », souligne-t-elle. « Que l’autorité nous aide avec un autre métier qui va nous permettre d’abandonner le site artisanal d’or », souhaite Awa Sawadogo.

Aminata Bougma dit avoir six enfants et vit avec un mari cultivateur démuni. « L’extraction artisanale de l’or est un travail réservé aux hommes et non aux femmes. Nous n’avons pas à nous nourrir et on n’a pas de soutien », laisse-t-elle entendre.

Un jeu du chat et de la souris

Les autorités locales avaient eu des échanges avec les premiers orpailleurs qui avaient investi le domaine scolaire. Et une solution avait été trouvée à l’époque. En effet, l’activité a débuté en 2002 et s’était arrêtée en 2011 suite à des démarches. « Mais des récalcitrants sont revenus par la suite. Aujourd’hui, ils jouent au jeu du chat et de la souris avec les autorités locales », indique un riverain de l’école. « Le phénomène a la peau dure », se désole un enseignant.

Le directeur de l’école, qui a requis l’anonymat, est inquiet et insiste sur les dangers de cette exploitation. « Actuellement, il y a des grands trous qui constituent un danger pour les élèves surtout pendant la saison des pluies », indique-t-il.

Le directeur de l’école fait savoir que les grands élèves, surtout les filles, sont tentés par l’orpaillage auquel ils s’adonnent souvent les week-ends.

Il suggère donc de « voir comment délimiter le domaine scolaire avec une clôture ». « On a assez sensibilisé mais il faut passer à des actions fortes, surtout pour les décourager à ne plus venir davantage », ajoute-t-il. « C’est surtout l’absence de clôture qui nous met beaucoup plus en insécurité », lâche le directeur de l’école.

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