Depuis le discours du président de la Transition Paul-Henri Damiba le 1er avril 2022 des leaders politiques et de la société civile s’inquiètent pour le respect de la liberté d’opinion. En effet, le président a annoncé la restriction des manifestations à caractère politique et l’interdiction formelle aux civiles d’habiter dans des opérations militaires dans son discours. Des déclarations qui inquiètent plus d’un.
Par Daouda Kiekieta
Le président de la Transition Paul-Henri Damiba a annoncé des mesures dans les jours à venir dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Il s’agit de la création de comités locaux de dialogue pour la restauration de la paix, interdiction formelle aux civils d’habiter ou d’exercer des activités dans des zones d’opérations militaires, restriction des manifestations à caractère associatif ou politiques, lancement d’un audit dans l’administration publique etc.
Cependant, ces mesures sont diversement appréciées chez des acteurs politiques que chez des leaders des organisations de la société civile (OSC).
Selon Nathanaël Ouédraogo, Président de le « Mouvement Démocrate » (MODEM), ces mesures viennent réaffirmer l’engagement des autorités actuelles à lutter pour récupérer l’intégralité du territoire et à prendre en charge les déplacés internes. « Ces engagements réitérés avec ceux de la bonne gouvernance comme l’audit nous paraient être des aspects positifs », explique-t-il.
Dans le même ordre d’idée, Pascal Zaïda, membre de l’Assemblée Législative de Transition (ALT) et porte-parole de la Coordination nationale pour une Transition réussie (CNTR),structure regroupant plusieurs organisations de la société civile (OSC),pense que le discours du président Damiba était attendu par la population qui commençait à perdre l’engouement suscité lors de la prise du pouvoir des militaires le 24 janvier 2022.
Toutefois, il affirme que « le tout n’est pas d’avoir fait un beau discours, il faut joindre l’acte à la parole ».
« Le président est là pour libérer le territoire et je pense qu’il va y arriver avec le soutien de tous les Burkinabè. Il a donné cinq mois et on pourra le juger au terme de ce délai » soutien Anaïs Drabo du Mouvement sauvons le Burkina.
Nathanaël Ouédraogo dit être préoccupé par la décision de restreindre les libertés politiques. « J’ai bien peur parce que depuis un certain temps, on a jeté l’anathème sur les hommes politiques disant qu’ils sont tous responsables de ce qui nous arrive, pire ils sont tous pourris donc ils ne pourront pas participer à la refondation ou à la restauration », a-t-il signifié.
Pour lui, cette mesure vise uniquement à exclure une partie de la société dans la gestion du pays. Pourtant, estime M. Ouédraogo, «Le politique et le militaire sont deux poumons d’un même corps qu’est notre nation. Les deux devront travailler à égalité parce qu’il y a parmi les politiques et les militaires, des bons et des mauvais ».
Les membres de la société civile craignent que les mesures de restrictions des libertés ne soient un prétexte pour empiéter sur la liberté d’expression et d’opinion. « Quant aux restrictions des libertés, je pense que les contours de cette mesure restent pour le moment ambiguë. Il faudra faire aussi attention pour ne pas aller jusqu’à empiéter la liberté d’opinion » s’inquiète Roland Bayala, membre de l’Assemblée législative de Transition et porte-parole de la Coalition des Patriotes Africains (COPA/BF).
Selon les propos du porte-parole de la COPA BF, les militaires ne doivent pas oublier que c’est à travers les manifestations qu’ils sont arrivés au pouvoir. « ce sont des gens qui ont manifesté pour que les militaires viennent au pouvoir », a-t-il ajouté.