Le ministre de l’économie, des finances et du développement, Rosine Sori Coulibaly a sollicité une expertise du Fonds Monétaire International (FMI) qui a travaillé sur la question épineuse. Dans son rapport d’assistance rendu public en septembre dernier, le FMI déclare qu’il s’est entretenu par vidéoconférence avec les autorités burkinabè entre le 11 et le 24 juillet 2018, afin de conseiller les autorités quant aux moyens de rationaliser les dépenses de rémunérations. Cependant, dans son rapport le FMI n’a pas été à mesure d’établir une évaluation exhaustive au regard de la complexité de répartition du fonds communs au Burkina Faso contrairement aux autres pays. En substance, voici ce que le rapport dit.
Le système des fonds communs, qui n’est pas rare dans la région, a évolué au fil du temps au Burkina Faso. À l’origine, ces fonds ont été créés pour inciter le personnel de l’administration fiscale à renforcer le recouvrement des recettes fiscales. Mais avec le temps, ce système a été étendu afin d’octroyer des primes à tous les agents, même ceux qui ne travaillent pas directement au recouvrement de ces recettes. En outre, la base de calcul des primes a changé. Alors qu’à l’origine, le calcul se fondait sur les amendes recouvrées, les fonds communs sont aujourd’hui alimentés par un pourcentage du total des recettes recouvrées par le service concerné, et ce taux n’est pas harmonisé. On compte près de vingt fonds communs pour dix ministères et institutions : neuf au ministère de l’économie, des finances et du développement, deux au ministère du commerce ainsi qu’au ministère de la sécurité, et un à la présidence, au premier ministère, au ministère des mines et de l’énergie, au ministère de la santé, au ministère de l’environnement, au ministère de l’agriculture et au ministère des infrastructures. Chacun de ces fonds est géré par son ministère et réglementé par un ou plusieurs décrets. L’ampleur réelle des fonds communs est inconnue en raison du manque d’informations déclarées, mais elle pourrait être considérable, étant donné qu’il a récemment été recommandé de plafonner les versements des fonds communs à 25 pour cent de la rémunération annuelle de chaque bénéficiaire.
Le mécanisme des fonds communs burkinabé se distingue des pratiques observées dans la région. Ainsi, au Sénégal, les ressources des fonds communs proviennent des amendes et des sanctions recueillies par les activités de recouvrement des autorités financières. Ces ressources sont partagées entre les services du ministère des finances et ceux du ministère du commerce. Leur répartition s’appuie sur les règles établies par décret par le ministre des finances. Elle tient compte de la contribution des différentes entités au montant total des fonds communs. Elle prend également en considération la fonction, le grade et les résultats des membres du personnel. Le système burkinabé ne semble pas présenter ces caractéristiques. Complexe, la question des fonds communs mérite une analyse détaillée. Elle part d’une bonne intention : proposer différents types de mesures incitatives dans le secteur public et prévenir la corruption dans le recouvrement et la gestion des recettes fiscales. Or, ces fonds sont devenus une sorte de prime octroyée à tout le personnel, gérée en dehors du budget et des politiques globales de rémunération, ils ne sont ni déclarés ni imposables. En outre, les ressources des fonds communs ne proviennent plus des amendes et sanctions recueillies, mais consistent en un pourcentage du total des recettes fiscales recouvrées par les régies financières. La prolifération des fonds communs dans le secteur public et le fait qu’ils échappent à l’impôt exacerbent l’impression d’une inégalité de traitement entre le secteur public et le secteur privé, ainsi qu’entre les différentes entités du secteur public du fait de l’absence de règles de répartition équitables. La nécessité de réformer ces fonds suscite une attention croissante au Burkina Faso. La conférence tripartite de 2018 sur les rémunérations dans le secteur public a débouché sur les recommandations suivantes : i) adoption d’une loi réglementant les fonds communs au niveau national (elle devrait entrer en vigueur d’ici janvier 2019) ; ii) plafonnement des primes octroyées par les fonds communs (à 25 pour cent de la rémunération totale de chaque bénéficiaire). En raison de l’absence totale de données sur les fonds communs et du fait que leur nombre et leur fonctionnement diffèrent d’un ministère à l’autre et même au sein d’un même ministère, la mission n’a pas été en mesure d’établir une évaluation exhaustive.
Il ressort de l’analyse de régression des données individuelles issues de l’Enquête multisectorielle continue de 2014 que les employés publics bénéficient d’une rémunération supérieure à celle de leurs homologues du secteur privé formel.
La rédaction
