Les cours ont repris mardi 5 janvier 2021, dans les établissements publics et privés d’enseignement du Burkina Faso. Avec le rebond de la covid-19, des mesures barrières ont été rappelées aux chefs d’établissements par le ministère de l’Éducation nationale, afin de limiter la propagation du virus dans les écoles. A ce premier jour de la reprise des classes, Libre info a fait le tour de certains lycées et collèges, écoles primaires de la ville de Ouagadougou pour s’imprégner du respect des consignes contre la pandémie. Globalement, l’on retient un difficile respect des mesures barrières par les élèves, surtout le port du masque, la distanciation sociale non respectée à cause des effectifs pléthoriques et des préjugés sur la covid-19 qui serait la maladie des personnes âgées, demeurent toujours chez bon nombre d’élèves.
Par Tatiana Kaboré et Ramata Diallo, stagiaires
A notre arrivée à 10 heures au Lycée mixte de Gounghin, les élèves observaient déjà la pause, la récréation. Certains élèves ne s’empêchent de jouer dans la cour. Un élève pourchasse un autre tenant des gâteaux. En de petits groupes, des discussions se mènent. Ce sont les retrouvailles. Certains portent le cache-nez, d’autres n’en possèdent pas. Pourtant, le ministère de l’Éducation nationale a distribué des cache-nez à presque tous les élèves. La crainte du virus n’est pas la chose la mieux partagée ici.
Du côté des enseignants, le bon exemple est donné. Tous les professeurs aperçus portaient un cache-nez. Dans la vaste cour du lycée, une dizaine de dispositifs de lave-mains munis de savon sont installés à l’entrée de certaines salles de classe. Chaque bâtiment possède au moins un système de lave-mains. Approché pour s’imprégner du niveau de respect des mesures barrières contre la covid-19 dans l’établissement, le censeur du lycée, une dame, ne s’est pas prêtée à nos questions sous prétexte que le proviseur est absent. Mais elle donne instruction de ne pas interroger ni les enseignants, ni les élèves.
‘’Porter le cache-nez et dispenser les cours, nous étouffe et quand nous parlons, les élèves n’entendent pas’’
11 heures. Nous sommes au collège la Salle de Ouagadougou situé au quartier Bilbalogho. Dès l’entrée, on aperçoit une note, une affiche appelant les élèves au port obligatoire des masques. Dans la cour, on y trouve également des dispositifs de lavage des mains.
Interrogé, Frère Hermann Kaboré, proviseur du collège explique toute la difficulté à faire respecter les mesures aux élèves. « On a beau sensibilisé, c’est très compliqué. Et on ne va pas passer tout le temps non plus, à chasser les élèves de la classe parce qu’ils n’ont pas de cache-nez. Tu vas mettre peut-être la moitié dehors. Il y en a qui disent qu’ils n’arrivent pas à suivre les cours avec ça », indique Frère Kaboré.
Il assure avoir reçu la note du ministère de l’Éducation nationale sur les consignes et travaille déjà à leur mise en œuvre. « Il y a des motifs avec le nombre de décès et la recrudescence de la maladie, sur lesquels on peut s’appuyer pour mener la sensibilisation. Le problème, c’est que les enfants ont en tête que cette maladie n’est pas pour eux. J’ai remis aux deux directeurs des études, la note du ministère en leur disant de faire un rappel aux élèves. Et on verra ce que ça va donner demain mercredi. Aujourd’hui à l’entrée, je voyais que beaucoup avaient leur masque mais à la récréation, tout a disparu. », explique le proviseur.
Pour Dramane Kaboré, professeur de SVT au collège, les mesures sont importantes car « elles aident les enfants à éviter la maladie et à mettre leur famille à l’abri.» Il souligne les difficultés que les enseignants endurent en dispensant les cours masqués. « Ce n’est pas facile de porter les cache-nez et dispenser les cours. Ça nous étouffe et quand nous parlons, les élèves n’entendent pas. C’est vraiment compliqué. Mais comme c’est une mesure qui s’applique à tout le monde pour pouvoir éviter la maladie, donc on fait avec. »
Le coronavirus est une maladie très dangereuse pour les personnes âgées de 70 ans et plus
Myriam Diallo, est élève en classe de terminale D1. À midi, à la sortie de la classe, elle a pris le soin de ranger son masque dans son sac. « Je n’arrive pas à porter le cache nez sous le casque. », dit-elle en s’avançant vers sa monture. Pour elle, les mesures pour éviter la maladie est plus de rigueur en famille qu’à l’école.« Quand on arrive à la maison, on enlève les chaussures, car interdit de franchir le salon avec les chaussures. On nous oblige aussi à porter le cache-nez à la maison lorsqu’on est enrhumé pour ne pas contaminer les autres ». Mais à l’école, il y a un tout petit relâchement dit-elle.
