La route de l’or du Burkina Faso vers le Togo est confirmée par l’expert burkinabè en sécurité, Mahamoudou Sawadogo. Le 27 août 2022, lors d’un panel sur l’autonomie stratégique dans un contexte géopolitique en pleine mutation, organisé à Ouagadougou par la société burkinabè de Géopolitique, il a révélé que le Togo a ouvert des comptoirs à Dubaï aux Emirats Arabes Unis, pour vendre l’or essentiellement provenant du Burkina Faso.
Par Nicolas Bazié
Les terroristes sévissent au Burkina Faso, et l’or du pays coule à foison vers le Togo, grâce à des revendeurs Togolais qui écoulent le métal jaune hors de leur territoire. C’est du moins la révélation de Mahamoudou Sawadogo, expert en sécurité et ancien officier de la sécurité.
« Le Togo n’a aucune mine d’or, mais aujourd’hui des citoyens de ce pays ont ouvert des comptoirs à Dubaï et ils vendent 36% de l’or burkinabè.
Nous (Burkina Faso) aussi, au temps de la crise ivoirienne, étions premiers pays exportateurs du cacao… », a déclaré monsieur Sawadogo le 27 août dernier, lors d’un panel animé par la Société burkinabè de géopolitique.
Il intervenait sur les pistes de diversification de la coopération sécuritaire régionale et bilatérale : avantages, risques et leviers.
Contacté après par Libreinfo.net, l’expert en sécurité a tenu à préciser que ce n’est pas le Togo en tant qu’Etat qui revend l’or du Burkina mais des revendeurs togolais en majorité qui le font à Dubaï aux Emirats Arabes Unis.
Etant donné que les groupes armés contrôlent la majorité des mines artisanales de la région de l’Est du Burkina, poursuit monsieur Sawadogo, ils extraient l’or et le revendent facilement à des commerçants burkinabè et Togolais qui, eux aussi, le payent à bon prix.
Sawadogo explique que cette pratique dure depuis 2018, donc quatre ans maintenant. « Depuis que les groupes armés ont pris le contrôle des mines d’or de la région de l’Est, ils ont créé des couloirs, des conforts qui leur permettent de fluidifier leur économie grise et qui part depuis la région du Sahel jusqu’à la région de l’Est », a-t-il dit.
Une pratique qui porte un coup sur l’économie burkinabè. Selon Mahamoudou Sawadogo l’Etat entre 15, 20 ou 30 milliards francs CFA environ par an.
Cependant, le gouvernement de la Transition a décidé le 27 avril 2022 de la fermeture des sites d’orpaillages. Malgré tout l’ancien securocrate, estime que cela ne peut pas changer les choses.
« Ce n’est pas la fermeture des mines qui va résoudre le problème. Bien au contraire, elle va accentuer le problème parce que nous ne contrôlons pas ces mines. Le mieux c’est de prendre le contrôle de ces mines et de faire en sorte qu’elles soient sous notre contrôle. Ce sont quelques 3 millions de jeunes qui sont dans l’orpaillage artisanal. Une fois donc les sites fermés, ils seront au chômage. C’est pourquoi il faut faire attention ».
En 2014, l’ONG Public Eye dénonçait aussi l’importation, en Suisse de plusieurs tonnes d’or du Togo, pays n’ayant pourtant pas de mines industrielles sur son territoire. L’or est en fait produit dans les mines du Nord et de l’Ouest du Burkina Faso.
Selon des chercheurs, malgré les efforts déployés par le pays et par la coopération transfrontalière en matière de lutte contre le terrorisme, l’Etat burkinabé n’arrive pas à empêcher les groupes armés terroristes d’extraire et de commercialiser illégalement cet or.