Le vendredi 17 novembre 2023, la Cour de justice de la CEDEAO a débouté l’opposant sénégalais Ousmane Sonko, quelque temps après à Dakar, la Cour suprême a renvoyé le dossier du candidat déclaré à la présidentielle de 2024 au tribunal d’instance de Dakar pour être jugé. Que faut-il comprendre de ces deux décisions? L’avocat burkinabè, Me Guy Hervé Kam, membre du collectif des avocats qui défend Ousmane Sonko donne des explications à Libreinfo.net dans un entretien en ligne.
Entretien réalisé en ligne
Libreinfo.net: La Cour de justice de la CEDEAO a débouté votre client, Ousmane Sonko, le vendredi 17 novembre 2023 à Abuja au Nigéria, est ce que vous vous attendiez à une décision contraire ?
Me Guy Hervé Kam: Bien entendu nous nous attendions à une décision contraire. Mais je dois dire que compte tenue de ce que nous avons vu à l’audience, la surprise n’est pas grande quant à la décision rendue par la Cour de Justice de la CEDEAO. Ceci étant, il faut dire que le recours devant cette juridiction n’avait véritablement pas d’impact sur la réinscription ou non de M. Sonko sur les listes électorales. La procédure concernait la violation des droits fondamentaux de M. Sonko et la dissolution du parti PASTEF.
Libreinfo.net: Dans la même journée, la Cour suprême au Sénégal a renvoyé le dossier devant le tribunal d’instance de Dakar pour être jugé, est ce que finalement, on n’assiste pas à un scénario où Ousmane Sonko ne sera pas candidat ?
Me Guy Hervé Kam: Il faut déjà rappeler que le Président du Tribunal d’Instance de Ziguinchor avait ordonné le 12 octobre 2023, la réintégration de M. Sonko sur les listes électorales. C’est cette décision que la Cour suprême du Sénégal a cassée hier. Elle a renvoyé l’affaire de la radiation devant le Président du tribunal d’instance de Dakar. La cour suprême nous remet donc dans la situation antérieure à la décision de Ziguinchor et tout reste encore possible.
Libreinfo.net: La décision de la Cour suprême remet en cause celle du tribunal de Ziguinchor qui demandait la réinscription du nom de votre client sur les listes électorales, est ce que cela veut dire que la Cour suprême ne reconnaît pas le verdict de Ziguinchor ?
Me Guy Hervé Kam: En réalité depuis maintenant plus de deux ans, on assiste à la volonté du régime en place d’éliminer un adversaire politique. Toutes ces procédures que vous voyez ne sont en réalité que l’habillage juridique d’un dessein formé depuis longtemps pour exclure du processus électoral le favori incontestable.
Libreinfo.net: Vous avez qualifié la décision de la Cour suprême le vendredi de « décision irrégulière », pourquoi ?
Me Guy Hervé Kam: La Cour est composée par 3 ou 5 juges. À l’audience, il y’avait 5 juges qui ont assisté à tout le débat. Puis au moment du délibéré il n’y en avait plus que 4. Le Président a dit que l’un des juges s’est retiré. Finalement pour donner la décision, la cour était composée seulement de 4 juges alors que s’agissant de la même audience, la composition devait être la même.
Libreinfo.net: Quelles sont désormais les perspectives qui restent à la défense de Ousmane Sonko ?
Me Guy Hervé Kam: Il y’a toujours une perspective juridique qui reste, celle de faire annuler la radiation de M. Sonko et obtenir sa réinscription. Lors de mon séjour j’ai pu rendre visite à Ousmane Sonko, je peux vous assurer qu’il est très serein et déterminer à faire triompher la Justice et l’Etat de droit. Certes, le chemin pour y parvenir est encore long et périlleux mais nous sommes engagés et nous gardons espoir que rien ne pourra arrêter la vérité de voir jour.