Il y’a un an (1er et 2 janvier 2019) que Yirgou, localité située dans la commune de Barsalogho, région du Centre Nord était sous les projecteurs des médias. L’on apprenait avec consternation l’horreur qui s’y passait. Un conflit qui a éclaté entre les communautés a fait des dizaines de morts et des déplacés pour la plupart vers la commune de Barsalogho. Un an après quel est l’état de la situation ? (Justice, social, éducation etc.). www.libreinfo.net est allé à la rencontre du Maire de Barsalogho Abdoulaye Pafadnam.
Propos recueillis par Loura Soumana,stagiaire
Quelle est la situation des déplacés de Yirgou installés à Barsalogho ?
Leur nombre a quelque peu évolué avec des déplacés venus de Kelbo et de Dablo et de Namissiguima. Au jour d’aujourd’hui, ils sont au nombre de 1952 et on peut dire que leur situation s’est stabilisée parce qu’aussi bien au niveau sanitaire, alimentaire et psychologique, la prise en charge est régulière et permanente. C’est vrai qu’on ne peut pas couvrir tous leurs besoins mais l’essentiel est fait.
Comment se passe la cohabitation entre les habitants et déplacés ?
Ces relations ne sont pas excellentes pour la simple raison qu’il y a une juxtaposition de crises. Après Yirgou, il y a eu d’autres évènements qui ont effrité le vivre-ensemble au sein des communautés. Pire, même au sein des communautés, les gens se méfient les uns des autres. Mais j’ose espérer que grâce à l’action du gouvernement à travers le HCRUN (haut conseil pour la réconciliation et l’unité nationale) la situation va s’améliorer. Il y en a déjà eu un certain nombre de rencontres auxquelles j’ai moi-même participé. Il faut dire que n’eussent été les évènements de Yirgou Peuls et Mossi vivaient en parfaite symbiose. La preuve, les villages portent les mêmes noms auxquels on ajoute le nom de la communauté qui y habite. Exemple Nogo-Mossi, Nogo-Peul etc.
Comment envisagez-vous la justice dans ces conditions ?
Nous désirons la justice et pour cela, nous appelons chacun des protagonistes à se fier aux décisions de justice.
Le procureur dit que d’après la brigade de Gendarmerie de Barsalogho,certains conseillers ont déclaré ne pas pouvoir répondre aux convocations du juge d’instruction compte tenu du fait qu’eux mêmes sont recherchés par les individus armés non identifiés,que pensez-vous?
Je n’ai pas connaissance. Et puis aujourd’hui, il est impossible d’avoir accès à des localités comme Foubé à cause de la dangerosité de la route qui n’est plus praticable à cause d’engins explosifs qui y ont été enfouis si bien que les conseillers n’arrivent pas à participer à certains conseils municipaux.
Quelles sont vos préoccupations à l’heure actuelle ?
Après Yirgou, beaucoup d’autres évènements malheureux se sont produits si bien que dans l’ensemble de la commune on enregistre plus de 100 000 déplacés provenant de tout le septentrion (Arbinba, Foubé, Gasseleki etc.) ce qui causent beaucoup de défis à relever. L’autre sérieux problème auquel nous sommes confrontés est qu’à cause de l’insécurité, plus de la moitié de la population dans la commune de Barsalogho n’ont semé encore moins récolté. Les déplacements massifs ont en effet commencé après l’attaque de Sabo qui a fait plusieurs morts et tous les habitants des villages environnants se sont déplacés. Ils sont aujourd’hui estimés à près de 60 000 personnes hors des camps formels mais qui comme ceux logés dans les camps, bénéficient de l’aide humanitaire des différentes ONG mais aussi des familles. Leurs tentes s’étendent à perte de vue. D’où l’importance de ne pas oublier la situation des familles hôtes. Ce sont encore les ONG qui ont pallié le déficit en termes d’offres de soins parce que tous agents de santé avaient fui à cause de l’insécurité.
Qu’en est-il de la situation des élèves ?
L’année dernière, nous avions pu ouvrir des écoles que ce soit à Foubé ou à Barsalogho. Mais cette année, à cause de la dégradation de la situation sécuritaire, les enseignants ont dû partir. Il a fallu décembre pour que la rentrée soit vraiment effective. Deux classes du CP1 avaient été ouvertes à cet effet. Ceux qui sont au secondaire ont quant à eux été intégrés dans les établissements à Barsalogho. Pour les non scolarisés, il a été mis sur pied des « écoles du berger » pour leur apprendre des rudiments de l’élevage mais aussi l’alphabétisation en vue de leur permettre d’intégrer le cycle normal après trois ans de formation. Il y a même un jardin pour les tout-petits.
Quels sont les différents organismes engagés sur le terrain ?
Il y a d’abord le gouvernement par le biais du CONASUR qui s’occupe de la prise en charge alimentaire, de la protection et de la gestion. Il y a des administrateurs qui sont là et qui répondent à leurs préoccupations. En plus de l’Etat, il y a le HCR, Plan Burkina, SOS Sahel, Médecins Sans Frontières (MSF), OXFAM, HELP sans oublier les particuliers. Mais comme on pouvait s’attendre, l’élan de solidarité n’est plus le même qu’au début à cause du fait qu’on enregistre des déplacés ailleurs qu’à Barsalogho. C’est le comité départemental de secours d’urgence qui assure le suivi permanent des déplacés.