Le procès de l’assassinat du père de la révolution Burkinabè, Thomas Sankara et ses douze compagnons continue le mercredi 24 novembre 2021 à Ouagadougou. Ce jour, l’ex ministre de la sécurité de Roch Kaboré, Ousséni Compaoré était à la barre en tant que témoin des évènements tragiques du 15 octobre 1987. Il était au commandement de la gendarmerie nationale au moment des faits.
Par Rama Diallo, stagiaire
Ousséni Compaoré était à la barre pour donner sa version des faits des évènements tragiques du 15 octobre. Il occupait le commandement de la gendarmerie en 1987. L’ex ministre de la sécurité est colonel-major à la retraite. Il a passé 23 années aux nations unies.
Lancien patron de la sécurité sous le mandat de Roch Kaboré, raconte ce qu’il sait à la barre. Il dit qu’il était chez lui le 15 octobre lorsque sa femme est venue lui dire qu’il y avait des tirs au conseil.
Il a pris alors le véhicule de cette celle- ci pour se rendre à la gendarmerie. En route il a croisé un commando qui quittait chez Blaise Compaoré et qui partait chez lui pour l’éliminer.
Heureusement pour lui, le soldat ne l’a pas reconnu, explique le témoin. Il a pu s’échapper ainsi. Arrivé à la gendarmerie lorsqu’il a vu le chauffeur de Blaise dans le véhicule du président Thomas Sankara. Il a compris que le président était mort.
Concernant la tension entre Thomas Sankara et Blaise Compaoré, le témoin indique que les rumeurs selon lesquelles Blaise a fait le coup d’Etat et a installé Thomas ont contribués à alimenter la crise entre les deux hommes.
D’après le colonel-major à la retraite, seul Blaise pouvait organiser un coup d’Etat. « L’organisation des services de sécurité ne fonctionnait pas normalement. C’est Blaise qui avait l’essentiel et la réalité du pouvoir sécuritaire, parce qu’il était commandant du Centre national d’entraînement Commando (CNEC) et de la première région militaire.
Blaise Compaoré était donc celui qui avait les moyens de perpétrer un coup de force pour récupérer le pouvoir, car il commandait même le corps qui assurait la sécurité du président Sankara», raconte Ousseni Compaoré..
Le témoin raconte également que quelques jours avant les évènements, il est allé rencontrer Blaise Compaoré, pour lui demander de régler les tensions entre lui et Thomas Sankara par voie politique car si le sang coulait, personne n’en sortirait gagnant. Et Blaise lui avait dit qu’il a compris mais malgré cela les évènements tragiques du 15 octobre sont tout de même arrivés.
Le président du tribunal, Urbain Meda lui a demandé s’il avait été torturé comme les autres personnes. Le témoin a répondu qu’il a été bien traité. Il a fait environ huit mois de détention. Il confie qu’il était en contact avec sa famille.
A une question du parquet, qui voulait savoir s’il était possible d’arrêter Thomas Sankara au lieu de le tuer, Ousséni Compaoré répond : «il était difficile d’imaginer quelqu’un aller arrêter Thomas et le mettre en prison. La réaction populaire était inévitable. C’est pourquoi la seule issue pour prendre le pouvoir, était son élimination physique. Thomas savait que Blaise préparait un coup contre lui. Il a même dit que si Blaise voulait faire un coup d’Etat cela était imparable ».
L’ex ministre continue son récit « quand j’entends des gens dire que c’est une surprise. Je dis non il n’y a pas eu de surprise. Quand on regarde le déroulement des faits il n’y a pas de doute. Tout a été préparé. La boucle était bouclée et l’appareil sécuritaire verrouillé ».
Selon le colonel-major, des informations parvenaient que le président Ivoirien, Houphouët Boigny, a dit à Jean Claude Kamboulé membre l’opposition burkinabè en Côte d’ivoire qui voulait mettre fin à la révolution, de laisser tomber pour lui. Parce qu’il avait trouvé quelqu’un pour le faire. Et cette personne c’est Blaise Compaoré.
Contre tout attente le témoin dit à la barre que « Gilbert Diendéré n’est pas méchant. Il est plutôt passif. Je ne crois pas qu’il soit capable de décider de tuer Thomas Sankara sans un mentor derrière. Gilbert est un bon militaire. Il ne va pas désobéir à un ordre. Il peut exécuter un ordre ».
Le parquet estime que les mesures prises par Diendéré après le coup d’Etat en installant un dispositif autour du conseil éait pour parer à toute attaque. Ousséni Compaoré répond que « tout chef de corps qui entend des tirs va organiser la défense de sa caserne avant de comprendre ce qui se passe. La gendarmerie a mis en place aussi la défense de sa caserne ». Donc pour le témoin c’est tout à fait normal qu’un chef de corps organise sa défense lorsqu’il entend des tirs.
Me Olivier Badolo, a lu un passage d’un document des services secrets Français. Dans ce passage il est dit que le témoin a fait des aveux concernant le complot de 20h du 15 octobre lorsqu’il était en détention.
L’ex ministre signifie que durant sa détention, il n’a pas été entendu et n’a jamais fait ces déclarations. Il rejette ces déclarations qu’il qualifie de mensongères. Il a même suggéré au président du tribunal de faire appel aux services de renseignement français qui ont rédigé ces déclarations à venir s’expliquer.