Les 30 et 31 octobre 2014, le Burkina Faso est passé à une phase tournante de son histoire avec l’avènement de l’insurrection populaire. Comme un seul homme, le peuple s’est dressé debout et a dit « non » à la modification de la constitution pour un nouveau mandat de Blaise Compaoré. Sept ans plus tard, dans les rues de Ouagadougou, les citoyens donnent leurs appréciations sur l’Etat du Burkina après ce bouleversement.
Propos recueillis par André-Martin Bado
Le 30 octobre 2014, une insurrection populaire mettait fin aux 27 ans de pouvoir de Blaise Compaoré. Sept ans plus tard, Aboubacar Tiemtoré, agent immobilier, dit ne pas regretter d’avoir participé aux évènements du 30 et 31 octobre 2014. Il estime que, s’il y a lieu de reprendre, il n’hésitera pas. « Tant qu’il aura un gouvernement qui va vouloir tripatouiller la constitution, nous allons sortir pour dire non ».
M. Tiemtoré trouve que les acquis de l’insurrection sont importants « aujourd’hui, nous sommes satisfaits du changement après l’insurrection. Il faut le dire la justice est indépendante, on peut dit que c’est une justice pour tous. Il y a quand même une nette avancée en termes d’infrastructure ».
Harouna Ganamé, employé de commerce, soutient également que l’insurrection a été bénéfique « grâce à l’insurrection nous avons la liberté de donner notre point de vue sur la gestion du pouvoir sans pour autant être inquiété. Nous sommes parvenus à avoir une justice libre et transparente. Des dossiers qu’autrefois on disait brulants notamment l’assassinat de Thomas Sankara voilà que les accusés sont en train d’être jugés ».
Pour M. Ganamé la situation sécuritaire « ne doit pas nous faire regretter notre insurrection. Je pense qu’avec cette situation nous devons nous mettre ensemble pour vaincre l’ennemie commun qui est le terrorisme ».
Pour certains citoyens l’heure est au regret
Serge Bayala, secrétaire général du cadre « deux heures pour Kamita » pense que cette insurrection populaire au Burkina Faso n’est pas un sacrifice mérité « quand on voit ce qu’est devenu les résultats ou la performance de la gouvernance et le sort tragique et humiliant qu’on réserve aux martyrs et aux blessés qui ont marqué notre histoire, montre que ce n’est pas un sacrifice mérité », Serge Bayala dit si c’était à rependre il n’allait plus le faire.
« Aujourd’hui c’est sans regret que vous entendez une personne qui a été directement ou indirectement affectée soit choquée par l’absence d’une gouvernance de qualité soucieuse du sang versé des martyrs. Ils vous diront avec aisance tant déchaînés qu’ils ne feront plus jamais cela. Je dis pour ce qui me concerne, j’ai juré personnellement, de ne plus jamais marcher pour un homme politique. Parce que nous avons le sentiment d’avoir été abusés, d’avoir été des personnes qui ont toutes donné pour la patrie qui ont été oubliées par ceux qui incarnent cette république-là» a regretté, le kamite
Quant à Lazé Zerbo, restaurateur, il explique que sept ans plus tard, il est déçu. « Je regrette amèrement d’avoir participé à l’insurrection parce que, juste après l’insurrection on a cru à un changement immédiat et radical. On a pensé que l’accès à l’emploi serait facile et la corruption allait finir. Mais c’est navrant de regarder impuissamment ce gouvernement qui a su profiter ».
Lazé pense qu’ils ont été manipulés « Nous étions tous jeunes et aujourd’hui j’ai l’impression que nous avons été manipulés parce que tout simplement ceux qui sont au pouvoir ne sont que des anciens collaborateurs de Blaise Compaoré qui voulaient chasser leur ami et moi personnellement je ne vais plus sortir pour une quelconque insurrection ». Pour lui, il n’y a pas eu d’acquis après l’insurrection bien au contraire les choses vont de mal en pis notamment la dégradation des conditions sécuritaires.
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