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Législatives 2020 : 09 femmes sur 127 députés, qu’a-t-il apporté le quota genre ?

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Les députés de la huitième législature ont été officiellement installés le 28 décembre 2020 à l’Assemblée nationale. C’est une assemblée à visage « masculin ». Parmi les 127 députés, il y a seulement neuf femmes dont huit du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), parti au pouvoir et une du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP). Même l’Union pour le progrès et le changement (UPC) de Zephirin Diabré qui avait l’habitude d’avoir des femmes élues en son sein, n’a pu obtenir un siège dans son parti. Idem pour le Nouveau temps pour la démocratie (NTD), parti de Vincent Dabilgou, qui a obtenu 13 députés. On est tenté de poser la question de savoir : pourquoi le combat pour l’application du quota genre n’a pas prospéré ? En tout cas, les résultats sont contraires aux attentes et à la spéculation.

Par Siébou Kansié

C’est par appel suivi d’acclamation que les 127 députés de la 8e législature ont été officiellement installés à l’Assemblée nationale le 28 décembre 2020. Alassane Bala Sakandé a été par la suite, reconduit comme président de l’institution parlementaire burkinabè à l’issue des votes.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que, c’est un parlement à visage fortement masculin. De 17 femmes à la 7e législature, l’on passe à neuf femmes après les législatives du 22 novembre 2020, qui consacrent la huitième législature. Exhaustivement, ce sont : Madiara Sagnon ; Juliette Yabré Kongo ; Florence Beouindé ; Workya Rouamba ; Reine Bertille Kaboubie ; Hadja Fatimata Sanon ; Elise Ilboudo, Hélène Marie Laurence Ilboudo, toutes du MPP et Maïmouna Ouédraogo du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), parti de l’ex-président Blaise Compaoré.

Quand le quota genre accouche d’une souris

Pour encourager la représentativité des femmes dans les sphères de prise de décisions jugée très faible, la loi sur le quota genre a été adoptée le 16 avril 2009 et révisée le 22 janvier 2020. Elle exige 30% de femmes sur les listes électorales au Burkina Faso. Elle vise à lutter contre les inégalités à l’égard des femmes et à promouvoir leur pleine participation à la vie politique, avait expliqué Roch Kaboré, président de l’Assemblée nationale à l’époque.

Au niveau international, l’agenda 2030 des Nations-Unies, promeut l’égalité des sexes, l’inclusion sociale et l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Cependant, avec toutes ces « faveurs » du législateur et plus de dix ans après l’adoption de cette loi, les femmes qui représentent 51,7% de la population selon l’institut national de la statistique et de la démographie (recensement 2020), répondent difficilement à l’appel. Le quota genre a accouché d’une souris, car les femmes restent toujours à la traine, au point où l’on se demande si réellement le problème se situe au niveau des lois.

Assemblée nationale Quota genre
Zalissa Koumare,Secretaire générale du NTD

Pour Zalissa Koumaré, secrétaire générale nationale du NTD, le problème est bien au niveau de la loi sur le quota genre qui comporte des insuffisances. Elle prévoit seulement des sanctions positives que les partis politiques ne sont pas obligés de respecter. « La dernière révision a plutôt parlé de sanction positive, comme si c’était un bonus pour les partis qui auraient respecter cette loi. Et un bonus, on n’est pas obligé de l’accepter. »

Elle fait remarquer que beaucoup de partis, même ceux qui en avaient la possibilité, n’ont pas respecté ce qu’a prévu la loi. Elle indique que « les femmes qui ont pu être tête de liste, ce n’est pas du fait de la loi, c’est du fait de leur détermination et de leur dynamisme. »

Pour elle, quand on parle de loi, il faut que les acteurs s’entendent et que chacun puisse jouer sa partition. Malheureusement ici, poursuit-elle, « ce n’est pas ce que nous constatons. La loi a été votée et je me pose vraiment la question de savoir, est ce que les partis en interne ont pu vraiment s’asseoir pour discuter franchement de cette loi et de son application. Je ne crois pas que ça été fait. », doute-t-elle.

Martine Yabré, est la coordinatrice de l’Union africaine des ONGs de développement (UAOD). Elle est très engagée dans le combat pour la prise en compte des femmes dans les différentes instances décisionnelles du pays. Appréciant globalement l’existence de la loi sur le quota genre, elle pense que les insuffisances se situent au niveau des sanctions à l’encontre des partis politiques qui se dérobent de cette loi. Au sein du parti majoritaire au primaire, dit-elle, il y a des femmes qui ont battu des hommes mais à l’arrivée, ces derniers étaient mieux positionnés qu’elles sur les listes de candidature.

