Les travailleurs du Burkina célèbrent ce 1er mai, la fête du travail. Cette date est commémorée chaque année et reste un moment important pour le monde du travail. Nous avons rencontré, Louis Sawadogo, le porte-parole de l’Union d’action syndicale (UAS)/Oubritenga, par ailleurs Secrétaire général de la CGT-B/Oubritenga. Les échanges ont porté sur l’historique du 1er mai, les activités commémoratives de cette année et les défis auxquels font face les travailleurs.
Propos recueillis par Alassane Ouédraogo, Correspondant Oubritenga
Libreinfo.net (LI) : Les travailleurs du Burkina comme ceux du monde entier célèbrent chaque année le 1ermai. Que représente cette date pour vous travailleurs?
Louis Sawadogo (LS) : Pour les travailleurs, cette date est d’une importance capitale parce que c’est un cadre pour les travailleurs de se retrouver, de se pencher sur leurs préoccupations. Si on revient sur l’historique, c’est en 1886 à Chicago que des travailleurs ont été réprimés parce qu’ils réclamaient 8 heures de travail, 8 heures de sommeil, 8 heures de loisir. Et pour cela, des travailleurs ont été pendus, ont été tués. Les travailleurs ont donc payé un lourd tribut dans cette lutte. Pour se souvenir d’abord de cette lutte, les travailleurs se sont organisés dans les différents pays. Et aujourd’hui à travers le monde entier les gens commémorent d’une manière générale cette date. À partir de cette date, les travailleurs ont pris conscience que s’ils s’organisent, ils auront des acquis.
LI : Aujourd’hui, le 1er mai doit-il être célébré comme une fête, une commémoration ou comment ?
LS : Pour nous syndicalistes, nous évitons le terme fête, parce qu’au regard de l’historique même de cette date, on ne peut pas parler de fête. Nous étions dans la révolution industrielle au 19è siècle où le patronat avait vraiment une résistance farouche à ce que les travailleurs aient des acquis. Il va de soi que la bourgeoisie transforme cette commémoration en fête à l’instar des autres dates historiques comme le 8 mars.
LI: Après plusieurs années de commémoration, quels sont les acquis au compte du 1er mai ?
LS : Le fait de pouvoir commémorer le 1ermai, est d’abord un acquis d’une lutte. Puisqu’il y a une journée dédiée aux travailleurs, au travail, on se penche à l’occasion sur nos préoccupations. J’avais parlé de 8 heures de travail, 8 heures de sommeil, 8 heures de loisir. Parce qu’il faut rappeler qu’avant cela, les ouvriers n’avaient pas de jours de repos, même pas les dimanches. Ce que nous avons aujourd’hui en termes de temps de travail, ce que nous avons à travers tous les pays en termes de liberté de manifestation, de liberté de se syndiquer dans nos lieux de travail, on peut les mettre à l’actif du 1er mai.
LI : Présentement, quels sont les défis auxquels les syndicats du Burkina font face ?
LS : Les défis au Burkina sont énormes. Nous avons la question de l’IUTS qui est un défi. Déjà, quand nous prenons le code du travail en lui-même, il a des insuffisances. Je prends par exemple les contrats à durée déterminée. Le code du travail dit que le patron peut renouveler le contrat à volonté, N fois jusqu’à ce qu’on considère que c’est exagéré. Le renouvellement des contrats n’est pas plafonné, ça c’est un problème surtout pour les travailleurs du privé. Depuis 2012, les travailleurs du privé n’ont pas eu d’augmentation de salaire. C’est un défi pour nous parce que nous estimons que s’il y a évolution au niveau du public, il faut qu’il y ait un changement au niveau du privé.
LI : Vous avez parlé de la question de l’IUTS, est-ce qu’on peut affirmer que les syndicats ont perdu la lutte face au gouvernement ?
LS : La question de l’IUTS n’est pas une bataille perdue. Parce que nous l’avions dit à plusieurs reprises, cette lutte sera dure, longue et même éprouvante. C’est pour dire qu’à tout moment la question va revenir. Nous allons inscrire cela dans nos plateformes, dans nos cahiers de doléances. Nous allons toujours discuter avec le gouvernement.
LI : Qu’est ce qui est au menu de la commémoration du 1er mai cette année?
LS : A Ouagadougou, il est prévu une marche en direction du siège de la CNSS, après il y aura un meeting à la bourse du travail. Au niveau local, à Ziniaré, il est prévu une assemblée générale où nous allons discuter de notre cahier de doléances. Un cahier de doléances que nous avons déposé depuis 2018. Il y a eu des échanges au niveau du Haut-commissariat, il y a des réponses. Nous allons examiner ces réponses. Nous allons aussi échanger entre nous sur la situation nationale du monde du travail et de la société d’une manière générale. Parce que, comme vous le savez, il y a eu des augmentations tous azimuts des produits de première nécessité.
LI: Pour terminer, quel est votre mot à l’endroit des travailleurs de la province ?
LS : C’est de leur dire qu’il est très nécessaire, pour toute couche fondamentale de s’organiser, de se former pour que nous puissions poursuivre la lutte. Parce que la lutte est permanente. Les acquis que nous avons engrangés peuvent être retirés. On a vu tout récemment les augmentations du prix du carburant et du gaz. C’est pour nous interpeler que nous devons veiller, nous devons lutter.