Par Kalifara Sere,Administrateur civil
Mon coup de cœur ce dimanche matin a été d’écouter 50 mn durant l’Imam Mahmoud Dicko sur les antennes de Radio Omega. Face au staccato des questions de l’intervieweur qui, manifestement, tenait à faire trébucher le leader moral du M5/FRP, le sieur Dicko a fait étalage d’une rare connaissance politique et sociale de son pays en même temps que d’une pondération tactique évidente contenue dans des formules délibérément elliptiques.
A entendre l’imam dérouler de façon placide et méthodique son argumentaire, l’on ne pouvait s’empêcher de faire la comparaison avec un certain … IBK habitué des discours désarticulés, stylistiquement peu soutenus et bégayés dans une tonalité monocorde.
Je ne fais pas ici le prodada de l’Imam Dicko, qui au demeurant, s’est clairement défendu de prétentions nabales. Mon intention est plutôt d’indiquer que l’Imam Dicko est le digne représentant d’une intelligentsia émergente au Mali et dans tout l’espace sahélo saharien. Cette intelligentsia n’est pas formatée aux normes occidentales et est soumise à une rhétorique anti islamique primaire. L’Etat post colonial africain subsaharien est coincé entre des règles et une étiquette propres aux Etats judéo chrétiens d’une part et des œillades vers des Etats propagateurs de la da’wa (appel à l’Islam) d’autre part.
Le discours de Dicko est élaboré pour créditer la possibilité d’un Etat nouveau, laïc à majorité historiquement musulmane désireuse de demeurer sur un versant modéré tel qu’enseigné par les meilleures références en Islam. Cet Etat nouveau n’a pas plus peur de la charia (parce qu’elle ne touche que subsidiairement à l’état des personnes (mariage, décès, enregistrement des naissances..) que de l’encyclique Populorum Progressio.
Cependant, dans cet Etat, le corset républicain christiano-islamo-animiste suggère que :les dirigeants qui sont aptes à se faire élire reconnaissent, le cas échéant, leurs limites évidentes plutôt que de s’enfermer dans une incurie suicidaire pour tous ; le dialogue intra Etat soit une religion collective qui s’affranchit des tutelles extérieures ;les charges publiques imposent une vertu minimale à tous et en tout temps ;Etc.
Mahmoud Dicko n’est peut-être pas un saint homme, mais il est un partisan éclairé de son époque et il ne cache pas ses ambitions de contribuer aux mutations vers un Mali nouveau (se ressourçant dans le Mali-Bâ et en rupture avec le Mali-Fitini actuel). Sans jamais les indexer, il a la finesse d’esprit de renvoyer les chefs d’Etat de la CEDEAO aux fondamentaux d’un dialogue complexe. La stupidité des recommandations de l’instance suprême de la CEDEAO devrait rencontrer l’indulgence des peuples de la CEDEAO et des maliens. Le peuple malien effraye beaucoup de satrapes des pays voisins depuis l’inénarrable Conde (dont le 3è mandat relève de la psycho pathologie aigue sévère) au spectaculaire Ouattara (dont les tours de passe-passe n’illusionnent que lui-même), sans oublier Issoufou (anxieux pour l’élection tranquille de son ami Bazoum Mohamed). Quant à notre président Rock Kabore, sa discrétion en cette affaire est salutaire. Cependant, ses actions et itinéraires sont d’une ressemblance si étrange avec IBK qu’il devrait activement œuvrer à puiser des ressources au plus profond de lui afin de s’éloigner au plus vite du profil du susnommé IBK.
Enfin, je note que le must de la subtilité chez Dicko est de dire à IBK : si tu crois que tu as fait le maximum que tu pouvais et que des maliens peuvent faire mieux que toi, alors c’est toi qui devrait en tirer les conséquences. Ce message très fort émanant de l’un des anciens marabouts de IBK vaut son pesant d’or.