Les élections législatives ont été un échec pour la démocratie burkinabé, parce qu’une bonne « démocratie qui se veut être une référence, doit pouvoir être inclusive, participative de tous les sexes et de tous les âges. C’est important et c’est un indicateur de bonne gouvernance. C’est déplorable que nous régressions de cette manière. », déplore Mme Yabré.

D’autres facteurs qui ont joué en défaveur des femmes aux législatives

Au-delà des insuffisances de la loi sur le quota genre, il y a d’autres facteurs qui n’ont pas été à l’avantage de l’élection significative des femmes aux législatives du 22 novembre 2020.Parmi ces éléments, il y a la question de l’accompagnement des femmes qui ont pu se positionner dans l’adversité sur les listes. Elles n’ont pas eu « de traitement de faveur. Elles ont compéti à égalité, à arme égale avec les hommes. », relève Mme Koumaré.

A cela, s’ajoute certaines pratiques sur le terrain qui « défient même les principes du processus électoral. Vous avez dû constater qu’il y a eu quelques soucis à des endroits qui n’ont pas permis aux femme d’aller jusqu’au bout de ces échéances ».Ces éléments selon Mme Koumaré, interpellent l’ensemble des acteurs à s’asseoir « pour voir finalement » ce qu’il y a lieu de faire par rapport à la loi sur le quota genre.

Lire : Législatives : Le NTD de Vincent Dabilgou demande l’annulation du vote dans la commune de Banh pour suspicion de fraude

« Continuer avec la loi quota genre telle qu’elle se présente aujourd’hui, peut être très difficile. Car les objectifs en mon sens, risquent de ne pas être atteints parce que la loi quota genre, s’adresse à des femmes déjà engagées, des femmes qui sont dans des partis politiques et qui, au moment de la constitution des listes, demandent à être positionnées. Ce sont des femmes déjà engagées alors que celles qui ont des grandes capacités de leadership mais, qui ne sont pas engagées en politiques, sont plus nombreuses. Donc, il faut trouver un mécanisme pour susciter en elles, l’engagement et ce travail peut être fait à travers une politique au niveau du ministère en charge de la promotion de la femme. », commente la secrétaire générale nationale du NTD, parti de Vincent Dabilgou.

Pour Zalissa Koumare, les ONGs (Organisation non gouvernementale) qui évoluent dans ce domaine, devraient s’y atteler. Elle cite des structures comme « l’IGD, CGD, NDI, qui prennent déjà des femmes engagées en politique pour les accompagner, les amener à être plus efficaces, à être bien positionnées, ainsi de suite. »

Pour y parvenir, il faut déjà ouvrir la brèche et travailler à susciter l’engagement des femmes. Il faut identifier les femmes cadres, très professionnelles dans les bureaux, dans l’administration publique, dans le privé, « qui veulent s’engager, mais qui ne savent pas comment le faire et quelle est la procédure, quel est le processus, qui veulent s’engager mais qui ont peur. », selon Mme Koumaré.

 

Assemblée nationale quota genre
Martine Yabre Coordinatrice UAOD Burkina Faso

Pour encourager le respect de cette loi, il faut, ajoute Martine Yabré, « rejeter les listes des partis qui ne respectent pas les 30% de femmes sur listes électorales comme prévu. C’est à ce prix que la loi sera respectée. »

Mme Koumaré embouche la même trompette en proposant que l’on revienne sur « la sanction négative parce que la dernière révision a plutôt parlé de sanction positive comme si c’était un bonus pour les partis qui auraient respecter cette loi. », estime-t-elle

Il est nécessaire de revoir les sanctions de la loi sur le quota genre pour qu’elles soient plus contraignantes, miser sur la sensibilisation des femmes à s’impliquer en politique, entre autres, et ce n’est pas tout. La coordinatrice de l’UAOD qui observe l’insuffisance de solidarité entre les femmes, les appelle à être solidaires entre elles.

Car c’est ensemble que les femmes pourront s’imposer dans une société où la femme est vue comme celle qui doit rester à la maison pour s’occuper de la famille. Et quand elle commence à se mettre en politique, tout le monde s’élève contre elle. Aujourd’hui, les choses ont changé, la femme comme l’homme doit avoir les mêmes opportunités. Mme Yabré conclut en exhortant les parents à bien veiller sur l’éducation de leurs enfants, à être à la fois le conseiller, le formateur et l’encadreur pour que l’enfant puisse bien évoluer.

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