L’université Thomas Sankara a été délocalisée depuis 2020 sur un nouveau site plus grand et bien aménagé. Des étudiants logent au sein de ladite université. Notre reporter s’est rendu sur les lieux pour constater les conditions d’hébergement et de travail ainsi que le vécu des étudiants de ce nouveau campus universitaire.
Par Rama Diallo
L’université Thomas Sankara est l’une des universités les plus grandes du Burkina Faso. Le nouveau site de ce campus est fonctionnel depuis 2020.
Dans l’après-midi de ce 7 octobre 2022, j’arrive aux portes de son campus. De la voie bitumée jusqu’à l’entrée de l’Université Thomas Sankara, j’ai vu passer trois bus transportant visiblement des étudiants. A l’intérieur du campus, je dénombre 7 autres bus en stationnement.
Je constate qu’au sein de l’université, il n’y a pas grand monde. Certainement parce que beaucoup d’étudiants n’ont pas encore commencé les cours. La plupart d’entre eux….vont reprendre le chemin du campus le 11octobre prochain.
Certains viendront pour composer à la session des épreuves de rattrapage de l’année écoulée ; d’autres, pour commencer les enseignements de la nouvelle année, tout simplement.
Des quatre bâtiments de logements que j’ai pu compter dans l’enceinte de l’Université Thomas Sankara, seul un est fonctionnel et va recevoir des étudiants. Les trois autres sont fermés pour le moment pour des travaux de réhabilitation.
Des deux restaurants construits sur le site de l’université, un seul est, visiblement, fonctionnel..
Mauvaise qualité de la nourriture du restaurant universitaire et manque de produits à l’infirmerie
En me dirigeant vers la cité, j’ai rencontré un étudiant, en train de réviser ses cours, qui m’a dit être en deuxième année de Sciences économiques et de gestion (SEG). Cet étudiant qui ne veut pas que son nom soit cité, donne son appréciation sur la restauration sur le campus : « Malgré le fait que nous ne sommes pas nombreux, la nourriture ne suffit pas. Hier, par exemple, la nourriture est finie à 17h. Ils sont allés préparer rapidement des coquillettes pour compléter ; mais, ça aussi, c’était difficile à manger parce que c’était trop salé. Je n’ai donc pas pu manger ;ma chance, mes « colocataire » ont pu avoir de la nourriture et ont accepté de partager leurs plats avec moi».
Une étudiante, Yasmine Ouédraogo, se plaint de certains plats du restaurant : «Tu prends le « dêguê » (NDLR : bouillie à base de farine de petit mil et de lait) à 17h, et à 18h le « dêguê » commence à se fermenter ; L’année passée, on a publiée dans le groupe « WhatsApp » de la cité une sauce à base d’arachide. La personne avait pris la sauce au restaurant à 17 h et à 18h cette sauce, en fermentation, avait commencé à dégager des bulles, comme si elle était sur un feu. »
Selon un autre étudiant, pour être sûr d’avoir à manger à midi, certains d’entre eux sont obligés d’aller faire le rang dès le matin, à partir de 8h.
« Ils ont instauré un système d’achat du ticket de restaurant avec le téléphone. Tu peux passer 5 minutes sans parvenir à scanner ton passeport à cause des difficultés de connexion au réseau, peu disponible ici. Et quand tu regardes le rang devant le restaurant, c’est une longue file…c’est décourageant…»
Cet autre étudiant, dans l’anonymat, déplore aussi le système de fonctionnement de l’infirmerie. Selon lui, l’infirmerie s’ouvre à 8 h, ferme à 14h pour ne rouvrir ensuite qu’à 19h. «Quand tu vas là-bas, c’est pour te faire consulter et puis c’est tout.. Sinon, même paracétamol, il n’y en a pas ! »
« Un jour, s’indigne l’étudiant, une fille est tombée ici, autour de 15h ; ils ont appelé l’ambulance qui n’est arrivée qu’autour de 17h-18h.»,
Le calvaire des étudiants usagers de bus
Sous un apatam, deux étudiantes sont assises et sont en train d’étudier. Elles se présentent à moi : Ahoua Diallo, deuxième année en Sciences économiques et de gestion et Ouédraogo Yassine étudiante en première année de droit.
Pour la reprise des cours du 3 octobre 2022, Mlle Yasmine Ouédraogo me raconte s’être rendue à l’arrêt de bus devant l’hôpital Yalgado à 6h20. C’est après 12h qu’elle a pu avoir un bus. Mlle Ahoua Diallo, quant à elle, m’affirme que c’est à 11h qu’elle a pu avoir un bus. D’après les deux étudiantes, c’est trouver un bus pour se rendre à l’université qui pose problème ; sinon, si c’est pour rentrer à Ouagadougou, les bus sont disponibles.
Drissa Barry, étudiant en deuxième année en droit, vit, lui, à Saaba. Il me dit d’emprunter le bus chaque jour. Sauf lorsqu’il doit composer. Il dit rester dormir alors en cité chez un ami. Parce que, de Saaba, il lui est difficile d’avoir un bus très tôt le matin pour se rendre à l’Université Thomas Sankara.
Il raconte : « L’année passée, je pouvais me rendre à l’arrêt à 7h et avoir un bus à 11h. Actuellement, ça va ; mais dès que les cours vont commencer normalement, le calvaire va reprendre. Souvent le bus arrive tôt mais il est déjà plein. Il faut attendre le suivant et espérer qu’il ne soit pas aussi plein. ».
Problème de logement pour la promotion 2020
Les nouveaux étudiants retenus pour habiter à la cité de l’Université Thomas Sankara sont hébergés pour une durée maximale de deux ans. Ceux de la première promotion 2020 sont au terme de leur séjour et doivent céder la place aux nouveaux.
Les trois bâtiments de la cité ont été fermés. Pour les étudiants de la première promotion 2020, c’est une manière de les chasser de la cité.
Une étudiante témoigne : « Moi, je suis de la promotion 2020, raconte un étudiant qui veut garder l’anonymat. « Et nous sommes nombreux dans cette situation. Nous savons que nous sommes en fin de séjour à la cité. Nous sommes allés négocier avec l’administration pour rester encore quelques jours, le temps de finir nos examens avant de quitter nos chambres.
Mais l’administration n’a pas accepté notre demande. Ils sont venus nous dire qu’ils veulent réparer les toilettes bouchées des trois bâtiments.
Depuis le 3 octobre 2022, pour nous obliger à partir, ils ont coupé l’électricité et ramassé les matelas dans les trois bâtiments. Actuellement, nous dormons à même le sol dans l’un des bâtiments malgré l’interdiction de l’administration. On n’a pas le choix.
Moi, je viens du quartier Zogona de Ouagadougou ; c’est difficile pour moi de faire la navette chaque jour, surtout que je dois composer à partir du 11 octobre prochain. » Elle ajoute que le seul bâtiment ouvert, c’est pour ceux qui ne sont pas en fin de « mandat. »
L’apprenante se demande également pourquoi l’administration attend la rentrée pour réparer les toilettes bouchées alors qu’elle pouvait effectuer les travaux pendant les vacances. Le seul bâtiment ouvert actuellement ne peut pas contenir les étudiants retenus pour la cité, selon le témoignage de certains d’entre eux.