Au Burkina, la carrière de Pissy, située au côté ouest de la capitale, Ouagadougou a plus de trente ans. Ce lieu est réputé pour les dures conditions de travail mais aussi les conditions de vie des gens qui s’y trouvent. C’est un lieu qui affiche la « galère» mais aussi l’ardeur pour la survie. Pour s’imprégner des réalités que vivent les concasseurs en particulier des personnes âgées sur le site Libreinfo.net a fait une immersion à la carrière de granite de Pissy, le 16 juillet 2021.
En pleine capitale burkinabè̀, dans le quartier Pissy, côté ouest de Ouagadougou, derrière les murs de la Société Nationale Burkinabè d’Hydrocarbure (SONABHY), une immense carrière de pierre attire les populations. Au Burkina, la carrière de Pissy existe depuis plus de trois décennies, des personnes de tous âges. Des personnes entre autres des veuves, des orphelins et de nombreuses personnes du troisième âge y travaillent quotidiennement. Ils creusent, cassent, concassent, transportent le granite dans l’espoir d’avoir leur pitance quotidienne.
A l’arrivée sur le site à 15 heures, nous sommes accueillis par le son cadencé des pioches et des marteaux frappant la pierre et l’odeur des brûlures de plastique ou de pneus au fond de la carrière, témoigne de désespoir ambiant de ceux qui y travaillent.
Dans cette carrière de granite de Pissy, des femmes et des hommes du troisième âge travaillent, dans des conditions surréelles de l’aube au crépuscule dans l’espoir d’avoir la pitance quotidienne. C’est le quotidien de Rasmané Nana, 63 ans, que nous avons rencontré. Habillé d’un tee-shirt et d’un simple pantalon, le sexagénaire visiblement ne portait ni de chaussure de sécurité, ni de casque adapté. Mais il est conscient de la dangerosité́ de ce travail.
« Le travail est très dur. Mais on n’a pas le choix, il faut bien chercher son pain quotidien. Souvent on a des blessures, des accidents de travail. J’ai même eu le pouce déboité c’est les risque du métier » lâche-t-il. Selon Rasmané Nana, les accidentés se font soigner au dispensaire du site. Il fait savoir que le dispensaire a été́ initié par les travailleurs de la carrière avant d’avoir de l’aide des associations.
Pour M. Nana, le métier de concasseur permet de survivre, à peine. « Je gagne, 1250f par jour. Vous voyez ce n’est pas facile. S’il faut prendre nourrir la famille, mettre les enfants à école, vous comprenez que nous souffrons ici ». Il explique qu’il est sur le site depuis 1993. Il profite de l’occasion pour inviter le gouvernement à jeter un regard sur leur situation surtout, les personnes âgées.
Les femmes ne sont pas en reste
Plus loin, nous rencontrons une femme âgée de 62 ans, Habibou Kiemtoré, dont une trentaine d’années passées à la carrière. Elle est la responsable des femmes du site. Mme Kiemtoré nous confie qu’elle à un revenu de 2000 f à 3000 f par jour « moi j’ai des jeunes qui travaillent avec moi ce qui fait que je gagne un peu. Grâce à ce métier, J’ai pu scolariser mes sept enfants ». Elle explique que le site à une école « nous avons initié́ une école pour que nos enfants puissent avoir une bonne éducation, aujourd’hui cette école marche bien grâce aux associations ».
Habibou Kiemtoré félicite le président de l’Assemblée nationale, Alassane Bala Sankandé qui est venu leur rendre visite. « Le président de l’Assemblé est venu nous donner de l’espoir. Il nous a donnés des sacs de riz, des hectares de terre pour cultiver. Nous attendons qu’ils débroussent, les champs et nous allons, aller cultiver » a-t-elle dit. Elle ajoute que le président l’Assemblée nationale, leur a offert une machine capable de faire remonter les gravats de la crevasse. Il a également promit donner des bourses à leurs enfants durant son mandat.
Carrière de Pissy,le dernier recours pour la vie
A la carrière de granite de Pissy, on y va quand on n’a nulle part où aller. C’est un lieu de dernier recours, quand on a tout perdu. C’est le cas de Mariam Sawadogo, 81 ans et veuve. Assise à même le sol sous un hangar, la poussière et la sueur étaient confondues à son visage. Yaaba (c’est comme ça qu’on l’appelle grande mère en langue mooré) tenait à la main une petite barre de fer, qu’elle utilise pour taper sur les blocs de pierre assembler autour d’elle, pour les rendre en petit morceaux. Elle ne semble pas sentir l’odeur de la fumée qui envahi l’atmosphère et cela depuis 20 ans elle est exposée au danger.
Elle explique qu’elle a quitté́ la Côte d’Ivoire après la mort de son premier mari « quand je suis arrivée au pays, je me suis remariée. Par la suite ce denier est décédé. Je ne savais plus où aller, qui va s’occuper de moi et mes enfants. Il fallait sortir se débrouiller pour nourrir la famille. C’est pour cela, trois ans après le décès de mon époux, je suis venue ici ».
« Je veux laisser ce travail, c’est difficile », dit-elle. « Je veux qu’on m’aide, je veux vendre du charbon de bois devant ma porte ».
Selon Mariam Sawadogo, les populations environnantes se plaignent de l’exploitation de la carrière, en raison des pneus brulés qui sont utilisés dans l’explosion de la roche et qui polluent l’air. « C’est la ville qui est venue nous trouver ici. S’ils veulent qu’on parte, qu’ils nous trouvent quelque chose à faire pour subvenir aux besoins de la famille » a dit Yaaba. Le Burkina pourrait se servir de la carrière de Pissy autrement et redonner l’espoir à ceux qui y travaillent malgré les réalités non reluisantes.
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