L’affaire Norbert Zongo qui dure depuis 25 ans a connu moult péripéties et a tenu le pays en ébullition. Retour sur certaines étapes de ce dossier.
Dans l’après-midi du 13 décembre 1998, la nouvelle s’est propagée comme une traînée de poudre. Norbert Zongo et 3 de ses compagnons sont tués et brûlés dans les encablures de Sapouy, le chef-lieu de la province de Ziro.
Le lendemain matin, les étudiants ont convergé vers la maison du journaliste défunt pour, disent-ils, présenter leurs condoléances. Après la maison mortuaire et à la morgue de l’hôpital Yalgado, la vague déferlante gagne les établissements situés au centre- ville.
Les forces de l’ordre se déploient au rond-point des Nations-Unis. Elles échangent avec les manifestants et finissent par libérer le passage.
Élèves, étudiants et sans culottes prennent d’assaut l’avenue Kwamé Nkrumah et s’emprennent au siège du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), le parti au pouvoir. Un bus est brûlé et le soir un des dignitaires du CDP, Simon Compaoré, pendant le journal télévisé de 20 heures à la RTB/Télévision tient des propos peu amères. Il avait dit que les auteurs de ces actes de vandalisme n’échapperont pas à la rigueur de la loi.
Ce qui va provoquer le courroux des manifestants le jour de l’enterrement. Une marée humaine quitte la morgue et converge vers le cimetière de Gounghin sous une forte escorte des forces de sécurité. C’est l’hystérie mais les consignes sont strictes.
Malgré la montée de l’adrénaline, la sécurité doit maîtriser ses nerfs. Mais avant, un homme politique et homme de presse avait souhaité qu’on envoie les cercueils à la présidence. Ce qui va rencontrer le refus des autres membres du collectif.
A Gounghin, les discours prennent le temps. Ce qui a l’avantage d’émousser un tant soit peu les ardeurs. Du retour du cimetière les symboles du pouvoir Compaoré sont pris à partie. Le Collectif contre l’impunité invite ses militants le 3 janvier 1999 à la Bourse du Travail. Le jour -j très tôt le matin, les environs sont cernés par les éléments des forces de l’ordre. Tout le centre-ville est assailli par la police.
La coordination du Collectif qui trouve refuge à la cathédrale de l’Immaculée Conception est délogé par les gaz lacrymogènes. Les membres arrêtés, parmi lequel le professeur Joseph Ki-Zerbo, sont libérés dans l’après- midi. Une longue bataille s’engage pour que la lumière soit faite sur le quadruple meurtre de Sapouy entre le pouvoir et le mouvement « trop c’est trop ».
Collège des sages et commission d’enquête
Dans la foulée, le président Blaise Compaoré après un discours d’apaisement le 21 mai 1999, signe un décret le 1er juin de la même année qui met en place un collège des sages.
En 45 jours, les personnalités composées d’anciens chefs d’Etat, les religieux et les coutumiers déposent un rapport qui fait le diagnostic et fait des propositions sur la crise qui mine le Burkina Faso dont l’accélérateur a été le crime de Sapouy. Monseigneur Anselme Sanou a présidé ce collège des sages.
Le pouvoir met également en place une Commission d’enquête indépendante composée des parties prenantes de la crise pour interroger des centaines de personnes proches du dossier. Cette commission dirigée par feu le magistrat Kassoum Kambou va désigner 6 suspects sérieux qui étaient tous militaires en service au régiment de sécurité présidentielle (RSP).
En 2000, une autre commission des réformes institutionnelles et politiques est mise en place. L’une des conclusions de ses travaux a été la limitation du mandat présidentiel. L’article 37 à partir de cette réforme autorisait un mandat de 5 ans renouvelable une fois.
Les défenseurs de l’affaire Norbert Zongo traîne l’Etat du Burkina Faso à la Cour Africaine de Droit de l’homme et des peuples basée à Arusha en Tanzanie. La cour accuse le Burkina Faso de n’avoir pas fait grand-chose pour identifier les auteurs du meurtre du directeur de publication de l’Indépendant.
Mais auparavant en Août 2006, un non- lieu avait été prononcé sur le dossier instruit par le juge Wenceslas Ilboudo. Il y a eu moult péripéties dans les instances internationales des droits humains.
C’est à la faveur de la Transition de 2015 que le dossier a été réouvert. L’instruction est finie. Il reste la procédure d’extradition de François Compaoré le principal suspect dans le dossier et le procès.
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