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Procès putsch manqué : « Je demande des excuses au président Michel Kanfado …pour avoir failli à leur protection » (Commandant Abdoul Aziz Korogo)

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Les auditions des présumés cerveaux du putsch manqué du 16 septembre 2015, se poursuivent au tribunal militaire de Ouagadougou. Ce lundi 5 novembre 2018, c’est la dernière vague des interrogatoires qui est entamée. Et, c’est le commandant Abdoul Aziz Korogo poursuivi pour meurtre, coups et blessures volontaires et complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat, qui est entendu.

 

D’entrée de jeu, des excuses à l’endroit de Michel Kafando, l’ancien président de la transition et des membres du gouvernement de la transition pour avoir failli à leur protection ; consternait Abdoul Aziz Korogo, chef de corps par intérim de l’ex-régiment de sécurité présidentielle(RSP) à la barre devant les membres du tribunal et l’assistance. Le commandant estime, que c’était de son rôle de protéger les autorités de la transition qui étaient en conseil des ministres.

Le chef de corps par intérim de l’ex-régiment de sécurité présidentielle rejette toutes les accusations. En s’expliquant sur les faits qui lui sont reprochés, le commandant Korogo dit avoir une position claire dès le début du putsch. L’ex chef de corps par intérim du RSP dit n’avoir jamais approuvé le coup d’Etat du 16 septembre 2015. « Je n’ai jamais ordonné, ni approuvé l’arrestation des autorités de la transition. Je ne savais même pas qu’elles étaient arrêtées », soutient-il. L’accusé explique que le 16 septembre 2015, le général Gilbert Diendéré lui a ordonné de sonner l’alerte, et il s’est exécuté. Et c’est au cours d’une rencontre avec les officiers que le général leur a donné l’information concernant l’arrestation des autorités de la transition. Le général a dit ceci « ne soyez pas offusqués si tout le monde n’a pas été informé de ce qui se passe. On ne pouvait pas informer tout le monde. Je demande votre accompagnement », souligne-il. Le commandant Aziz Korogo, dit avoir osé demander au général Gilbert Diendéré s’il avait l’accompagnement de toute l’armée, notamment les chefs militaires. Le cas échéant, le RSP ne tiendra pas longtemps.  Et le général de répondre « j’ai une rencontre ce soir avec les officiers à cet effet ». De l’aveu du Commandant Aziz Korogo, c’est au retour de cette entrevue avec les chefs militaires que le général Gilbert Diendéré a fait proclamer le conseil national pour la démocratie (CND). A partir de cet instant, le commandant a affirmé avoir demandé à ses hommes de rester militaires. Que recouvre l’expression, la notion « rester militaires ? », demande le parquet. Et le commandant de répondre « rester militaires veut dire « ne pas se mêler de la politique ». Car j’ai remarqué que la situation devenait de plus en plus politique que militaire ».

En ce moment, poursuit le Commandant Korogo, « j’ai voulu démissionner lorsque la hiérarchie militaire m’a demandé de rester pour aider à trouver une issue heureuse à la crise ».

Selon le Commandant à la barre, la hiérarchie militaire savait que la plupart des chefs de corps des garnisons dans les autres régions du pays, étaient de la même promotion que lui. Alors son intervention auprès de ses promotionnaires, pouvait être d’une grande touche pour une sortie de crise. Le Commandant Abdoul Aziz Korogo, dit avoir même initié des rencontres avec ses camarades des autres garnisons, notamment le commandant Evrard Somda de la gendarmerie pour éviter l’affrontement. Le commandant Korogo, a aussi avoué que des éléments du RSP s’étaient opposés au désarmement au regard de la tension qui montait. Il a dû se soustraire entre temps en informant la hiérarchie militaire.

Le parquet militaire a remercié le commandant Korogo pour la sincérité de son récit. Toutefois, il a estimé que le commandant à poser des actes qui ne relevaient pas des ordres militaires. Il a signé selon le parquet des laissez-passer CND (conseil national pour démocratie) sans être à mesure de dire celui, sous les ordres de qui, il signait ces documents, mais également la provenance du cachet CND qu’il utilisait.

Le commandant Aziz Korogo, a aussi ordonné à des éléments d’aller occuper la place de la nation pour que des anti- ou des pro-putsch n’envahissent pas les lieux pour une quelconque manifestation. Pour le parquet militaire, ces missions étaient dévolues soit à la police ou la gendarmerie car il s’agit du maintien de l’ordre. Mais pour Aziz Korogo, ces missions s’appellent « missions d’occupation de zones » dévolues aux militaires. « J’ai fait tout ceci sous les ordres du Général Gilbert Diendéré », affirme-t-il.

« Mon commandant, dites-nous, en qualité de qui, le général Gilbert Diendéré vous donnait toutes ces instructions, quand on sait qu’il n’occupait aucune fonction au sein du RSP ? », demande le parquet militaire. L’ex bras droit du président Blaise Compaoré « était notre père spirituel au RSP », souligne le Commandant ; avant d’ajouter que le général Gilbert Diendéré passait par le colonel major Boureima Kéré, chef d’état-major particulier de la présidence pour donner des instructions.

 

Chez le Moogho Naaba pour une sortie de crise

Toujours dans la perspective de prouver qu’il n’est pas responsable des charges retenues contre lui, le Commandant Abdoul Aziz Korogo dit avoir conduit les négociations chez le Moogho Naaba avec les unités loyalistes, pour une sortie de crise. Pour lui, l’accord plombé chez le Moogho Naba portant sur quatre points, rassurait les burkinabè qu’il n’y aura pas d’affrontements. Ces points sont :

– accepter le cantonnement au Camp Naba Koom II ;

– Céder tous les postes de garde dans la ville de Ouagadougou ;

– les forces armées qui entourent la ville de Ouagadougou font reculer les troupes loyalistes de 50 km au début du cantonnement ;

– délai de 72h minimum pour le RSP pour établir le point du matériel en vue du désarmement par la direction du matériel des armées.

Le commandant Abdoul Aziz Korogo a affirmé avoir joint le Général Vagondo Diomandé, chef d’Etat-major particulier à la présidence ivoirienne, pour qu’il exfiltre sa famille. Que pressentiez-vous ? Demande le parquet. La situation du pays commandait qu’on mette sa famille en sécurité.

Pour la défense, c’est très dommage que leur client après tout ce qu’il a fait pour une sortie heureuse de la crise, se retrouve aujourd’hui ici.

Dans la même veine, la partie défense pense que leur protégé n’a rien commis de mal. La preuve selon elle, c’est qu’aucune personne de toutes celles qui ont été auditionnées, n’a dit de mal de leur client. Et le défi est lancé au parquet et aux avocats des parties civiles, s’ils n’y croient pas, de trouver une personne depuis le début de l’audition qui a dit des choses contre leur client.

La séance est suspendue pour reprendre le mardi 6 novembre 2018, à 9h au tribunal militaire de Ouagadougou.

 

Siébou Kansié

ksiebou@gmail.com

libreinfo.net

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