Ethane Konseiga, élève en classe de 4e est convaincu que « le coronavirus est une maladie très dangereuse pour les personnes âgées de 70 ans et plus. Le corona prend les enfants mais ce n’est pas trop comme pour les personnes âgées. Pour lutter contre la maladie, il faut utiliser les gels hydro alcooliques, se laver régulièrement les mains, porter le masque quand on sort. On contracte la maladie par la salive, si on est en contact avec une personne infectée. » Des mesures préventives et mode de contamination qu’il a su bien décrire masque dans le sac. « Ça se trouve dans mon sac », nous assure-t-il.
Mahamadi Zongo en classe de terminale D témoigne également que le respect des mesures barrières contre la covid-19 est plus strict à la maison qu’à l’école. « Quand je quitte l’école, arrivé à la maison, je lave les mains avant de toucher quoi que ce soit. A l’école, la distanciation n’est pas totalement respectée. Nous sommes 49 en classe et nous nous asseyons à deux. La distance entre mon voisin et moi ne vaut pas un mètre. »
Augmenter les dispositifs de protection en quantité et en qualité
Ecole primaire de la Patte d’oie « A », il est 15 heures. C’est l’heure de la reprise. Certains élèves devant les classes procèdent au lavage des mains avant de regagner les salles. D’autres, rentrent sans ce geste. La plupart des élèves dans la cour sont sans cache-nez. Les mesures ici, sont plus ou moins respectées par des écoliers. Au sein de l’établissement, les dispositifs de lavage de mains sont pourtant installés.
Selon le directeur de l’école Sambo Bélem, les mesures prises sont importantes et bonnes car elles permettront de protéger les enfants et limiter la propagation du virus. Mais les dispositifs de lave-mains, les masques, le gel et savons sont insuffisants « Les dispositifs sont très insuffisants pour venir à bout de ce mal au niveau scolaire. » Il appelle l’État à maximiser sur les dispositifs de protections tels que la qualité et la quantité des cache-nez et l’augmentation des dispositifs de lavage des mains afin que ces mesures soient respectées.
Madame Nikiema est enseignante de la classe de CM2. Elle trouve les mesures barrières salutaires. Pour elle, le port de masque et le lavage des mains sont peu compliqués pour les enfants car ils ne sont pas habitués. On voit souvent des enfants qui enlèvent la cuvette du dispositif pour recueillir l’eau sale et qui s’agglutinent autour pour se laver les mains: « Avec les enfants, il est vraiment difficile de respecter les mesures barrières, on crie en vain »
Aussi poursuit-elle,« Nous avons un effectif assez pléthorique, les élèves s’asseyent deux deux ou trois trois donc, c’est un peu compliqué de respecter la distanciation. »
« Nous avons 51 élèves par classe. Les masques ont été distribués en début d’année mais les élèves n’apportent pas. Nous avons sensibilisé en vain. Le masque ne me gêne pas trop je m’adapte. Mais, il y a des moments où je suis obligée de l’enlever pour que les enfants puissent bien comprendre ce que je dis. »
Peng Wende Yohanna victoria Soré, élève en classe de CM2, connait bien la maladie à coronavirus.« On a dit que la maladie est contagieuse et épidémique. On contracte la maladie par les mains sales. On a dit de ne pas se serrer les mains, de porter un cache nez, de respecter un mètre de distance et de se laver régulièrement les mains. »
Au Lycée Lagm-taaba de Ouaga 2000 et au collège privé Intelligentia, les dispositifs de lavage sont fonctionnels. Certains élèves dans la cour sont en cache-nez.
Les premiers cas de Coronavirus ont été détectés le 09 mars 2020 à Ouagadougou. Jusqu’à ce jour, le Burkina compte 1 740 cas actifs dont 5 300 guérisons et 86 décès.