Le parti de Zéphirin Diabré, l’Union pour le progrès et le changement (UPC) , n’a pas obtenu gain de cause devant le Tribunal administratif de Ouagadougou pour la tenue de la réunion de son bureau politique national (BPN) initialement prévu ce samedi 18 février 2023. Le parti avait saisi le tribunal administratif de Ouagadougou en référé contre un communiqué signé du ministre de l’Administration territoriale, Boukaré Zoungrana. Ce communiqué rappelait à l’UPC, les termes d’un autre communiqué No 3 du 30 septembre 2022 prononcé par le capitaine Ibrahim Traoré et qui suspendait les activités politiques y compris les organisations de la société civile.
Par Daouda Kiekieta
C’est aujourd’hui samedi 18 février 2023 que le parti de Zéphirin Diabré, la quatrième force politique du pays suite aux élections de 2020, devait tenir sa session du bureau politique national (BPN).
Cependant, le ministre de l’Administration territoriale, le Colonel Boukaré Zoungrana a rappelé au parti dans un communiqué le 13 février 2023, la suspension des activités politiques signée le 30 septembre 2022 par l’actuel chef de l’Etat, Ibrahim Traoré.
Le parti de Zéphirin Diabré avait trouvé cette décision injuste et il avait saisi le tribunal administratif de Ouagadougou en référé.
Le procès a eu lieu le vendredi 17 février dans l’après-midi, soit à la veille de la rencontre annoncée du BPN.
Devant le tribunal, dès l’entame du procès, l’Agent judiciaire de l’Etat (AJE) monsieur Karfa Gnanou a demandé le rejet de la requête de l’Union pour le progrès et le changement (UPC) parce qu’elle est «non fondée».
Il ajoute qu’ il n’y a pas d’urgence que l’UPC tienne sa session ordinaire ce samedi 18 février 2023. Monsieur Gnanou estime que la lettre du Ministère de l’Administration territoriale n’a pas d’effet décisoire au point d’être attaquée en justice.
Des arguments que les avocats de l’UPC ont rejeté lors des débats, estimant qu’il y a bel et bien urgence dans la mesure où il y a «une volonté manifeste d’atteinte à liberté de l’UPC d’exercer ses activités ».
«Pour qu’un parti politique vive, il faut qu’il tienne ses réunions. Dire à l’UPC de ne pas exercer ses activités, c’est la suspendre », argumente Me Christophe Birba, l’un des avocats du parti.
Les avocats de l’UPC ont indiqué que le communiqué du 30 septembre 2022 suspendant les activités des partis politiques dont fait référence le ministère de l’Administration territoriale dans sa lettre, n’a pas «une existence en droit ».
Pour preuve, ils convoquent l’acte fondamental du Mouvement pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) à son article 25 qui dispose que « les partis politiques se forment librement et exercent leurs activités dans le cadre prévu par la loi ».
Mieux, Me Birba et ses collègues estiment que le MPSR«n’est pas un organe de l’État ni une administration».
À cette affirmation, le tribunal rétorque:« mais c’est le MPSR qui a nommé le ministre de l’administration territoriale non ?».
«Pour nous, il n’y a pas de MPSR au Burkina », martèle Me Birba, ajoutant : « Si vous (le tribunal, ndlr) laissez ça passer, demain le Ministère vous dira de ne plus tenir vos audiences. Après-demain, ce seront les syndicats et les organisations de la société civile ».
Pour sa part, l’AJE, réitère qu’« Il n’y a ni atteinte à la liberté encore moins de l’urgence » dans la tenue de la session ordinaire du bureau politique national de l’UPC.
Après une suspension d’une dizaine de minutes, le tribunal a finalement estimé que « l’atteinte à la liberté fondamentale n’est pas matérialisée dans la lettre du Ministère de l’Administration territoriale, mais dans le communiqué du 30 septembre 2022 dont fait référence la lettre ».
Par conséquent «au regard de son champ d’application qui excède le ressort d’un seul tribunal, la juridiction de céans est matériellement incompétent pour apprécier le dit communiqué pour en déduire une atteinte à une liberté fondamentale» précise la décision du tribunal administratif.
Le tribunal a donc renvoyé« l’UPC à se pourvoir ainsi qu’il avisera». Le tribunal administratif a aussi mis les dépens à sa charge.
«En français facile, cela voudrait dire que la réunion du bureau politique national de l’UPC ne peut pas se tenir (ce samedi 18 février, ndlr)» précise Me Fidèle Louré, l’un des avocats de l’UPC à la sortie de l’audience.
Pour l’Agent judiciaire de l’Etat, Karfa Gnanou, «cela n’est que justice»
«Nous respectons la décision du Tribunal telle que cela été rendue. Tout ce qui nous reste à faire, c’est d’aviser quant à éventuellement d’autres voies de recours » ajoute Me Louré.