Le gouvernement burkinabè à travers le ministre du Développement industriel, Serge Poda, a annoncé, le mardi 19 décembre 2023, la relance de l’entreprise de production de boissons BRAFASO (Brasseries du Faso). C’était lors de l’ouverture des travaux du deuxième Conseil d’administration du secteur ministériel (CASEM). Seulement que depuis 2013, la relance de cette usine est toujours restée à l’étape de la promesse.
Par Daouda Kiekieta
La question de la réouverture de l’usine de production de boissons dénommée Les Brasseries du Faso (BRAFASO) refait surface. Et pour cause. Le gouvernement de la Transition vient d’en faire la promesse. Après une visite de l’usine en mai 2023, le ministre du Développement industriel, Serge Poda promet la relance de BRAFASO en 2024.
«Au cours de cette année 2024, les principales actions du département seront orientées entre autres vers : la relance des entreprises industrielles notamment la minoterie du Faso, BRAFASO, la Société de Transformation des Fruits et Légumes etc.», a déclaré le ministre Serge Poda à l’ouverture du deuxième CASEM de son département.
Cette déclaration suscite une lueur d’espoir au sein de la population. Au-delà de cet espoir, c’est un grand défi que le gouvernement s’est lancé.
Depuis la gouvernance Compaoré à celle de Roch Kaboré en passant par la Transition de 2015, des promesses ont été faites mais les lignes n’ont pas bougé
L’usine est toujours fermée. Inaugurée en octobre 2004, BRAFASO, située dans la commune de Komsilga, aux encablures sud de Ouagadougou, n’a fonctionné que quatre ans à travers la section limonaderie uniquement.
L’infrastructure est bâtie sur environ 100 hectares, cette unité combinait plusieurs sections dont l’eau eaux minérales, de sucrerie, de bière. Elle est considérée comme la plus grande brasserie de la sous région ouest africaine, avec un capacité de production de 20 000 bouteilles d’eau minérale et de sucrerie par heure.
La seule section de bière est composée de 25 tanks pour la fermentation de 160 000 litres chacun, de 5 silos de stockage de matières dont trois 3 de 600 tonnes pour le malt et 2 de 350 tonnes chacun respectivement pour le riz et le maïs, qui constituent les matières premières nécessaires à la fabrication de bière. L’entreprise a un capacité devraient absorber 600 emplois directs et plus de 7 500 indirects.
Des problèmes financiers sur fond judiciaire
Des difficultés financières avaient compromis la continuité de son exploitation. Ces obstacles financiers avaient débouché sur un feuilleton judiciaire.
Sur appel de ses principaux créanciers, les biens de la société avaient été mis en liquidation par décision N°038 du 12 août 2011 de la Cour d’appel de Ouagadougou.
Le 13 septembre 2011, le Premier ministre d’alors Luc Adolphe Tiao avait effectué une visite dans les locaux de l’usine à Komsilga. Cette visite a été suivie d’effets.
Trois mois après, soit le 23 décembre 2011, l’Etat burkinabè et la société dirigé par son PDG Mohamed Pangueba Sogli signent un accord à travers lequel l’Etat s’est engagé à racheter toutes les dettes de BRAFASO SA telles qu’elles ont été produites par les créanciers dans le cadre de la procédure de liquidation mise en sursis d’exécution.
Le 11 janvier 2012, le ministre de l’Economie en son temps annonce en Conseil des ministres l’apurement des créances de la société qui s’élevaient à plus de 20 milliards FCFA. La liquidation avait été évitée de justesse.
Ce dénouement heureux n’a cependant pas permis la relance de l’usine. Des lignes budgétaires ont été déclinées, des plans de réouverture ont été tracés, mais c’est le statut quo.
Des promesses jamais concrétisées
En 2014, la prévision budgétaire présentée aux députés par la ministre déléguée au Budget d’alors Clotilde Ki, avait inscrit 2 milliards FCFA au titre de la relance de BRAFASO.
La Transition de 2015 avait suscité aussi un espoir de sauvetage de cette première entreprise privée, détenue par un national de production de boissons gazeuses et sucrées.
A l’issue d’un conseil des ministres délocalisé à Komsilga en 2015, le gouvernement de Transition d’alors avait visité cette usine en cessation de travail.
La promesse avait été faite par le président Michel Kafando pour la relance de BRAFASO. Un plan de relance avait été adopté en Conseil des ministres en janvier 2015.
Sur le plan économique et social, les enjeux qui accompagnent cette entreprise sont importants. Les études avaient estimé une contribution au titre des taxes et recettes cumulées pour le trésor public à plus de 18 milliards de FCFA au cours des cinq premières années de son fonctionnement.
Les lignes n’ont toujours pas bougé
Après la Transition, le pouvoir du président Roch Kaboré avait également exprimé sa volonté de réouvrir l’usine. C’est ainsi qu’en fin 2016, le budget de 2017 avait prévu la réouverture de certaines unités industrielles telles BRAFASO.
Dans le même sens, le Référentiel national pour le développement (RND 2021-2025) rappelait, dans son Schéma de transformation structurelle, la nécessité de relancer BRAFASO et les autres industries en souffrance.
Le 29 juin 2020, l’on apprenait du ministre du Commerce d’alors, Harouna Kaboré que le dossier « BRAFASO » a connu son épilogue et l’Etat est devenu juridiquement propriété de la société.
Un planning pour une ouverture avait été annoncé pour au plus tard juillet–août de la même année.
Avec l’arrivée du capitaine Ibrahim Traoré au pouvoir, la relance de l’usine est à nouveau annoncée. Le lundi 22 mai 2023, le Ministre du Développement Industriel, du Commerce, de l’Artisanat et des Petites et Moyennes Entreprises, Serge Gnaniodem PODA a visité BRAFASO.
Au cours de cette visite, il avait affirmé que des actions avaient déjà été entreprises par son ministère afin de mettre les bouchées doubles pour pouvoir relancer les activités de cette entreprise nationale.
Une volonté qu’il a réaffirmée le 19 décembre 2023 à l’ouverture des travaux du deuxième Conseil d’administration du secteur ministériel (CASEM).
Reste à savoir jusqu’où ce gouvernement pourra aller au regard des péripéties qu’a connues Les Brasseries du Faso depuis la fermeture en 2008 ? Les autorités, déjà engagées sur plusieurs fronts économique et sécuritaire, ont-elles, les moyens de leur politique ?