Après de longues années de lutte contre l’avancée du désert dans la région du Nord, le combat de Yacouba Sawadogo a définitivement pris fin le dimanche 3 décembre 2023 à Ouahigouya, chef -lieu de la région du Nord, à l’âge de 77 ans. Au jour de son « doua » ( cérémonie musulmane marquant le 3è jour du défunt), libreinfo a recueilli des témoignages sur l’homme qu’on appelait affectueusement le « Champion de la terre ».
Par Zakiss Ouédraogo, correspondant dans le Yatenga
Nous sommes au secteur 15 de Ouahigouya. Il est 7 h 04 mn le mardi 5 décembre 2023. Des hommes, des femmes, des jeunes et des enfants convergent vers le domicile de Yacouba Sawadogo décédé le 3 décembre 2023.
L’événement qui s’y déroule est le « doua » ( cérémonie musulmane généralement organisé au 3è jour du défunt). Ce jour-là, il y a une multitude de personnes toutes affligées et silencieuses pour la plupart.
Les unes prennent place sur des chaises installées pour la circonstance, les autres préfèrent rester debout. Toutes ont leur regard plongé dans le vide. Elles sont venues honorer la mémoire de celui qu’on appelle affectueusement « Yacoub Zaï »
Au cours de ce « doua », les prêches sont autant élogieuses que l’acte historique posé par Yacouba Sawadogo, « l’homme qui arrêta le désert » au bout de 40 ans de lutte acharnée contre le fléau.
Des bénédictions lui sont faites. Des honneurs lui sont rendus. Des témoignages également. C’est ce qui a le moins manqué à ce « doua » revêtu de gloire.
Des témoignages
Souleymane Compaoré, fonctionnaire à la retraite au secteur 1 de Ouahigouya, explique que pour lui, Yacouba Sawadogo est un « homme mondial » à travers ses réalisations qui sont admirables. « C’est vrai qu’il a quitté ce monde mais avant de s’en aller, il a embelli ce même monde. » dit-il.
Même si visiblement, il a du mal à croire au décès de Yacouba Sawadogo, trois jours après, il n’a cesse de reconnaître la grandeur de l’homme : « C’est un grand homme de l’environnement, il a reverdi le désert. De son vivant, je l’ai beaucoup fréquenté. »
Ce qui le réjouit par ailleurs, « c’est que le vieux a préparé la relève avec l’un de ses fils qui a fait l’école de la foresterie. Si d’avantage, il a le soutien de l’État, ses actions vont se perpétuer », a souhaité M. Compaoré.
Le Chef de Tilli, Naba Koom, un village situé à quelques encablures de Ouahigouya, continue de pleurer Yacoub Zai. « C’est notre fils, nous l’avons connu dans ses belles actions de lutte contre l’avancée du désert. C’est à travers ses activités que les habitants de Ouahigouya, du Burkina, de l’Afrique et de l’Europe l’ont connu ».
Le Chef de Tilli ajoute : « Nous l’avons connu également dans le développement et dans la sociabilité. En un mot, c’est un rassembleur. Sa mort va apporter un coup dur mais nous ne pouvons rien contre la volonté de Dieu. Tout ce que Dieu fait est bon. Il a invité tous ses enfants à s’unir et à préserver l’héritage commun qu’il a légué »
Perpétuer les actions du « Champion de la terre »
Mariam Sawadogo, la fille aînée du défunt, explique la dernière volonté de son feu père quant à la gestion de la forêt : « Pour l’héritage de la forêt, ensemble, de commun accord, comme il a lui-même recommandé, nous les filles et fils du vieux, allons travailler comme si le vieux était toujours en vie. »
D’autant plus que selon Mariam, « Papa a travaillé à nous unir avant de quitter ce monde. Nous lui rendons un vibrant hommage car il a honoré son pays à l’extérieur par le biais de ses bonnes actions de lutte contre la désertification. » dit-elle.
« Nous sommes au nombre de 27 enfants du vieux et environ 60 petits fils. Nous allons travailler à perpétuer ses ouvrages », a précisé l’aînée de la famille.
Selon Lookman Savadogo, le fils du défunt Yacouba Sawadogo, « Avant sa mort, le vieux avait déjà tout préparé, il nous disait qu’après sa mort, il faut encourager tous ceux qui ont envie de faire plus que lui. J’étais plus près du vieux, donc, j’ai bénéficié de ses connaissances. Même avant sa mort, je formais les gens et les structures faîtières de l’environnement ».
« Nous allons amplifier ses œuvres, dit-il, en reboisant un grand espace pour en faire une forêt en son nom. » Il informe qu’il a fait une formation de deux ans à l’école nationale des eaux et forêts pour « renchérir mes connaissances en plus de ce que j’ai reçu chez papa. »
L’objectif étant d’apporter une plus value à ce que « mon père faisait », a justifié Lookman Sawadogo.