Sortie du Premier ministre sur le 11-Décembre : Velléité révisionniste de l’histoire du Burkina Faso ? (Cheick Innocent Bahan)

Ceci est une tribune de Cheick Innocent parvenue à la rédaction de libreinfo.net. Elle porte sur la dernière sortie du Premier ministre Apollinaire Kyélem de Tambèla sur le choix du 11-Décembre comme date de célébration de la fête nationale du Burkina.

Le 02 décembre dernier avait lieu la traditionnelle montée des couleurs à la primature. Depuis un certain temps, c’est le canal utilisé par le Premier ministre Me Apollinaire Kyelem de Tambèla pour faire de grandes déclarations. Cette fois, il était question de la prochaine célébration de la fête nationale de l’indépendance du 11-Décembre, alors que la date exacte de l’indépendance est le 5 août. Le Premier ministre en a profité pour donner un cours sur l’histoire du Burkina Faso depuis la genèse de sa création jusqu’à nos jours. Dans son discours, il va expressément insinuer que l’ensemble du territoire de l’ex- Haute-Volta devenu Burkina Faso était appelé le Cercle mossi .Voici le passage : << A la fin des conquêtes coloniales, le territoire actuel du Burkina Faso auquel avait été donné le nom Cercle du mossi fut intégré à la Colonie du Soudan français créée le 18 août 1890. Avant donc la conquête du Cercle du mossi qui se fera à partir de 1986. Le décret d’octobre 1902 rattachant le territoire du Cercle du mossi à la Senegambie-Niger. Avec le décret du 18 octobre 1904, réorganisant le gouvernement général de l’Afrique occidentale française , le Cercle du mossi sera rattaché à la Colonie du Haut Sénégal Niger avec Bamako pour capitale. Un décret du 1er mars 1919 détachait le territoire du Cercle du mossi pour former une colonie à part avec pour nom Haute-Volta >>.

Cette déclaration a choqué plus d’un Burkinabè ayant un minimum de connaissances sur l’histoire de notre cher pays. On est encore plus choqué lorsque l’auteur de ces propos, bien que juriste, est un fin connaisseur de cette même histoire. Dans son livre intitulé Thomas Sankara et la révolution, une expérience de développement autocentré ; la première partie ‘’de la Haute-Volta au Burkina Faso’’ explique cette genèse. D’ailleurs, une bonne partie de son discours en est tiré. Cependant, en aucun moment, il n’a dit que le territoire actuel, y compris Say et Tera aujourd’hui au Niger, s’appelait le Cercle du mossi.

Ainsi, nous nous sommes intéressé à sa bibliographie. Etant nous-même passionné d’histoire, nous avons eu l’occasion de consulter un bon nombre en tout cas ceux des auteurs burkinabè :

-Légendes et Histoire des peuples du Burkina Faso de Balima Salfo Albert ;

-Histoire politique du Burkina Faso 1919-2000 de Kaboré Roger Bila ;

-Histoire de l’Afrique noire d’hier à demain de Ki-Zerbo Joseph ;

Burkina Faso cent ans d’histoire de 1895 -1995 sous la direction de Madiaga Yenouyaba Georges et Nao Oumarou ;

-Comment perdre le pouvoir de Guirma Frédéric.

Pour aller plus loin, nous avons consulté les plus récents :

-La Haute Volta d’hier à aujourd’hui de Palm Domba Jean-Marc ;

-Histoire de la Haute Volta de 1897 à 1947 de Somé Magloire et Banhoro Yacouba.

Aucun d’entre eux ne mentionne que la colonie de Haute-Volta était le Cercle du mossi.

Enfin, on ne peut parler de l’histoire de la Haute-Volta au Burkina Faso sans parler de Maurice Delafosse, Michel Izard, Hazard Benoit, Kambou-Ferrand Jeanne-Marie.

Aucun d’entre eux n’a laissé planer une quelconque ambigüité sur le fait que ce soit le Cercle du mossi qui soit devenu la colonie de Haute-Vola aujourd’hui Burkina Faso

La question donc que l’on est en droit de se poser de façon légitime est la suivante : qu’est-ce qui a donc amené le Premier ministre à faire une telle déclaration en toute connaissance de cause ? Une rapide rectification voire explication s’impose de plein droit. Il est important que nos historiens donnent un peu plus de la voix lorsque ces genres de discours sont tenus.