Les huit experts internationaux ont rendu leurs travaux d’audit du fichier électoral burkinabè. Après une semaine de travail, les membres du comité d’experts ont conclu « un fichier électoral constamment amélioré qui ne peut faire l’économie d’une refonte, compte tenu de ses limites ». Libre info vous propose les forces et les faiblesses du fichier électoral relevées par les experts.
Au regard des constats et des résultats des analyses, il ressort que le fichier électoral soumis à l’audit présente des forces et des faiblesses.
AU TITRE DES FORCES, IL CONVIENT DE CITER :
- La révision exceptionnelle organisée, par la CENI, du 1er janvier au 17 juillet 2020 a permis à 2 377 601 personnes de s’enrôler ;
- La CENI a garanti l’unicité de chaque électeur, en procédant à un important dédoublonnage des enrôlements multiples, avec 1 425 725 enregistrements identifiés et supprimés, sur la totalité de la base de données de 2012 à 2020 ;
- Ces opérations ont permis de garantir le caractère inclusif du fichier électoral burkinabè, qui atteint aujourd’hui 6 490 926 électeurs ;
- Le rythme des révisions exceptionnelles, depuis 2012, a permis à la CENI de conduire des opérations d’envergure régulières, tout en améliorant constamment la qualité des données du fichier ;
- La CENI a été confrontée à un grand nombre de défis liés à la situation sécuritaire, à la pandémie de COVID 19 et à des retards logistiques ; elle a su s’adapter pour permettre aux électeurs de 329 des 351 communes (94%) et de 7 694 des 9 299 villages (83%) du Burkina Faso de participer à l’enrôlement ;
- La complétude des données des électeurs présente un niveau qualitatif élevé, s’agissant notamment de la collecte des données biométriques ;
- La CENI a fait preuve de transparence et de professionnalisme tout au long des opérations de révision et d’audit du fichier électoral, renforçant ainsi la confiance des parties prenantes ;
- Le cadre juridique burkinabè, relatif à l’enrôlement des électeurs, est cohérent et lisible, avec un Code électoral unique, complet et accessible à tous les citoyens ;
- L’introduction de l’inscription des Burkinabè de l’étranger est une ouverture significative pour permettre à la diaspora de faire valoir ses droits civiques ;
- L’existence d’un contentieux pré-juridictionnel, permet à la CENI de traiter une grande partie du contentieux des listes, limitant ainsi l’engorgement des tribunaux.
AU TITRE DES FAIBLESSES, IL CONVIENT DE CITER :
- Le cadre juridique burkinabè ne permet à la CENI que de constituer son fichier électoral au travers de révisions annuelles et exceptionnelles, sans pouvoir à ce jour travailler sur des listes permanentes, notamment en s’appuyant sur un état civil efficient et sur un système d’identification unique ;
- Structurellement dépendante de la publication de décrets qui n’abordent pas l’entièreté d’un cycle électoral, la CENI doit organiser in fine l’enrôlement dans un délai très court, engendrant des chevauchements d’activités ;
- La nature du système de révision entraîne deux faiblesses majeures : l’accumulation non maîtrisée des électeurs décédés, estimés dans le fichier électoral entre 280 000 et 320 000 personnes, et l’empilement de données désuètes issues des révisions de 2012, 2014 et 2015 ;
- Le taux d’enrôlement, situé autour de 63,2% de la population cible, est particulièrement marqué par une sous-représentativité chronique des jeunes et des femmes, depuis 2014 ;
- La CENI n’étant pas constitutionnalisée, elle ne dispose donc pas d’un pouvoir réglementaire élargi ; de fait, le cadre juridique présente une instabilité récurrente, avec douze modifications successives du Code électoral depuis 2001, dont certaines sont intervenues après les opérations d’enrôlement des électeurs ;
- La CENI n’a pas mis en place un système de conservation numérique des pièces présentées à l’appui de l’enrôlement des électeurs, ne facilitant pas des vérifications ultérieures ;
- L’inexistence de justificatifs de domicile affecte le contentieux, entraînant le rejet quasi systématique de toute requête visant l’inscription d’électeurs en dehors de leur circonscription.