Le procès du putsch manqué de septembre 2015 reprend ce 7 janvier 2019 au tribunal militaire de Ouagadougou avec la suite d’audition du général de gendarmerie, Djibril Yipinè Bassolé. L’édito de Libreinfo.net, a marqué un arrêt sur la nécessité de ce procès car jusque-là, le commanditaire du putsch n’est pas connu après le passage du cerveau présumé, le général Gilbert Diendéré et d’une quatre-vingtaine de coaccusés.
Mais qui a fait le coup d’état du 16 septembre 2015 ? L’on n’aura pas la réponse à cette question. L’audition du Général Gilbert Diendéré, le présumé cerveau du putsch a pris fin le 19 décembre 2018 après 13 jours passés à la barre. Son audition était très attendue par tous pour savoir au moins qui a commandité ou qui a fait quoi, mais hélas ! Le célèbre prisonnier de la Maison d’Arrêt et de Correction des Armées (MACA) n’a pas délié suffisamment sa langue pour convaincre les plus sceptiques, et comme il le dit himself : je ne peux pas convaincre tout le monde. A quoi servira donc ce procès si à ce jour, on ne sait toujours pas qui a planifié ce putsch et qui a fait quoi ? Puisqu’à l’exception de Jean Florent Nion et Roger Koussoubé dit le Touareg qui ont reconnu partiellement les faits qui leur sont reprochés, tous les autres ont plaidé non coupable y compris le dernier accusé à comparaitre, le Général Djibrill Bassolé.
A ce rythme, serions-nous satisfaits à la fin du procès ?
Ce ne serait pas du temps perdu comme le général Diendéré l’avait bien dit en 2015 parlant de ce putsch ? L’on a toujours proclamé la vérité, la justice et la réconciliation mais là, la vérité risque de nous échapper. Qui a tué qui ? Qui a donné l’ordre ? On ne le sait toujours pas et ce n’est plus évident. Tous les présumés coupables à la barre se sont dénoncés, allant même à dire qui leur donnait les ordres pour aller récupérer le matériel de maintien d’ordre ou les missions vers la Côte d’Ivoire ou le Togo. Mais également pour la sécurisation des lieux pour éviter des affrontements par contre, personnes ne reconnait avoir tué et pourtant il y’a eu des morts.
Ce procès est loin de nous conduire sur le chemin de la réconciliation. Nous nous éloignons du but, c’est-à-dire la réconciliation. Elle ne pourrait se faire sur la base de ce procès, discrédité dès le départ et peu suivi par une bonne partie de l’opinion. Le Haut Conseil pour la Réconciliation et l’Unité Nationale (HCRUN), l’organe habilité à faire le travail de la réconciliation parle désormais de justice transitionnelle. Il rejoint du même coup la CODER de Ablassé Ouédraogo et compagnie, qui ont crié à qui veut l’entendre, que c’était la voie idéale pour aboutir à une véritable réconciliation.
Alors, est-ce la forme de ce procès qui pose problème ou le système judiciaire lui-même ? Ce procès qui devrait être l’occasion de réconcilier les burkinabè avec leur justice a manqué le rendez-vous de la renaissance. Les choses ont été biaisées au départ avec la levée du mandat d’arrêt international contre Guillaume Soro, le président de l’assemblée nationale ivoirienne. C’est anormal que dans un procès de ce type, on écarte des présumés coupables au nom de la diplomatie et que la suite soit les libertés provisoires. Certes, il est tout à fait normal que chaque détenu ait le droit d’en bénéficier mais faut-il des alibis pour accorder cette liberté à un prisonnier ? Non, pas du tout. La grogne de l’opinion contre la liberté provisoire du Général Bassolé a montré les limites du tribunal militaire dans l’octroi de ces libertés provisoires qui s’est transformée en une mise en résidence surveillée.
Enfin, l’absence des autres officiers appelés loyalistes à la barre et le refus de médiatiser ce procès en direct ou en différé a ôté quelques choses d’important à ce jugement. Conclusion, à quoi devrions nous attendre de ce procès ? Un procès qui va nous conduire vraiment à la réconciliation nationale ou à une exclusion qui ne fera qu’affaiblir la société, pour reprendre Monseigneur Anselme Sanon dans une interview accordée à Libreinfo.net courant décembre.
Albert Nagreogo
